La ministre réussira-t-elle son ménage ?

L’adoption de nouvelles dispositions réglementant et organisant le travail des domestiques ressemble à s’y méprendre à un signal adressé par le pouvoir aux activistes des droits de l’homme qui ne cessent de dénoncer l’exploitation de cette catégorie vulnérable de la société.

Objets de pires violations de droits humains, de violences physiques et morales, les domestiques sont à la merci d’employeurs auxquels ils ne sont pas liés par un contrat.Ce qui leur dénie le droit de réclamer des meilleures conditions de vie et de trouver justice.

Devant les tribunaux et les commissariats de police, les conflits opposant les employés à leurs patrons donnent le plus souvent raison aux derniers qui profitent de l’absence de contrat et de l’impunité ambiante pour agir de manière irresponsable à l’égard des pauvres domestiques. D’ailleurs ces travailleurs engagés de manière informelle ne disposant pas d’un minimum de protection sociale et juridique sont dans bien des cas assimilés à des esclaves taillables et corvéables à merci. Les plus éprouvés par les pratiques découlant de ce type de servitude déguisé sont les femmes et les étrangers immigrés. Il est fréquent de voir les employé (es) accuser leurs « boys » de vol ou de viols en voulant abuser de plusieurs mois d’arriérées de salaires. Dans le cadre de la guerre menée par les militants anti-esclavagistes, le travail des domestiques harratines relève de pratiques d’assujettissement. Plusieurs cas ont été dénoncés ces derniers temps avec véhémence par les organisations de lutte contre l’esclavage et autres pratiques dévalorisantes au point que des révélations accablantes ont fini par troubler les pouvoirs publics. D’anciens maîtres comprenant que le rouleau compresseur de l’IRA et de l’association des femmes chefs de ménage pouvait les traquer ont vite changé les rapports d’antan avec les victimes qu’ils appellent de manière plus pudique «d’employés de maison. ». Les nouvelles mesures visent ainsi à fixer un seuil de rémunération, sur la base d’un contrat de travail et du paiement de l’assurance maladie et la sécurité sociale. Il s’agit en vertu de cette disposition de revoir et d’améliorer la réglementation antérieure pour prendre en compte les nouvelles exigences sociales et législatives en matière d’emploi. Ces mesures annoncées dans une communication présentée jeudi devant le conseil des ministres par Maty Mint Hamady, ministre de la Fonction Publique, du Travail et de la Modernisation de l’Administration seront détaillées et publiées dans un arrêté ministériel que les chefs de ménages seront tenus d’appliquer. Mais en l’absence de volonté claire et affirmée, il est fort à parier qu’une telle mesure ne profitera pas à la frange concernée par les abus récurrents et autres manquements graves aux droits des domestiques. Ceux qui à juste titre affichent une satisfaction mitigée pensent qu’avec la montée du chômage et la baisse des pouvoirs d’achat des ménages, le gré à gré sera la règle qui dominera longtemps les rapports entre les patrons et leurs boys qui n’ont de choix qu’à se contenter d’un pourboire ou à chômer… On se demande si par cette mesure la ministre fera bien le ménage dans ce secteur.

Cheikh Tidiane Dia

Source  :  Le Rénovateur le 07/05/2011

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