Guinée : le procès du massacre du 28 septembre 2009, un grand pas pour la lutte contre l’impunité

 The Conversation  – Depuis plus d’un an se déroule à Conakry le procès historique de l’ancien chef d’État guinéen, le capitaine Moussa Dadis Camara, et de dix de ses co-accusés, soupçonnés d’être les responsables du massacre du 28 septembre 2009.

Annoncé, puis sans cesse repoussé sous la précédente présidence d’Alpha Condé (2010-2021), ce procès a finalement débuté 13 années après les faits, le jour anniversaire du massacre, à la suite d’une décision du colonel Mamady Doumbouya, le nouvel homme fort du pays depuis le coup d’État du 5 septembre 2021. Il représente un moment unique dans l’histoire de ce pays d’Afrique de l’Ouest, marquée depuis des décennies par des régimes autoritaires et des violations massives des droits humains commises dans une totale impunité.

Treize ans d’attente, un an de procès

Le 28 septembre 2009 et les jours suivants, les forces de sécurité guinéennes ont réprimé un rassemblement politique pacifique qui avait réuni dans un stade de la capitale, Conakry, des manifestants venus exprimer leur hostilité au maintien au pouvoir du capitaine Moussa Dadis Camara, alors président de la junte militaire dite « Conseil national pour la démocratie et le développement » (CNDD), à la tête du pays depuis le putsch militaire du 8 décembre 2008.

À cette occasion, comme a pu l’établir une commission des Nations unies, plus de 150 personnes avaient été tuées, des milliers d’autres blessées et plus d’une centaine de femmes avaient été violées. Les forces de sécurité avaient ensuite cherché à dissimuler les faits en déplaçant les corps vers des fosses communes.

L’étape de cette première année de procès tend à démontrer que les arguments mis en avant durant des années, sous la présidence d’Alpha Condé, par les autorités politiques pour justifier le report de l’ouverture d’un jugement visaient surtout à masquer leur souhait qu’un tel jugement n’ait pas lieu. Elle démontre aussi que porte ses fruits la détermination de l’actuel chef d’État, le colonel Mamady Doumbouya, lui-même au pouvoir après un putsch militaire du 5 septembre 2021.

En dépit d’imprévus, comme la grève des gardiens de prison ou le boycott des avocats réclamant une aide juridictionnelle pour leurs clients, le procès des 11 accusés se déroule dans des conditions satisfaisantes devant le tribunal criminel, à Conakry.

Le capitaine Moussa Dadis Camara et ses acolytes du CNDD – qui comparaissent tous détenus après une courageuse décision du président du tribunal – sont accusés de meurtres, de violences sexuelles, d’actes de torture et d’enlèvements, chefs d’accusation pour lesquels ils risquent la prison à vie si leur culpabilité est reconnue. Tous ont plaidé non coupable pour l’ensemble de ces chefs d’accusation.

Le tribunal chargé de leur procès siège dans des locaux neufs financés par le budget national. Il est composé exclusivement de magistrats guinéens, qui appliquent le droit pénal guinéen. Au rythme de trois journées d’audiences par semaine, le procès est retransmis en direct à la télévision nationale. Loin d’occasionner des troubles dans le pays (y compris en Guinée forestière, le fief de plusieurs des accusés), il captive la population guinéenne, qui suit avec intérêt les débats au cours desquels ses anciens gouvernants sont jugés comme des criminels de droit commun.

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Source : The Conversation   – (Le 26 octobre 2023)

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