« Diego Maradona, un enfant de la balle », sur France Culture : plongée dans la fabrication d’un mythe

Michel Pomarède revient sur le culte autour du footballeur argentin, qui a tant frappé les esprits par sa transgression des règles et sa capacité à incarner le triomphe des plus faibles. A la croisée de la littérature, de la poésie et du football.

Avant même la mort d’« El Pibe de oro » (le « gamin en or »), survenue le 25 novembre 2020, tout a été dit sur les mille et une facettes du diamant du football argentin Diego Maradona. On ne résiste pourtant pas à cette « grande traversée » proposée par l’émission éponyme de France Culture. En brossant le portrait de celui qui « transformait la boue en or », le documentariste Michel Pomarède, qui prévient d’entrée qu’il n’est « pas un grand fan de foot », raconte la fabrication d’une véritable mystique.

Tout commence dans un bidonville de Fiorito sans eau ni électricité de la périphérie de Buenos Aires, la capitale argentine. Fils d’une famille ouvrière de sept frères et sœurs, le petit (1,65 m) virtuose du football connaît le succès dès les terrains vagues puis le statut d’idole à Boca Juniors, club populaire de Buenos Aires.

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Avant d’accéder à la gloire à Naples (1984-1991), « capitale du sud du monde », selon l’écrivaine Alicia Dujovne Ortiz, où il sera deux fois champion d’Italie et remportera une Coupe d’Europe. Et de se hisser sur le toit du monde avec l’équipe d’Argentine, lors du Mondial 1986, contre l’invincible Allemagne en finale.

La revanche des vaincus

L’histoire de Maradona transcende les époques et les générations, nous dit le documentaire, parce qu’elle est celle de la revanche des vaincus face aux vainqueurs : de l’Argentine contre l’Empire britannique, du club des quartiers populaires de Boca Juniors contre les quartiers bourgeois représentés par River Plate, de la petite ville de Naples contre la riche Italie du Nord. « Le match dominical du Napoli est comme une porte de sortie de la souffrance. Le moment d’oublier une semaine où l’on tue l’autre ou l’autre tue l’un. La survie », déclare-t-il dans une interview retranscrite par le quotidien L’Equipe en 2007.

Le documentaire tente de percer le secret de la fascination proprement religieuse qu’il exerça et exerce encore, l’arrimant dans toutes les familles comme un membre tutélaire. Sa créativité et la générosité malicieuse avec laquelle il transgressa les règles établies – n’hésitant pas à parler de « la main de Dieu » lorsqu’il marqua un but de la main contre l’Angleterre en 1986 – étourdissaient les spectateurs de bonheur. Au point de susciter la nostalgie même chez ceux qui ne l’ont pas vu jouer.

Archives et témoignages de fans – écrivains, dramaturges, universitaires – croisent paroles d’experts et celles du joueur, pour rendre hommage à sa grâce technique et son incroyable vision du jeu, sans passer sous silence sa face sombre – cocaïne, Mafia, fraude fiscale, enfants illégitimes, violence conjugale…  – qui finira par le consumer. A la croisée de la littérature, de la poésie et du football, la série documente la portée culturelle d’un héritage indélébile. Elevant Maradona au rang d’« enfant de la balle », ainsi qu’on désignait les artistes géniaux naguère.

 

Grande Traversée : Diego Maradona, un enfant de la balle, série documentaire de Michel Pomarède, réalisée par Jean-Philippe Navarre, (Fr., 2021, 5 × 57 min). Disponible sur France Culture.

 

Mouna El Mokhtari

 

 

 

 

Source : Le Monde

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