Le halal, un concept qui relève de la morale et non du légal

Oumma – Définir les concepts puis déterminer à qui revient le droit de décision dans quelle matière et de quelle manière, ce sont des balises incontournables si l’on veut faire avancer le débat sur le hallal vers la clarté du jour. Ainsi, les responsabilités seront définies afin de dissiper ce brouillard à la fois conceptuel et législatif.

Au niveau législatif, il s’agit d’astreindre le producteur aussi bien à la traçabilité au niveau du produit que l’usage technique appliqué à ce même produit, le flou législatif actuel laisse la porte grande ouverte aux avidités mercantiles et sans scrupule des uns et des autres.

Côté consommateur, sa responsabilité est effectivement plus grande encore, il faut arrêter cette victimisation qui veut que les choses ne puissent changer que du haut, c’est bien au consommateur que revient en fin de compte d’encourager ou de boycotter un produit suspect ou malsain, au lieu de mordre les yeux fermés à l’appât du moindre prix.

Le halal, un concept qui relève de la morale et non du légal

Le hallal ne se vend pas, il se pratique comme conduite individuelle. Le hallal relève de la conception que le musulman se forge à partir de sa propre lecture des textes et de son identité individuelle. Consommer hallal relève donc, de la morale individuelle, il ne saurait faire l’objet d’un dictat collectif émanant d’une conscience externe à la conscience intime.

L’Islam n’a pas institué un clergé officiel mais récuse également l’attitude cléricale. C’est bien au croyant que revient le droit en toute intimité de consommer ou pas un produit connoté hallal. Le rôle des experts en matière religieuse se limite à clarifier autant que possible le cas étudié, exposer toutes les pistes envisageables, mettre sur table les avis différents ainsi que leurs arguments en toute objectivité intellectuelle, puis donner leur point de vue comme un avis non contraignant parmi d’autres.

Le cas du jeûne du mois de ramadan est éloquent en la matière, en dehors de conditions extrêmes ou de maladies graves, seul le jeûneur peut juger s’il est en capacité ou non d’accomplir son jeûne lorsqu’il rencontre des difficultés pour pratiquer son culte.

Le qualitatif est une valeur indissociable du Hallal

«Oh les gens ! Mangez de ce qui est sur terre halâlan tayyiban… »[i]
« Et mangez de ce qu’Allah vous a pourvu halâlan tayyiban… »[ii]
« Mangez donc de ce que vous avez eu en butin halâlan tayyiban… »[iii]
« Mangez donc de ce qu’Allah vous a pourvu halâlan tayyiban… »[iv]

Mettre l’accent uniquement sur l’abattage des animaux à consommer est réducteur de la position de l’Islam en la matière. Les quatre versets coraniques cités ci-dessus lient directement le hallal au tayyib qui signifie aussi bien pur, mûr, agréable, de bon goût que de bonne odeur, d’où Tayyiba épithète de la ville du prophète, Médine. Le parfum en arabe se dit tîb qui vient de la même racine.

D’un point de vue linguistique, les termes hallal et tayyib sont directement accolés l’un à l’autre comme attributs ou synonymes, sans la moindre liaison. Il nous paraît dès lors abusif de ne retenir que le terme hallal dans ces versets, outre le fait que, souvent, le sens qui lui est attribué est galvaudé sans discernement.

Cette lecture n’est pas étrangère à la doctrine musulmane. Par opposition au consommable tayyib, la jurisprudence a recours à al-jallâla mal sain à la consommation. Plusieurs hadiths existent à ce sujet, ce qui est une preuve tangible que le sens pratique du hallâl en Islam ne se limite pas seulement à la manière d’abattre l’animal.

« Le prophète a déconseillé de consommer la chair provenant d’aljallâla ainsi que  son lait »[v]

Le terme al-jallâla désigne la bête dont la consommation est hallal, mais dont la nourriture est  constituée de produits impropres ou malsains. La mise en  quarantaine est fortement recommandée pour rendre al-jallâla propre à la consommation, en la nourrissant le temps nécessaire par des aliments naturels et sains.[vi]

Faut-il appeler donc hallâl un poulet dont la vie, de la naissance à l’abattage, est un enchaînement de processus industriel qui n’a rien de naturel sauf la forme ? Est-il hallâl de consommer un poulet qui n’a jamais foulé la terre de ses pattes, qui n’a jamais respiré l’air extérieur, qui n’a jamais goûté l’herbe fraîche, qui ne s’est  jamais exposé à la chaleur naturelle du soleil… ? À notre sens, un poulet dont la courte vie, huit semaines, se déroule confinée dans un espace artificiel, qui est nourri  d’aliments suspects, entre dans la catégorie d’al-jallâla.

La question de l’abattage

Concernant la question de l’abattage rituel, il serait plus objectif d’exposer les avis différents en la matière. Nous les résumons ainsi sans soutenir aucun d’eux, car ce n’est pas l’objectif de ses lignes.

Pour les uns, l’abattage par égorgement, n’est pas une condition sine qua non. Pour d’autres, seul l’abattage manuel par égorgement rend la consommation de la viande hallal, alors que certains acceptent l’abattage mécanique.

 

 

 

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Notes :


[i] Coran, sourate II, verset 168.
[ii] Coran, sourate V, verset 88.
[iii] Coran, sourate VIII, verset 69
[iv] Coran, sourate XVI, verset 114.
[v] Hadith, sunan Ibn Mâja, chapitre sur les animaux à consommer (adabâih), 3189. D’autres versions sont rapportées par : Ahmad, Thirmidhî, Abou Dâoud pour ne citer qu’eux.
[vi] J’ai connu personnellement cette pratique au Maroc. Dans ma famille, le poulet fermier élevé en pleine nature devait passer au régime pur grain pendant quelques jours avant sa consommation.

Source : Oumma

 

 

 

 

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