Iran : une entraîneuse de l’équipe nationale de ski interdite de sortie du territoire par son mari

Samira Zargari n’a pas pu participer aux championnats du monde organisés en Italie.

Jusqu’à la dernière minute, l’équipe féminine de ski alpin et la fédération de ski iraniennes ont voulu y croire : tout avait été organisé de sorte que, si « le problème » était résolu, l’entraîneuse des skieuses iraniennes, Samira Zargari, puisse recevoir un visa italien et voyager avec les autres pour participer, du 9 au 21 février, aux championnats du monde, organisés à Cortina d’Ampezzo en Italie.

Rien n’y a fait : Samira Zargari, âgée de 37 ans, a été empêchée par son mari de quitter le territoire, en vertu d’une loi de la République islamique. Selon cette loi, les Iraniennes doivent obtenir l’autorisation écrite de leur mari pour demander un passeport et voyager à l’étranger. Le mari a la possibilité de révoquer cette autorisation à tout moment.

« Cela fait des jours, des mois, des années, que mon mari se moque de mon travail. Un mari qui est né aux Etats-Unis et qui n’a même pas grandi en Iran », a réagi Samira Zargari sur son compte Instagram, le 19 février. « J’expliquerai les raisons de cette interdiction plus tard mais, en ce moment, j’ai besoin du soutien des dirigeants, parce que cela fait des années que je me bats pour le drapeau de mon pays », a écrit la sportive qui a continué à publier, sur Instagram, les photos et les vidéos que son équipe lui envoyait des compétitions en Italie.

 

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Reprise par les médias iraniens, la nouvelle a fait un tollé sur les réseaux sociaux où les internautes ont exprimé leur indignation et leur rejet des lois discriminatoires envers les femmes. « Tu t’investis toute ta vie pour réaliser tes rêves et, au moment où tu t’en approches, tu auras quand même besoin de l’accord de ton époux : Samira Zargari n’a pas pu accompagner ses disciples en Italie », se désole ainsi une internaute sur Twitter. « Toute Iranienne est égale à une esclave », réagit une autre.

 

Recueil de signatures

 

Samira Zargari n’est pas la première sportive iranienne à faire les frais de cette loi. Avant elle, Zahra Nemati, double médaillée aux championnats du monde de tir à l’arc, a connu le même sort en 2017. Son mari avait justifié sa décision, sans détour, par l’existence « de problèmes » dans leur couple et le fait que sa femme refusait de vivre avec lui et qu’elle avait demandé le divorce. En 2015, Niloufar Ardalan, la capitaine de l’équipe nationale féminine de futsal (football en salle), a été, elle aussi, empêchée par son mari de se rendre en Malaisie pour le championnat d’Asie de futsal.

Ces incidents, largement médiatisés, ont donné lieu, à l’époque comme aujourd’hui, à des campagnes de recueil de signatures en Iran pour exiger du Parlement qu’il amende la législation dite « du passeport ». Aucune de ces campagnes n’a abouti face à l’intransigeance des autorités iraniennes concernant la législation sur les droits des femmes. « Aux côtés de mes compatriotes, je demande la modification de cette loi », a écrit sur Instagram Samira Zargari. Mais l’espoir que les lignes bougent est encore plus mince aujourd’hui, le Parlement étant dominé par les conservateurs.

De plus, au cours des derniers mois, un grand nombre de militants des droits des femmes ont été arrêtés et condamnés à des peines d’emprisonnement. Début février, la sociologue Najmeh Vahedi et l’avocate Hoda Amid ont été condamnées, respectivement à sept et huit ans de prison. Elles organisaient des ateliers dans les villes iraniennes pour informer les femmes de la possibilité qu’il leur est offerte d’obtenir, dans le cadre de la rédaction du contrat de mariage, certains droits comme le divorce (légalement réservé aux hommes) ou le droit de travailler et de voyager librement. Les charges retenues contre ces deux militantes ont été « collaboration avec l’Etat ennemi américain sur les questions liées aux femmes et à la famille ».

 

 

Ghazal Golshiri

 

 

 

Source : Le Monde

 

 

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