Dialogue national:Au-delà des bonnes intentions ?

La rencontre entre le président de la République et celui de la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) continue d’alimenter l’actualité dans notre pays et remet encore en surface la question récurrente du dialogue entre les différents animateurs de la scène politique.

L’opposition, en l’absence de certains de ses principaux chefs, juge l’offre importante, l’accepte en principe et se réunira, vendredi 02 juillet, pour préparer sa réponse. Le président en exercice de la COD avait réuni autour de lui, mardi 29 juin, en début de soirée, les dirigeants de la coalition ou leurs représentants (Ahmed et Messaoud étaient absents à cette réunion. Le premier se trouvait à l’intérieur du pays pour accomplir un devoir social. Le second se trouvait à Damas où il assiste à une réunion des parlements arabes). L’ordre du jour comportait un seul point : le compte rendu de son audience avec le président de la République. Boidjel Ould Homeïd avait dit à ses pairs que le président était prêt à lancer le dialogue avec l’opposition et qu’il était disposé à recevoir tous ses leaders. Une intension ‘‘sincère’’ du chef de l’Etat qui attendait la fin de la table ronde de Bruxelles pour que, dira-t-il à son interlocuteur, son geste ne soit pas assimilé à une manœuvre politicienne. Difficile en effet de convaincre des adversaires qui croisaient le fer avec lui depuis presque deux années et qui gardent encore de mauvais souvenirs de leur défaite électorale lors de la présidentielle de juillet de l’année dernière. Mais quelque soit leur réticence, la disponibilité toute nouvelle de Aziz au lancement du dialogue les intéressent beaucoup. Surtout que le président en exercice de la COD avait évoqué l’Accord de Dakar avec son interlocuteur comme devant être le cadre dans lequel doit se dérouler le dialogue. Une approche qui n’est pas celle que voulait Aziz qui avait déjà dit publiquement que cet accord ‘‘ne nous concerne pas’’ au cours de son fameux meeting de Arafat qui avait jeté l’huile sur le feu et provoqué l’ire de l’opposition qui, en retour d’ascenseur, avait réclamé le départ du président Aziz du pouvoir… Cette fois-ci, sans y être complètement engagé, il ne s’était pas offusqué, comme par le passé, à l’évocation de l’Accord de Dakar et s’est plutôt montré conciliant.
Après avoir écouté le rapport verbal de Ould Homeïd, les dirigeants de la COD, soucieux de ne pas perdre cette opportunité et handicapés par l’absence de deux grandes personnalités de leur groupement, ont demandé à leur président en exercice de tenir sur le champ un point de presse dans lequel il enregistre leur attachement au dialogue, en attendant de formuler leur position définitive après le retour de leurs amis absents. La balle est donc dans le camp de l’opposition et l’opinion suit avec intérêt et attention la suite des événements.
Le chemin de la croix
Peut-on pour autant dire que le dialogue est lancé ? Certainement pas. Il ne s’agit en effet que des tous premiers pas, encore balbutiants, sur un chemin miné et semé d’embûches.
Il y a d’abord, comme dans toute entreprise pareille, le rétablissement de la confiance entre les deux bords. Une confiance fortement secouée par l’épisode de la dernière élection présidentielle et de ce qui s’en est suivi. L’opposition, la partie faible, exigera certainement des garanties. Et là se posera le problème des garants. Surtout qu’elle ne fait plus totalement confiance à la communauté internationale ou à ses représentants qui n’avaient prêté que très peu d’attention à ses réclamations et à l’exécution des autres volets de l’accord de Dakar. Dans ce cas, il faudra beaucoup de temps, de sacrifice de tout bord, de retenue et d’ingéniosité pour concevoir une nouvelle formule capable de prendre en charge les soucis et demandes de chaque camp. Ce ne sera pas une tâche facile.
Ensuite, il y aura la définition des sujets sur lesquels doit porter le dialogue. Là aussi, il y aura beaucoup de problèmes. L’opposition est intéressée par la préparation des échéances électorales prochaines et, par conséquent, par la gestion commune des outils de la transparence tels que le fichier électoral, le code électoral, la préparation matérielle des scrutins… Sur ce plan, la majorité pourrait ne pas poser beaucoup de problèmes. Mais ce qui pourrait constituer réellement une pomme de discorde concerne essentiellement le dossier des militaires et leur implication dans le jeu politique. L’opposition cherchera à sevrer l’armée définitivement par rapport à l’exercice du pouvoir dans le pays, tandis que le pouvoir, sans appeler à son implication, cherchera à faire valoir la sensibilité de tous les dossiers qui touchent la sécurité et la nécessité de ne pas trop fouiller les affaires de la grande muette…
A côté de ces problèmes qui vont certainement surgir, il faut tout de même relativiser les difficultés, par ce que les deux bords, pouvoir et opposition, sont pris à la gorge et savent tous deux qu’ils en ont arrivé à une situation de blocage qui ne profite à personne et qui risque d’emporter tout le monde. Et le pays avec. Cette conviction pèsera certainement dans la balance.

Mohamed Mahmoud Targui

 

Source: rmibiladi

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