Mauritanie : ce qui se cache derrière la polémique sur les langues nationales

La mise au point de l’assemblée nationale sur la non exclusion du français remet à l’ordre du jour l’instrumentalisation de l’arabe comme instrument à des fins politiques. Cette tentative de transgression du règlement intérieur est considérée par les observateurs comme un abus de pouvoir de la deuxième personnalité de l’Etat.

Ce qui frappe dans cette polémique exagérément relayée depuis plus d’une semaine par les réseaux sociaux au point d’en arriver à une désinformation d’une part et d’autre part le silence embarrassant des députés de la majorité voire le gouvernement. Il a fallu attendre l’ampleur des dégâts pour que l’assemblée nationale prenne toutes ses responsabilités pour apporter un démenti aux fausses rumeurs.

 

En effet la nouvelle disposition du règlement de l’assemblée nationale adoptée en juillet 2018 stipule qu’elle assure l’interprétariat des débats dans les langues nationales au sein de la chambre. Et dans aucun des textes figure l’interdiction de la traduction en français. La langue de Molière utilisée d’ailleurs dans les textes de loi comme dans les rapports et commissions parlementaires. Il s’agit donc d’un forcing d’un président de l’assemblée nationale, un ancien militaire proche de l’ancien président Ould Aziz recasé par Ould Ghazouani pour diriger le parlement. La mise au point par la chambre pour dissiper tout malentendu est un désaveu à la deuxième personnalité de l’Etat dont les intentions sont claires.

Faire de l’assemblée nationale un laboratoire des langues nationales dont la finalité le confinement des députés négro-mauritaniens dans leurs langues maternelles et la primauté de l’arabe sur tout. C’est la voie la plus rapide vers le communautarisme un effet pervers de l’utilisation des langues nationales par les députés. Un paradoxe parlementaire alors que les langues nationales ne sont pas pour autant utilisées à bon escient dans toute l’administration mauritanienne. Et au niveau de l’audiovisuel public elles représentent une goutte dans l’océan.

Ce qui se cache derrière cette polémique c’est le retour d’un certain chauvinisme arabe qui utilise les langues nationales comme cheval de bataille pour exclure le français dans la vie des mauritaniens. Une position dangereuse qui risque non seulement d’isoler la Mauritanie du monde mais diviser davantage les mauritaniens. C’est une atteinte à la constitution à l’unité nationale et à la cohésion sociale.

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

(Reçu à Kassataya 06 février 2020)

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