Crise post-électorale Mauritanie : le lourd héritage de Ould Aziz à Ould Ghazouani

Un pays profondément divisé entre maures, afro-mauritaniens et Hratines. Un pays à bout de souffle à genou qui roule à crédits depuis 2009 sur fond d’un bradage des ressources naturelles et de l’école publique au plus haut sommet de l’Etat. Un pays où la vie démocratique est réduite à une portion congrue et où il fait mal de vivre ensemble.

 C’est en substance la fracture politique, économique, sociale et culturelle léguée par le président Ould Aziz à son successeur. Un lourd héritage qui pèsera à coup sûr sur les 5 années à venir et d’ores et déjà dont les premiers mois se déroulent sur des peaux de bananes. Un pays en état de siège sur fond d’une crise ethno-raciale marquée par des arrestations massives, des condamnations des manifestants et expulsions des étrangers Ouest-africains en première ligne des sénégalais. Ould Ghazouani hérite d’un Etat policier qui a mis tous ses moyens dans un arsenal répressif contre ses opposants. La vie démocratique réduite depuis 2009 à une portion congrue est le signe d’un régime autoritaire. Cet héritage doit faire place à un Etat de droit qui respecte les institutions, la citoyenneté et les libertés.

Le nouvel homme fort mauritanien est appelé ainsi à saisir son mandat pour initier un dialogue politique avec l’opposition pour enfin effacer le lourd héritage de Ould Aziz qui avait bâti tout son pouvoir sur la division des mauritaniens. C’est la voie royale pour l’unité nationale et la cohésion sociale. Cette nouvelle volonté politique pourrait conduire à une réconciliation nationale, une œuvre de longue haleine qui passe par la justice le devoir de mémoire et de réparations des victimes civiles et militaires. Le lourd héritage économique et social apparaît le moins lourd à porter malgré un état de dégradation avancée.  Avec une dette publique de plus de 80 pour cent du PIB Ould Ghazouani peut mieux faire à condition d’assainir les finances publiques et profiter de la croissance pour partager les richesses nationales entre les mauritaniens. Il s’agit donc de tourner le dos au bradage de la SNIM, des terres agricoles et de l’école publique. C’est des réformes structurelles qui s’imposent dans tous ces secteurs clés de développement et en particulier la santé confrontée à une politique de découragement de rémunération et de conditions matérielles des médecins généralistes et spécialistes et personnels secondaires.

Le président Ould Aziz a laissé une fracture sociale dont les conséquences sont énormes pour les générations à venir. D’un côté une oligarchie militaire en face de l’autre plus de la moitié des mauritaniens pauvres au point que les régions du Sud et de l’Est sont au bord de la famine. Enfin en politique étrangère l’héritage d’une diplomatie dictée par certains pays arabes comme l’Arabie Saoudite, le Qatar et les Emirats arabes Unis devra faire place à une diplomatie plus raisonnée et raisonnable. Parmi les dossiers les plus brûlants, le Sahara occidental une patate chaude sur le plat de Ould Ghazouani dès le premier jour de son investiture avec la présence du président sahraoui à Nouakchott. La balle est désormais dans le camp du nouveau chef d’Etat qui détient une clé de sortie de la crise avec la possibilité de revenir à la position initiale de stricte neutralité avant 2009. Et puis le plus urgent c’est de rassurer les pays amis de longue date de la Mauritanie en particulier le Sénégal, le Mali et la Gambie dont les ressortissants ont été accusés d’avoir voulu déstabilisé durant les événements post-électoraux. Ould Ghazouani est appelé entre autre à initier une autre politique africaine de l’immigration qui respecte les conventions sous régionales,régionales et internationales et la politique de bon voisinage.

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

(Reçu à Kassataya le 15 juillet 2019)

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