Les heures sombres et sanglantes de la Saint-Valentin

SlateDate romantique pour certains, jour tragique pour d’autres, la célèbre fête des amoureux rappelle aussi de funestes événements ayant eu lieu un 14 février, du Moyen Âge jusque très récemment.

1349, le brasier de Strasbourg

Le pogrom de Strasbourg est l’un des plus meurtriers. Le 14 février 1349, des centaines d’habitants juifs de la ville, peut-être même jusqu’à 2.000, sont décimés par le reste de la population. À cette époque, les pogroms sont alors fréquents en Europe occidentale. La haine des juifs, déjà installée, s’est intensifiée avec l’arrivée d’une nouvelle menace. L’épidémie de peste noire ravage en effet l’Europe depuis 1346 environ et provoque la panique partout sur le territoire. Les juifs sont alors tenus pour responsables de la maladie, accusés d’empoisonner les points d’eau pour répandre le fléau.

À Strasbourg, la population gronde, demande la tête des juifs. Rapidement, le quartier dédié à la communauté juive est bouclé, plus aucun d’entre eux ne s’aventure dans les rues. Les dirigeants de la ville tentent de les défendre mais sont renversés par les différentes corporations des métiers, bouchers et tanneurs en tête, alors les plus hostiles aux juifs. Ils auraient contracté des dettes auprès d’eux et souhaiteraient ainsi les voir disparaître opportunément.

Le 14 février, dès l’aube, le peuple strasbourgeois envahit le quartier juif et égorge celles et ceux qui s’y trouvent. Les survivants sont traînés au cimetière juif et brûlés vifs. Seuls ceux qui abjurent leur foi sont épargnés. Les brasiers auraient fumé six jours durant, noircissant le ciel d’Alsace à des kilomètres à la ronde.

1929, Al Capone contre Bugs Moran

En 1929 se joue un autre massacre historique, en ce jour de Saint-Valentin. Il résulte du célèbre affrontement entre les mafias rivales de Chicago: dans les quartiers sud, celle dirigée par le fameux gangster italo-américain Al Capone; au nord, celle de son rival, l’Irlandais George «Bugs» Moran.

À la fin des années 1920, en pleine prohibition, Al Capone, dit «Scarface», est à la tête de la pègre la plus importante de Chicago et l’emblème du crime organisé dans la ville. Trafic d’alcool, bars clandestins ou encore maisons closes: il diversifie ses activités, concentre les parts de marché et menace ainsi les autres mafias de la ville. En représailles, le gang irlandais de North Side tente à plusieurs reprises de l’éliminer, sans succès. La concurrence fait rage, les fusillades se multiplient, Al Capone décide de prendre les choses en main et d’éliminer une fois pour toutes le clan rival.

Il organise minutieusement un piège pour Bugs Moran et ses hommes: les attirer dans un hangar isolé sous prétexte de négociations autour d’une cargaison de whisky avant de les faire assassiner par ses sbires, déguisés en faux policiers. Dans la matinée du 14 février 1929, sept membres du gang ennemi pénètrent dans l’entrepôt. Ils sont désarmés par les hommes d’Al Capone qui miment une fausse descente de police, alignés contre un mur et exécutés par quatre-vingts balles de mitraillettes et fusils de chasse. Le plan ne se déroule pourtant pas comme prévu: Bugs Moran ne fait pas partie des victimes. En retard au rendez-vous, il a miraculeusement échappé au guet-apens et à la mort.

De son côté, Al Capone est en Floride au moment du bain de sang, pour disposer d’un alibi solide en cas de soupçon. Jamais inquiété pour ce crime faute de preuves, tout le monde sait toutefois qu’il est à la manœuvre. Il devient le gangster le plus craint des États-Unis mais aussi l’ennemi public numéro 1, ce qui causera le déclin de ses activités et la fin de son hégémonie. Ce massacre de la Saint-Valentin, d’une ampleur inédite pour les règlements de compte mafieux de l’époque, signe ainsi la fin de l’âge d’or des gangs de la prohibition.

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Juliette Baëza — Édité par Diane Francès

Source : Slate (France)

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