Afrique/Europe: Comment délimiter la frontière entre les stéréotypes et le respect des droits des migrants ?

(Clandestin arrêté en Mauritanie. Crédit photo : anonyme)

L’institut Panos Paris (IPP), en partenariat avec l’Institut Panos Afrique de l’Ouest (IPAO), l’Union Européenne (UE) et la Direction du Développement et de la Coopération Suisse DDCS), tient, à Marseille, du 19 au 23 novembre, une rencontre consacrée à l’information et au renforcement des capacités de journalistes sur les questions migratoires.

Onze journalistes profiteront de ces cinq jours dans la cité phocéenne pour parfaire leur connaissance du sujet, échanger avec des professionnels travaillant dans le domaine et enquêter sur le terrain.

Cet Atelier « Mieux informer sur les migrations » vise à « stimuler », fait remarquer l’IPP, « la couverture médiatique sur les enjeux de la migration en Afrique de l’Ouest, au Maghreb et en Europe ». La rencontre cherche à « contribuer », ajoute l’institut, « au respect accru des droits des migrants, par la spécialisation des journalistes ». Dans cette perspective, elle entend « apporter aux journalistes des connaissances sur la thématique migratoire, inscrite dans une perspective nationale, régionale et intercontinentale ».

Renforcement des compétences de journalistes

En mai 2011, l’IPP lançait un nouveau projet baptisé « Sans papiers sans clichés, mieux informer sur les migrations », à l’occasion d’un séminaire à Casablanca réunissant trente-cinq rédacteurs en chef issus de sept pays : Algérie, Espagne, France, Mali, Maroc, Mauritanie et Sénégal. Développé en partenariat avec l’IPAO et financé par l’UE et la coopération bilatérale suisse, ce projet avait pour ambition de renforcer durablement les capacités des journalistes à informer sur les sujets migratoires, ainsi qu’à permettre, aux migrants, de faire entendre leur voix. « Les activités de formation de journalistes constituent un aspect-clé de ce projet. Elles ont été programmées, sur la durée totale de mise en œuvre (2011-2013), dans l’ensemble des sept pays, ainsi qu’en Tunisie où elles seront réalisées avec le soutien du programme suisse à Tunis. Dans chaque pays, la « recette » est identique : deux ateliers sont réalisés, à un an d’intervalle, impliquant douze journalistes : huit originaires du pays où se tient l’atelier et quatre d’autres pays du projet. Fin 2013, quatre-vingt-seize journalistes auront ainsi pu vivre cette riche expérience, au travers de seize ateliers », explique Charles Autheman , directeur des programmes à l’IPP. L’atelier de Marseille intervient après ceux d’Oujda, Dakar, Bamako Melilla et Zarzis avant les deux derniers à Nouakchott et en Algérie. Au menu de la rencontre : l’asile en France, l’Agence Frontex et les violations des droits des migrants qui découlent de ses opérations. Des communications sur le centre de rétention administrative de Marseille et le mandat du HCR en France seront présentées aux participants. Les reporters effectueront des enquêtes et des reportages sur le terrain, en individuel ou en groupes de deux ou trois.

Comment remettre à l’endroit le débat sur les migrations ? Un constat s’impose aujourd’hui : face aux flux migratoires, l’Europe se barricade. Les chaînes satellitaires véhiculent des clichés primaires, évoquant les migrants « affamés et dépenaillés », fuyant misère et chômage, à la recherche d’un Eldorado qui se révèle être un mirage. Dans la presse, la problématique est, banalement, traitée de manière très biaisée, à grands coups de stéréotypes. En dépit du rôle important qu’ils jouent, aussi bien pour leur pays d’origine que pour leur pays d’accueil, on ne parle des migrants que sous un visage hideux. Au demeurant, les media s’intéressent rarement à eux. Notamment ceux des pays africains qui n’ont pas les moyens de les suivre dans leurs pérégrinations.

En face, certains spécialistes se demandent : « À qui profite le verrouillage des frontières ou la construction de murs ? Quelles organisations tirent parti de l’enfermement et de l’expulsion des sans-papiers ? » Selon ces experts, « les gains électoraux recherchés, par les gouvernements mettant en œuvre des politiques sécuritaires, sont connus, tant l’instrumentalisation du sort des étrangers a été la norme, ces dernières années, en France comme dans la plupart des pays européens. En revanche, les motivations économiques et diplomatiques visant à promouvoir des dispositifs brisant la vie de migrants le sont moins. Car les migrations se révèlent être un accélérateur de compétences… » ; autrement dit, d’accroissement des tensions compétitives entre le Nord et le Sud. On camoufle les vrais enjeux, la politique migratoire souffre d’opacité et le débat est fréquemment tronqué, par la manipulation constante des objectifs. Nécessaire, l’initiative de l’IPP n’en est que plus méritoire : elle vise, tout simplement, la paix entre les peuples…

THIAM Mamadou, envoyé spécial à Marseille

Source  :  Le blog de Thiam Mamadou le 21/11/2012{jcomments on}

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page