Nouvelles d’ailleurs: Que dire?

(Crédit photo : Nathalie Duvarry)

{jcomments on}Il y a des jours comme ça : je me sens fatiguée, lasse de tout, des petits riens et des grands machins qui font nos actualités. Nos vies. Nos passés et nos futurs.
Les semaines et les mois se suivent et l’actualité reste la même. Chaque événement, majeur ou non, est analysé, décortiqué sans, le plus souvent, une prise de temps nécessaire à la vérification des infos. L’actu va vite. Très vite. Et elle permet tous les raccourcis. Pas le temps de prendre le recul. De comprendre entre les lignes, de vérifier les sources.

Notre presse se divisant, en gros, en 2 camps, celui du pouvoir ou proche du pouvoir, celui de l’opposition, une même actu devient le prétexte à tout. L’info en elle même disparaît au profit du règlement de compte.
L’info, animée alors d’une vie propre s’empare du net. Partant du principe qu’une chose qui est écrite ne peut que être vraie (l’écriture comme gage de véracité), tout un chacun s’empare des mots.
L’info s’anime, se démultiplie.
De quoi, alors, pourrais-je vous parler en ce début de semaine?
Du crash de l’avion militaire et des 7 morts? Pour dire quoi…. Que notre pays connait un nombre anormal d’accidents militaires? Que cela pose la question de la fiabilité de nos avions? De la maintenance? Des contrats avec la Chine en ce qui concerne l’achat d’aéronefs militaires? De la pertinence d’un contrat commercial passé entre notre armée et les investisseurs privés au sujet du transport de l’or et des membres du personnel desdites sociétés minières? Des avenants du contrat passé entre l’armée nationale et Tasiast, au détriment d’une petite entreprise privée civile qui, auparavant, avait le marché et qui s’est retrouvée au chômage au profit d’un business militaro/financier? De la sécurité des nouakchottois au regard de la présence d’un aéroport et militaire et civil en pleine capitale?
De la mort d’un manifestant, ouvrier chez MCM, lors d’une manifestation des employés de la MCM dimanche à Akjoujt? Pour dire quoi… Que le climat social est si tendu que l’on sentait arriver les débordements? Que nos forces de l’ordre ont la matraque souvent lourde? Que le dialogue est depuis longtemps rompu entre syndicats et sociétés minières? Que la colère est bien là? Que notre pays, devenu un grand terrain de jeu lucratif pour tout ce qui se fait comme multinationales minières dans le monde, est maintenant une grande boutique où des sociétés privées s’enrichissent sans que le citoyen lambda en voie les retombées pour sa bourse? Que se posent des questions essentielles d’environnement, de pollution? Que se posent des questions de santé publique pour les populations qui vivent dans les environs des grandes mines qui défigurent nos paysages? De pollution des fonds marins, des côtes, des terres, des nappes phréatiques? Que le désespoir social est si profond et la distorsion entre les discours politiques et la réalité si en inadéquation que la tension est partout? Que le mécontentement est partout, en chacun : vie trop chère, chômage, perte des repères, désespérances?
Des résultats du bac 2012? Pour dire quoi… Que notre système scolaire est un système qui a échoué? Que nous fabriquons des générations d’ignorants? Que l’intégration par l’école est un vaste foutoir auquel n’ont cru que les politiques? Que seuls s’en sortent ceux dont les familles ont les (grands) moyens d’envoyer leurs enfants dans les écoles privées ou au Lycée Français? Que les Etats Généraux de l’Education devront dresser le vrai bilan de l’Education Nationale et non pas biaiser, camoufler, mentir? Que nous avons produit des générations de jeunes qui sont (il faut dire les choses), pour la plupart quasi analphabètes, et mauvais en arabe et mauvais en français, loin de la génération post indépendance qui savait écrire, parler, et qui avait une certaine culture?
De l’esclavage? Pour dire quoi… Que nous sommes une société hypocrite où nos érudits, pendant des siècles, se sont servis de la religion pour asservir des hommes et des femmes? Qu’ils ont justifé l’injustifiable? Que les haratines sont les damnés de la terre, marqués pour des siècles et des siècles au sceau de l’esclavage? Qu’ils sont l’objet de toutes les récupérations politiciennes au détriment de leurs souffrances? Que nous avons érigé l’hypocrisie et l’exploitation de l’homme par l’homme au rang de valeur culturelle? Que nous sommes prisonniers d’une sorte de Sahwa perverse où toutes les stratifications et les codes inégalitaires sociaux sont entretenus, véhiculés? Que nous avons été des sociétés esclavagistes et que nous le sommes encore aujourd’hui?
Etc, etc…
Alors, aujourd’hui, je ne vous dirai rien de tout cela.
Aujourd’hui je suis en désespérance…
Salut.

Mariem mint DERWICH

Source  :  Le Calame le 18/07/2012

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