Jemil Mansour, leader du RNRD, Tawassoul à propos des révoltes en Tunisie et en Egypte : « La situation en Mauritanie est encore récupérable… »

Jemil Mansour est le leader du Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD Tawassoul) un parti politique mauritanien d’obédience islamique. Nous l’avons rencontré mercredi 02 février

vers 11 heures dans son bureau ou il suivait sur une chaine de télévision, les derniers développements de la situation en Egypte. L’entretien qui suit porte, entre autres, sur les révoltes populaires en Tunisie et en Egypte.

QDN/Est-ce que ce qui s’est passé en Tunisie et qui se passe actuellement en Egypte peut se produire en Mauritanie ?
Ce sont des révolutions populaires contre des régimes dictatoriales, antidémocratiques, des régimes adeptes d’une politique de gabegie globale. C’est une situation très grave en Egypte et en Tunisie qui a poussé les populations à se révolter. Je pense que la situation en Mauritanie est un peu différente. Il y a cependant dans notre pays des problèmes réels avec une politique gouvernementale qui menace la stabilité et la justice. Je pense aussi que la Mauritanie peut prévenir les troubles si elle engage dans l’urgence une reforme réelle. La situation en Mauritanie est encore récupérable. Mais s’il n’y a pas de reformes politiques, économiques et sociale, la situation va s’aggraver et entrainer des actes révolutionnaires de la part des citoyens. Ces reformes préventives requièrent une ouverture politique, un dialogue réel pour trouver une solution aux problèmes des prix, du chômage, les problèmes de l’unité nationale et une lutte sans merci contre l’esclavage.

QDN/Qu’est ce qui a le plus poussé égyptiens et tunisiens à se révolter ? Est-ce que c’est l’absence de liberté ou les problèmes sociaux ?
Les problèmes sociaux sont les plus déterminants. Mais il ne faut pas oublier qu’en Tunisie la situation économique est l’une des meilleures de tous les pays arabes. Trois facteurs sont à l’origine de ces révolutions. Il y a d’abord les problèmes sociaux (chômage, hausse des prix…) Il y a ensuite les problèmes politiques (absence de démocratie, violations des libertés) et enfin, des problèmes qui touchent à l’identité (en Tunisie par exemple le régime de Ben Ali a mené une guerre sans merci contre toute forme d’engagement islamique). Ce sont tous ces éléments qui sont à l’origine des révoltes populaires.

QDN/Avec ces révolutions, les occidentaux craignent l’arrivée d’islamistes au pouvoir. Les partis politiques islamistes dans le monde arabe sont-ils prêts à jouer pleinement le jeu de la démocratie pluraliste ?
Je voudrais d’abord signaler que les occidentaux encouragent la démocratie chez eux et encouragent la dictature dans la plupart de nos pays, surtout dans cette partie arabe du monde musulman. Il y a donc deux poids deux mesures. Je crois que les partis d’obédience islamique ont posé plusieurs actes prouvant qu’ils sont prêts à jouer pleinement le jeu de la démocratie pluraliste. Les partis islamistes ne tolèrent pas seulement la démocratie, ils la défendent quel que soit le choix des peuples pour eux ou pour des régimes laïcs. Les islamistes tunisiens, justement avec le parti Ennahda et la pensée de Rachid El Ghannouchi ont joué un grand rôle pour l’évolution de la pensée islamique dans ce domaine. Les exemples de la Turquie, du Maroc, de l’Indonésie, de la Malaisie…confirment que les partis d’obédience islamique jouent parfaitement bien le jeu démocratique. Ces partis ont seulement des alternatives différentes de celles des autres partis. Pour les partis d’obédiences islamiques, les relations avec l’occident doivent être basées sur l’intérêt mutuel, le respect et non la subordination et l’aliénation. Accepter l’opinion de l’autre, respecter la différence, c’est d’ailleurs ça la démocratie, c’est ça le pluralisme.

QDN/Les occidentaux craignent une remise en cause de la position de l’Egypte par rapport au problème Palestine avec la chute de Moubarak
Personnellement, je souhaite qu’il y ait un changement radical des postions de plusieurs pays musulmans par rapport au problème palestinien. Je crois que la cause palestinienne doit être défendue avec plus d’engagement. Je pense que l’établissement de relations avec l’entité sioniste est injustifiable. Mais, je voudrais cependant souligner que les manifestants en Egypte n’ont pas parlé de cette question palestinienne. Ce que les manifestants et politiciens égyptiens ont réclamé c’est une démocratie réelle et de meilleures conditions de vie. Si cette démocratie s’installe, il appartiendra alors aux citoyens égyptiens de choisir soit une politique de relation avec l’entité sioniste, soit une autre politique.

QDN/Pour trouver une solution à la crise ivoirienne, l’Union africaine a désigne un panel de cinq chef d’Etat pour mener des négociations. Cette option est elle efficace pour que les résultats des élections soient respectés ?
En Cote D’ivoire, il y a eu des élections qui ont été supervisées par les Nations Unies. Les ivoiriens ont choisi comme président Alassane Dramane Ouattara. Ce qui doit se faire au niveau de l’ONU, de l’UA et de la CEDEAO, c’est appuyer les actes visant à assurer le respect du résultat sorti des urnes, c’est-à-dire Alassane Ouattara président de la Cote D’Ivoire.

Propos recueillis par Khalilou Diagana

Source  :  Le Quotidien de Nouakchott le 03/02/2011

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