En Autriche, le scandale de l’extrême droite fait couler le gouvernement

Le chancelier autrichien Sebastian Kurz a annoncé samedi soir des législatives anticipées. Le parti conservateur rompt ses liens avec l’extrême droite du FPÖ, prise la main dans le sac dans des manœuvres de corruption liées à la Russie.

 

Considérée par les tenants d’une droite dure comme un modèle à suivre au sein de l’Union européenne, la coalition droite-extrême droite au pouvoir en Autriche a explosé samedi à quelques jours des européennes après la diffusion d’une vidéo mettant en cause le vice-chancelier Heinz-Christian Strache en lien avec la Russie.

Ce samedi soir, le chancelier conservateur Sebastian Kurz a annoncé la convocation d’élections législatives anticipées après 18 mois de coalition avec le Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ) dirigé par Heinz-Christian Strache, au terme de vingt-quatre heures d’un psychodrame inattendu.

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Des marchés publics courtisés par des Russes

 

Le séisme a été provoqué par la publication vendredi soir par les médias allemands Süddeutsche Zeitung et Der Spiegel d’une vidéo tournée en caméra cachée en 2017 où le patron du FPÖ, un allié de l’Italien Matteo Salvini et de la Française Marine Le Pen, se montrait prêt à offrir à un oligarque russe des marchés publics autrichiens en échange d’un soutien financier.

Tout en dénonçant un procédé «perfide» et en se défendant d’avoir commis la moindre infraction, Heinz-Christian Strache, a présenté ce samedi sa démission à la mi-journée, reconnaissant une «erreur». Il a proposé l’ancien finaliste FPÖ à la présidentielle Norbert Hofer pour lui succéder.

Mais Sebastian Kurz a jugé que la poursuite de la coalition n’était plus envisageable, malgré la forte adhésion dont la majorité bâtie sur une ligne anti-immigration continuait jusqu’alors à jouir dans un contexte de chômage au plus bas.

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«Assez», lance le chancelier

 

«Assez est assez», a estimé le chancelier, déplorant un scandale qui «porte atteinte à la politique du changement (…) et à l’image» de l’Autriche. «Je n’ai pas le sentiment que le FPÖ soit prêt à changer fondamentalement, ce qui serait pourtant plus que nécessaire», a-t-il relevé, soulignant la multiplication des scandales impliquant ce parti.

Cette annonce a été saluée dans la liesse par quelques milliers de manifestants rassemblés devant la chancellerie pour dénoncer une «honte pour le pays» et réclamer un nouveau scrutin.


Ce que dit la vidéo

 

Dans la vidéo, tournée dans une villa d’Ibiza au cours d’une soirée arrosée, Heinz-Christian Strache, croyant avoir affaire la nièce d’un oligarque russe, se montre enthousiasmé par l’idée d’un investissement russe dans le plus puissant journal autrichien, Kronen Zeitung, afin d’en faire un média pro-FPÖ

Heinz-Christian Strache explique à son interlocutrice qu’il pourra en échange de ce soutien lui obtenir des marchés publics. «Elle aura tous les contrats publics remportés aujourd’hui par Strabag», un groupe autrichien de construction, acteur majeur du secteur, affirme le chef du FPÖ, selon la retranscription de ses propos.

Le FPÖ avait signé avant son arrivée au pouvoir un accord de coopération avec Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine, qui lui vaut des accusations récurrentes de liens troubles avec Moscou.

Dans la vidéo, Heinz-Christian Strache exclut des résistances au sein de la rédaction du Kronen Zeitung: «Les journalistes sont les plus grandes prostituées de la planète», affirme-t-il.

Le modèle Orban

 

Depuis son retour au pouvoir en 2017, le FPÖ est accusé de s’en prendre aux médias, notamment à la télévision publique ORF. L’homme fort du FPÖ explique également vouloir «construire un paysage médiatique similaire à celui d’Orban», en Hongrie. Dans ce pays, le premier ministre Viktor Orban est critiqué pour avoir massivement porté atteinte au pluralisme de la presse.

Comment financer l’extrême droite

 

Selon les extraits publiés, Heinz-Christian Strache décrit également un mécanisme de financement occulte de campagne permettant de tromper la Cour des comptes. Il cite des dons allant de 500 000 à 2 millions d’euros et égrène le nom de grands patrons autrichiens qui financeraient le FPÖ.


La défense de l’accusé

 

L’ex-patron du FPÖ s’est dit victime «d’un attentat politique ciblé» et a promis une riposte judiciaire à cette vidéo, dont l’origine demeure inconnue.

Heinz-Christian Strache avait succédé en 2005 à Jörg Haider à la tête du FPÖ dont il s’est efforcé de lisser l’image, en cultivant un profil d’élu fréquentable après avoir frayé avec les cercles néonazis dans sa jeunesse.

AFP

Source : Le Temps.ch (Suisse)

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