MCM : licenciements, opacité de la production, rupture de contrats… La compagnie canadienne rattrapée par le syndrome du colon

(La mine d'exploitation cuivrière de la MCM à Akjoujt. Crédit photo : anonyme)

Depuis quelques mois, les licenciements des travailleurs mauritaniens s’enchaînent à un rythme soutenu, ainsi que les ruptures de contrats avec les sous-traitants locaux.

Selon les syndicats et les sous-traitants, c’est une conséquence directe de la grève dure de l’an passé, et des mesures de la nouvelle direction de la compagnie minière.

Au moment de la grève dure des travailleurs de la MCM l’an passé, et pendant laquelle MCM avait délibérément laissé planer la rumeur qu’elle pouvait s’en aller, des mesures ont été prises en plus haut lieu pour qu’une telle initiative des employés ne se reproduise plus : changement de direction, avec à sa tête Bill Wakabayashi qui mène depuis une opération de grand nettoyage.Premières mesures qui commencent à se voir de l’extérieur, pour officiellement «réduire les charges» et «mater les fortes têtes» comme l’affirme un coordinateur syndical sur place : licenciements du personnel mauritanien, rupture de contrats avec les entreprises de sous-traitance locale, une œuvre sociale dans la zone d’Akjoujt qui s’effiloche comme peau de chagrin.«Un soi-disant remède de réduction des charges qui n’implique que la partie mauritanienne» soutient le coordinateur syndical. «Un non-sens vu les expatriés employés, et les entreprises de sous-traitance internationales, payés beaucoup plus cher que les locaux» continue le coordinateur.Au niveau des cadres, en particulier, les nouveaux proviendraient directement du cercle amical proche du nouveau directeur. Cette situation s’est développée bizarrement sans la réaction ni des autorités, ou de la société civile.Vanne ouverte de licenciements«Un travailleur est décédé il y a quelques jours. Il s’agissait d’un chauffeur qui a vu des produits chimiques se déverser sur lui. Il a été trainé dans différents hôpitaux de la capitale, avant de rendre l’âme. La prise en charge de la MCM a failli clairement à ce niveau» explique Maciré Diop, chargé de communication de la centrale syndicale CGTM.Dans le même temps, un autre a eu la main coupée dans un accident de travail ; là encore l’urgence médicale a failli, et les indemnités liées à cet accident ont été réduites.Ces nouvelles situations, un peu dans une ambiance «je-m’en-foutiste» de la nouvelle direction, résulteraient directement de la dure grève de l’an passé, où MCM avait menacé de se retirer temporairement. «Dans cette idée de sanctions continues depuis cette grève, la nouvelle direction a ouvert une vanne de licenciements» affirme Maciré Diop.«Les services sociaux à l’endroit des travailleurs mauritaniens ont été arrêtés (logements, frais médicaux, le transfert en priorité des travailleurs liés à la société de sous-traitance, SMBTD/APRESCOGE, plus gros pourvoyeur d’emplois sur le site, devant la MCM-ndlr), aucun dialogue avec les syndicats n’a été initié depuis l’arrivée de la nouvelle équipe.

 


L’opacité canadienne à l’œuvreJointe directement à leur siège à Nouakchott, en vain et après deux semaines de harcèlement téléphonique suivi d’un silence perpétuel, la MCM se décide à mettre Noorinfo en contact avec son chargé de communication, volontaire dans un premier. Finalement, après quatre jours de tergiversations, annonce laconique, et visiblement gêné, que «la MCM se réserve de répondre à ces questions aux syndicats avec qui la direction a une réunion dans les jours prochains, et éventuellement aux entreprises de sous-traitance dont les contrats ont été rompus».On se souvient que la mine d’Akjoujt avait été cédée aux canadiens de la MCM pour un prix symbolique de 900.000$, pour miser sur le développement de la région, autant sur le plan humain qu’économique. «Mais depuis un an, c’est tout l’effet inverse qui se produit» explique Salem Ould Hamar, un originaire de la ville, étudiant à Nouakchott.Le Canada a toujours refusé d’adhérer à L’ITIE, pour protéger l’opacité, souvent criminelle, de ses grands groupes miniers. «Comme d’habitude, les multinationales, notamment canadiennes, ont des politiques de bonne conduite et une image qu’elles affichent aux yeux du monde, et qui est à l’inverse des pratiques de leurs filiales dans les pays pauvres où elles tirent leurs profits» explique un représentant local d’une ONG très active à Akjoujt.«Depuis des mois, MCM compresse son personnel et ses sous-traitants. Elle est passée, à l’égard de ses contrats humains et de services, en mode veille, au minimum, même par rapport aux droits les plus élémentaires des travailleurs»En réalité, selon ce sous-traitant, MCM fait un chantage évident à l’état, réclamant «une concession minière pour l exploitation du minerai de fer dans la zone d’Akjoujt. Un nouveau sésame pour First quantum, la mine de cuivre, qui finalement exploite de l’or, et qui veut maintenant subordonner ses actions en Mauritanie à l’exploitation du fer ; une concurrence directe à la SNIM et à XSTRATA qui peinent encore à démarrer leurs investissement directs ou communs».«La petite mine veux devenir un géant en Mauritanie, mais elle pense qu’elle aura droit au fer, dans les mêmes conditions que le cuivre lui a été accordé à Akjoujt.En attendant MCM fait la sourde oreille et hiberne : «les contrats sont retirés aux sous-traitants mauritaniens, les employés sont mis au chômage, pour certains à la retraite anticipée, les préavis sont délivrés en masse, et la population d’Akjoujt commence à sérieusement se fâcher» note le représentant. Pourtant, les finances de la MCM sont au vert.Le plan de MCM serait selon les acteurs locaux, de s’affranchir des conditions demandées par le gouvernement, lors de l’octroi du permis d’exploitation pour 900.000, alors que le site en vaudrait 100 fois plus. C’est-à-dire de faire tourner l’économie locale, fournisseurs et sociétés, quota d’employés mauritaniens etc.

 


Et la police des mines ?«La police des mines n’est plus. Sans moyens, elle a rendu l’âme». Pourtant il y aurait beaucoup à constater : «MCM ne paye même plus la TVA aux fournisseurs locaux, prétextant une exonération, alors qu’elle n est pas exonérée pour les achats qui ne sont pas destinés directement à la production du minerai, ou faits localement par de petits fournisseurs qui ne peuvent dire mot» soutient ce fournisseur local de MCM,C’est il y a à peine quelques semaines que Mohamed Yahya Ould Hamoudy le directeur de la police des mines de l’époque annonçait sa démission de l’institution qu’il dirigeait. «Je constate une marginalisation de cette institution qui ne peut pas remplir son travail à cause d’un manque crucial de matériel. On ne m’a pas permis d’exercer mes fonctions selon les directives et les prérogatives données dans le cadre des orientation du président de la République» expliquait-il alors discrètement.La police des mines ne pouvant faire son travail, on comprend aisèment mieux le gros retard des autorités dans la mise à disposition à l’ITIE d’un rapport sur la production minière mauritanienne entre 2010 et 2012. Lequel retard a entraïné la suspension de la Mauritanie des instances de l’ITIE, prouvant au passage le manque de transparence total qui règne dans ce secteur et que la MCM rappelle aujourd’hui.La police des mines ne pointant pas son bout de nez, et les autorités, globalement ne réagissant pas, la compagnie se serait aperçue qu’elle pouvait faire ce que bon lui semblait. «Avec une optique très claire : Avec des compteurs qui sont en train d’être remis à zéro en termes de méthodes de fonctionnement (remplacement des acteurs locaux par des internationaux notamment- ndlr), le jour X, MCM pourra de nouveau mettre dans la balance de nouveaux emplois et de nouveaux contrats pour l économie mauritanienne. Pour plus d’avantages à son égard» dénonce le sous-traitant.En attendant, il n’y aurait plus de locations de voitures à long terme ; plus d’achats chez le géant DEMIMPEX TRACAFRIQUE, fournisseur des industries minières et concessionnaire officiel dans toute l’Afrique minière ; Les concessionnaires locaux d’engins industriels sont délaissés au profit d’un trader qui surfacturerait et commissionnerait les acheteurs. «C’est pareil pour le catering et l’approvisionnement alimentaire avec la mise à la porte de NEWREST et son remplacement par ANSAMBLE, directement intégré dans le circuit de la MCM par le trader en question».Mamoudou Lamine KaneSource  :  Noor Info le 04/04/2013{jcomments on}Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com

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