En Afrique du Sud, le « mamie foot » change le regard sur le grand âge

« L’Afrique au centre du jeu » (3/4). Selon la pionnière Mama Beka, qui a organisé une Coupe du monde des mamies dans son village de Nkowankowa, le pays compte aujourd’hui quelque 200 équipes de grands-mères.

 Le Monde – L’Afrique du Sud a organisé deux coupes du monde de football. Celle de la FIFA en 2010, et celle de « mamie foot » en mars 2023. Shakira n’est pas venue chanter Waka Waka lors de ce tournoi international des grands-mères, mais des artistes locaux ont mis l’ambiance. Et les deux événements sont liés, puisque c’est en 2010, pendant le Mondial de football, que des journalistes étrangers s’intéressent au club du troisième âge d’une certaine « Mama Beka » et le font connaître au reste du monde.

Le reportage est diffusé sur les télévisions du Massachusetts, aux Etats-Unis, où Jean Duffy, footballeuse amatrice de 64 ans, et ses coéquipières se sentent instantanément « liées à ces femmes inspirantes » âgées de 40 à 80 ans. Impressionnée, la sportive sexagénaire prend contact avec Mama Beka et se lie d’amitié avec cette figure de Nkowankowa, un township rural du nord-est de l’Afrique du Sud.

Dans la province du Limpopo, tout le monde connaît Rebecca Beka Ntsanwisi, dite « Mama Beka », ancienne présentatrice sur la radio publique SABC, aussi appelée « Mère Teresa » pour ses activités philanthropiques. L’histoire du « mamie foot » en Afrique du Sud remonte au milieu des années 2000, quand elle se met à la marche sur les conseils de son médecin pour affronter un cancer du côlon. Des femmes la reconnaissent et la rejoignent. Le manque d’activité physique de ces femmes, souvent assignées à résidence pour s’occuper du foyer, accentue leurs souffrances.

« Les grands-mères ont presque toutes les mêmes problèmes : mal aux hanches, aux épaules et aux jambes, hypertension, diabète, stress. Et beaucoup d’entre elles font de la dépression à cause d’une vie difficile, confie Mama Beka. Je me souviens d’une femme qui avait perdu quatre de ses enfants du sida et qui devait prendre en charge ses petits-enfants alors qu’elle n’avait pas assez d’argent. »

« L’équipe offre un soutien émotionnel »

Un jour, après avoir marché ensemble, ces femmes se reposent sous un arbre. Des gamins jouent au foot sur le terrain d’en face. Un ballon s’égare à leurs côtés, comme une révélation. « L’une des grands-mères se met à courir pour tirer dans le ballon mais elle le rate, court de nouveau et le rate encore, essaie une énième fois et manque encore la balle. Les enfants étaient hilares ! Ils ont couru dans notre direction pour récupérer la balle et ils ont fini par faire des passes avec les grands-mères », raconte Mama Beka.

Le lendemain, l’une des mamies l’appelle pour lui dire tout le bien que ce jeu lui a fait. Elle a dormi comme un bébé et veut recommencer. La rumeur circule que Mama Beka monte une équipe de foot. « On était dix le lendemain !, se souvient-elle. Les gens me reconnaissaient, ils criaient mon nom, ça prenait de l’ampleur. » Cinq jours après, ils sont 80 à jouer au foot et le club des Vakhegula Vakhegula (« les mamies », en langue tsonga) voit le jour en 2007. Aujourd’hui, la patronne dit compter 200 équipes de « mamie foot » en Afrique du Sud.

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(Johannesburg, correspondance)

 

 

 

Source : Le Monde

 

 

 

 

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