La communication du « Gendarme »

(Crédit photo :anonyme)

Depuis quelque temps, la police nationale commence à communiquer. On ne l’avait plus vu dans cette verve communicationnelle de 2005, lorsque, traquant Ould Hannena, les islamistes et les opposants de l’époque, son porte-parole faisait des apparitions en gros plan pour charger les adversaires du régime et ses victimes, sans que ceux-ci puissent avoir le droit à la réplique.

Depuis, la tradition s’était effacée, laissant la police agir, commettre des impairs et des bavures dénoncées sans que la voix de la police ne soit entendue.

Il aura donc fallu attendre l’arrivée du Général Ould Békrine à la tête de ce corps assez mal côté auprès de l’opinion pour voir ses agents communiquer pour défendre son image. C’est de bonne guerre. Seulement, communiquer ne veut pas dire entretenir le faux et encore moins, légitimer les actions prohibées par la loi que la police doit, entre autres, faire respecter.

En une semaine, nous avons subitement eu droit à deux « éclairages » de la police. Une fois pour nier des accusations de mauvais traitements contre une étudiante enceinte à l’ISERI et la seconde pour réfuter des allégations de tortures commises contre un jeune étudiant, porté disparu pendant quelques jours, alors qu’il se trouvait « caché » dans les geôles de la police. Des témoins auraient affirmé avoir perçu le jeune homme menotté et jeté dans une cellule au Commissariat du Ksar, là où, justement, des parents et des collègues du jeune étudiant étaient passés et se sont vus répondre que le malheureux ne s’y trouvait pas. Cette intrigante réponse était celle qu’ils ont reçue dans tous les commissariats de la ville. Pourtant, tous ses collègues arrêtés en même temps que lui avaient été élargis une fois le seuil du commissariat franchi. Tous les témoignages concordaient par ailleurs, qu’il avait été vu pourchassé puis arrêté par la police. Ses traces disparaîtront quand il sera embarqué dans l’un des tristes véhicules de ce corps.

Ce malheureux épisode donnera l’occasion à l’Observatoire Mauritanien des Droits de l’Homme (OMDH) de publier une déclaration dénonçant l’arrestation arbitraire et la soumission à la torture de ce jeune étudiant.

En réponse, un laconique communiqué de la police qui se contente de nier les faits. Avouant l’arrestation du jeune homme, le document s’insurge contre  » les accusations malveillantes, largement reprises par la presse, d’une organisation des droits de l’homme « .

Au grand malheur de la police, rares sont les personnes qui croient à ses déclarations. Et pour cause…. : à y voir de plus près, la police, n’a-t-elle pas arrêté, sans motif et en dehors des règles de procédures, des étudiants, filles et garçons qu’elle a soumise au mauvais traitements voire à la torture ? Les étudiants élargis, n’ont-ils pas fait cas de propos discriminatoires et d’acharnement contre eux ? La police, n’a-t-elle pas maltraité les étudiantes de l’ISERI, au vu et au su de tout le monde ? Le jeune agent administratif de l’établissement qui s’était insurgé contre les comportements de la police face à de jeunes filles ne s’est-il pas vu planqué au sol et battu à son tour ?

Et l’épisode d’Arafat où deux policiers auraient violenté deux filles dont une femme enceinte ? Et le cas du jeune boghéen arrêté la semaine dernière, sur une plainte orale non enregistrée, torturé et interdit de soins pendant de longs jours au Commissariat d’Arafat ? Et les arrestations arbitraires et souvent discriminatoires contre les petites gens du petit peuple, ceux qui n’ont ni de puissants cousins, ni de fortes tribus et sans le sou ?

Communiquer est une excellente chose. Mais nous avons besoin de la droiture du gendarme pour policer la police. Nous n’avons pas besoin des mensonges du propagandiste pour couvrir les atrocités et les injustices de la police. Nous avons besoin de la rigueur de l’homme de loi, de l’honnêteté du musulman pour que la police cesse d’être ce corps infesté par la gangrène de la corruption, de l’abus d’autorité, de la violation impunie de la loi et du racisme pur et simple contre une partie de notre population.

Nous avons besoin d’un chef de police qui voit d’abord la Mauritanie, la loi et la justice, non d’un receleur qui couvre les crimes de ses complices. Bref, nous avons besoin d’une police autre, pas d’une police qui ment plus pour mieux maquiller ses crimes et ses bavures !

Amar Ould Béjà

Source  :  L’Authentique le 20/03/2012

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