« Sans les vidéos, il se serait passé quoi pour Michel ? » : des sportifs français prennent position après l’accumulation de violences policières

Ces prises de position sont d’autant plus fortes qu’elles sont rares en France, où les sportifs engagés sont minoritaires.

Les sportifs français, longtemps timides dès qu’il s’agissait de débat public, ont décidé de sortir de leur relatif silence. La vidéo du passage à tabac d’un homme noir par des policiers à Paris a suscité l’indignation de plusieurs grands noms, comme les footballeurs Antoine Griezmann et Kylian Mbappé, ainsi que le basketteur Rudy Gobert.

 

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« J’ai mal à ma France », a écrit Griezmann, jeudi 26 novembre, un tweet accompagné de la vidéo du média Loopsider montrant un producteur appelé « Michel » roué de coups par des fonctionnaires de police dans l’entrée d’un studio de musique du 17e arrondissement de la capitale. L’attaquant-star des Bleus mentionne le compte du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, lequel a annoncé la suspension de quatre agents après le tollé suscité par la vidéo.

 

 

Kylian Mbappé, son coéquipier sous le maillot des Bleus, lui a emboîté le pas et a dénoncé « une vidéo insoutenable » et « des violences inadmissibles », en légende d’une photo du visage ensanglanté du producteur. Le champion du monde 2018 a ajouté les paroles d’une chanson de Diam’s intitulé Ma France à moi et a conclu son message en écrivant : « STOP AU RACISME. »

 

Ces prises de position interviennent alors que la France est plongée dans un débat houleux sur les violences policières et la proposition controversée de loi « sécurité globale », qui prévoit entre autres de pénaliser la diffusion « malveillante » d’images de policiers et est vivement combattue par des ONG et syndicats de journalistes.

« Sans les vidéos, il se serait passé quoi pour Michel ? On aurait préféré croire la version des policiers sous serment ? #commedhab », écrit le champion du monde Benjamin Mendy sur Twitter, accompagné d’une photo du slogan « Qui nous protège de la police ? » collé sur un mur.

« Contre cette frange de policiers qui outrepasse grandement ses droits en tabassant, en tuant même parfois. Nos caméras sont nos meilleures armes ! », abonde l’international Espoirs Jules Koundé, toujours sur Twitter.

« Continuez à tout filmer ! Ceux qui font bien leur boulot auront une bonne image. Et les lâches et menteurs continueront d’être exposés. Que ça soit d’un sens ou d’un autre », a, de son côté, tweeté Rudy Gobert, le pivot vedette d’Utah.

Une minorité de sportifs engagés

 

La France est régulièrement secouée et divisée par des affaires de violences commises par les forces de l’ordre, parfois mortelles, comme dans les cas de Cédric Chouviat, livreur mort étouffé après son interpellation en janvier 2020, ou d’Adama Traoré, mort en 2016 dans des circonstances controversées après son interpellation par des gendarmes et érigé en symbole des violences policières.

D’autres sportifs comme l’international français Samuel Umtiti et le basketteur NBA Evan Fournier se sont également impliqués dans ces débats. Leurs prises de position sont d’autant plus fortes qu’elles sont rares en France, où les sportifs engagés comme Dominique Rocheteau, Lilian Thuram ou Vikash Dhorasoo ont toujours été très minoritaires.

 

Exemple américain

 

Ce mouvement semble suivre la tendance aux Etats-Unis, où se positionner sur les sujets de société n’est plus tabou pour les sportifs. Le joueur de football américain Colin Kaepernick, première star du sport à dénoncer le racisme et les violences policières aux Etats-Unis, avait ouvert la voie en 2016, au prix de sa carrière sportive. Tout comme la très militante footballeuse Megan Rapinoe, dont la victoire à la Coupe du monde 2019 a servi de porte-voix à son combat pour l’égalité salariale et contre Donald Trump.

En 2020, la mort de George Floyd, père de famille noir tué lors d’un contrôle de police à Minneapolis, a fait sortir de leur silence de nombreux sportifs des ligues majeures nord-américaines.

En basket, les joueurs de NBA, la superstar LeBron James en tête et les joueuses du Championnat WNBA se sont largement mobilisés pour le mouvement Black Lives Matter (« La vie des Noirs compte »). Rapidement rejoints par d’autres athlètes et franchises de baseball, football ou hockey sur glace.

Le genou à terre, geste symbole de cet engagement, a ensuite fait le tour du monde, y compris chez des footballeurs français, comme l’attaquant de Mönchengladbach Marcus Thuram, fils de Lilian.

Et, fin octobre, plusieurs figures du foot français s’étaient immiscées dans le très sensible débat autour des caricatures de Mahomet, le prophète de l’islam, après l’assassinat du professeur Samuel Paty pour avoir montré ces dessins en classe. Presnel Kimpembe, Karim Benzema ou Mamadou Sakho avaient « liké » un message sur Instagram du sulfureux lutteur russe Khabib Nurmagomedov dénonçant ces caricatures.

Kimpembe avait ensuite rétropédalé, retirant son « like » et affirmant sur Twitter : « Je fais du sport, pas de la politique. Je ne parle pas russe non plus. Je condamne fermement le terrorisme, toutes formes de violence sans aucune réserve, et toutes les tentatives de manipulation nauséabondes. »

 

Le Monde avec AFP

Source : Le Monde

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