Le Mali ouvre la voie à l’intervention extra-régionale

La situation au Sahel ne cesse de se détériorer et déjà les bruits de bottes de militaires étrangers à la région se font entendre, faute d’une coordination entres les armées des pays sahélo-sahariens. Acculée par la menace terroriste, la Mauritanie a préféré faire cavalier seul, en allant pourchasser les phalanges d’Al Qaîda, positionnées dans la région de Tombouctou, en terre malienne.

Une terre où l’alliance entre les terroristes et les dirigeants n’est plus à démontrer, vu la passivité (pour ne pas dire complicité), à l’égard des phalanges de Abou Zeïd et de Belmokhtar, les deux chefs rivaux qui ont fait de la région une véritable poudrière. Du côté du Niger, l’armée semble impuissante, dans la mesure où les sept otages ont déjà été transférés au nord du Mali. L’enlèvement spectaculaire laisse supposer des complicités locales avérées. Visiblement et selon des informations recoupées, l’attaque n’aurait pas été menée par les éléments d’Abou Zeïd, mais plutôt par des mercenaires, grassement rémunérées par Al Qaîda.

La «valeur marchande» des Occidentaux est devenue tellement importante qu’elle a engendré «une chasse aux Blancs». Et dans la mine d’Arlit, au nord du Niger, exploitée depuis plus de 42 ans, par la firme française Areva, ces derniers ne manquent pas. Quelques complicités, «achetées» et l’opération d’enlèvement est réussie. «Cet enlèvement n’a pu être organisé qu’avec d’évidentes complicités locales, je dirais même de trahisons, y compris au sein des sociétés du groupe Areva elles-mêmes», avait affirmé à l’AFP une source proche du dossier, précisant : «Le commando a été renseigné de l’intérieur par des personnes qui ont eu accès à des informations extrêmement précises, qu’elles ont données ou vendues aux ravisseurs.»

Les autorités nigériennes quant à elles ont jeté un pavé dans la mare en affirmant avoir proposé une aide pour sécuriser les résidences des expatriés, mais les responsables d’Areva l’auraient refusée. Une révélation démentie par les concernés, qui ont expliqué que la sécurité de ses employés était de la responsabilité des forces nigériennes, conformément à un accord-cadre signé en 2008 avec Niamey. «Le Niger est un Etat souverain. Dans ce pays comme dans les autres, nulle part dans le monde, nos gardes ne sont armés (…)», ont-ils déclaré. «Quelque 350 militaires, gendarmes et policiers nigériens sont chargés d’assurer la sécurité à Arlit, selon Areva. La surveillance des résidences est quant à elle confiée à 150 gardiens non armés.» Pour autant, «la sécurité d’un site aussi vaste et ouvert qu’Arlit, face à une menace d’ordre militaire de type commando (…), nécessite un dispositif complet, incluant outre la police, la gendarmerie et les unités militaires classiques, une capacité d’anticipation et de réaction immédiate que seules des forces spéciales entraînées peuvent garantir», a pour sa part rapporté l’AFP en citant une source proche du dossier.

Une polémique qui dévoile le renforcement de la présence militaire dans la région, pourtant confirmée officiellement par le porte-parole du gouvernement du Niger. En effet, ce dernier avait qualifié la présence militaire française «d’appoint» et souligné : «Ce sont des citoyens français qui sont concernés, les forces françaises viennent en appoint aux forces nigériennes (…) Nous considérons les enlèvements comme une gifle et tout ce qui peut nous servir d’appoint pour régler la situation est le bienvenu.» Il est important de rappeler que «cet appoint» est venu en aide aux 80 militaires français positionnés dans une base à Niamey. Force est de constater qu’en adoptant cette position de «non concerné par l’activité terroriste» sur son territoire, le Mali n’a fait que légitimer cette intervention extra-régionale, d’abord en Mauritanie, puis au Niger, en attendant ailleurs.

Comment un Etat peut-il abandonner le trois quarts de son territoire à des terroristes et demander à ses voisins de venir faire le ménage chez lui ? C’est là la réalité amère à laquelle sont confrontés la Mauritanie, l’Algérie et le Niger, et ses conséquences sont déjà perceptibles : la bavure commise par l’armée mauritanienne à Tombouctou, à travers les lourdes pertes dans ses rangs, du fait d’une mauvaise appréciation du terrain et, vraisemblablement, d’une information erronée sur la cible. Cela démontre que tous les accords sur la coopération régionale s’avèrent caducs. Une situation dont Al Qaîda a tiré profit, qui ne fait que grossir ses rangs, renforcer ses capacités de nuisance et défier le monde par ses activités criminelles dans une région qu’elle a sanctuarisée. Hier, en fin de journée, l’organisation terroriste n’avait toujours pas revendiqué l’enlèvement des sept employés d’Areva.                       

Source  :  El Watan le 21/09/2010

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