Tariq Ramadan : pour une justice impartiale et égalitaire

Depuis le 2 février 2018, Tariq Ramadan est détenu dans le quartier haute sécurité de la prison de Fleury-Mérogis (Essonne) et placé à l’isolement. Le 15 février, son état de santé s’étant considérablement dégradé en raison d’un manque de traitement médical – il est atteint d’une sclérose en plaques associée à une deuxième maladie non identifiée -, Tariq Ramadan s’est rendu en ambulance au palais de justice pour savoir si la cour d’appel le maintenait ou non en détention.

 

Pour appuyer sa demande de remise en liberté, les avocats Yassine Bouzrou et Julie Granier ont remis au juge une lettre officielle du médecin de la prison stipulant que l’état de santé de Tariq Ramadan n’était pas compatible avec sa détention. Les avocats ont également proposé plusieurs garanties prévenant complètement le risque de fuite de leur client qui motive sa détention : remise de son passeport suisse (il n’en possède aucun autre), pointage quotidien au commissariat, interdiction de quitter le territoire, versement d’une caution de 50 000 euros.

 

En dépit de tous ces éléments, le tribunal a choisi de différer sa décision et réclamé un examen médical, renvoyant Tariq Ramadan en cellule quand des dispositifs moins risqués pour son état de santé étaient envisageables : le port d’un bracelet électronique ou l’assignation à résidence.

 

Une telle sévérité de traitement, notamment au regard d’irrégularité manifeste de la procédure judiciaire (perte d’un élément majeur fourni par la défense), rend légitimes les inquiétudes et les questionnements sur le caractère « particulier » que revêt désormais cette affaire.

 

 

Condamné avant même le démarrage de l’enquête judiciaire dans de nombreux médias et par des personnalités en guerre contre ses engagements religieux et politiques, Tariq Ramadan voit son droit à la présomption d’innocence massivement bafoué depuis cet automne. En outre il est aujourd’hui placé à l’isolement, sans aucune visite de ses plus proches ni coup de téléphone, quand d’autres personnes, cibles d’accusations semblables, présumées ou reconnues, ne sont pas mises en prison.

 

Face à cette sévérité et à cette inégalité de traitement, quel sentiment distille-t-on dans l’esprit des Français si ce n’est celui, déjà ancré, d’une justice à géométrie variable ? Quelle cause en faveur des femmes espère-t-on défendre en se montrant tout à fait intraitable à l’égard de certains et (peut-être) complaisant à l’égard d’autres ?

 

Les récentes campagnes sur les réseaux sociaux montrent à quel point les violences sexuelles faites aux femmes sont un phénomène majeur et grave, touchant l’ensemble de notre société. Et nous défendons avec force l’idée que le viol est un crime qui doit être sévèrement puni. C’est aussi pourquoi nous devons prendre garde à ce que ce mouvement en faveur des femmes, qui emporte aujourd’hui une adhésion beaucoup plus large, ne soit pas instrumentalisé à des fins politiques sans rapport avec la cause des femmes.

 

 

Ainsi, sans présager de l’innocence ou de la culpabilité de Tariq Ramadan, et dans le respect complet de la parole des plaignantes, nous défendons le droit de Tariq Ramadan à une procédure judiciaire régulière, ainsi qu’à sa libération immédiate au regard de son état de santé alarmant. Le respect des droits fondamentaux d’une personne, indépendamment de ses origines, de sa religion et de ses opinions politiques, est le socle sur lequel notre démocratie a bâti ses principes égalitaires.

 

Il est de notre devoir aujourd’hui de nous inquiéter d’un traitement judiciaire d’exception à l’endroit de Tariq Ramadan et de sonner l’alarme contre les motivations politiques qui pourraient contrevenir au bon fonctionnement de la procédure judiciaire et empêcher la vérité, quelle qu’elle soit. Il en va de notre intérêt à toutes et tous.

 

 

Joan W. Scott, professeure émérite, Institute for Advanced Study, Université de Princeton
Sonia Dayan Herzbrun, sociologue et philosophe
Christine Delphy, sociologue, militante féministe
Michelle Guerci, journaliste, féministe antiraciste
Alain Gresh, journaliste
Judith Bernard, enseignante, metteure en scène, journaliste.
Michèle Sibony, militante antiraciste
Stéphanie Chevrier, directrice des éditions Don Quichotte
François Burgat, politologue
Geneviève Rail, militante féministe, professeure à l’université de Concordia (Canada)
Olivier Le Cour GrandMaison, universitaire
Françoise Vergès, politologue et militante féministe antiraciste
Catherine Samary, économiste
Pr Ramon Grosfoguel, Professeur des universités à Berkeley
Felwine Sarr, écrivain, économiste
François Gèze, éditeur
Pr Stathis Kouvelakis, professeur en théorie politique à King’s College (Londres)
Pr Simon Saunders, Professeur de philosophie, université d’Oxford
Mireille Fanon Mendès-France, ex UN expert, consultante juridiqu
Marwan Muhammad, auteur & statisticien
Pr Kalypso Nicolaidis, professeur relations internationales, Université d’Oxford
Eric Hazan, éditeur
Dominique Ziegler, auteur, metteur en scène
Gustave Massiah, économiste
Nathalie Dollé, journaliste
Marie Lorraine Pradelles, psychanalyste.
Aminata Traoré, ancienne ministre de la Culture au Mali, militante altermondialiste
Pr Richard Falk, Professeur de droit international à l’Université de Princeton
Nathan Lean, Chercheur et écrivain Université d’Oxford
Pr Sho Konishi, Professeur d’Histoire moderne du Japon Université d’Oxford
Pr Ian Neary, Professeur de politique Japonaise Université d’Oxford
Jean Daniel Belfond, Directeur Presses du Châtelet et Archipel
Karen Armstrong, Auteure et chercheuse en religion comparative
Jonathan AC Brown, Pr à l’université de Georgetown
Massimo Campanini, historien en philosophie islamique (Italie)
Didier Lestrade, journaliste et écrivain
Pr John Esposito, Professeur d’affaires internationales et d’études islamiques à l’université de Georgetown, (Washington, D.C.)
Kristine Baker, Présentatrice TV, Journaliste, Auteure
Pr Walter Armbrust, Professeur d’étude modernes du Moyen Orient Université d’Oxford.
Pr Eugene Rogan, Professeur d’histoire moderne d’Europe Université d’Oxford
Pr Paul Betts, Professeur d’histoire moderne d’Europe
Nadine Rosa Rosso, enseignante et militante
Hugh Whittaker, Directeur de l’Institut Nissan d’étude japonaises Université d’Oxford
Pr Leigh A Payne, Professeur de sociologie Université d’Oxford
Ramon Sarro, Recteur de St Antony College Université d’Oxford
Pr Jan Zielonka, Professeur de politique européenne Université d’Oxford
Toby Matthiesen, Chargé de recherche sur les relations internationales du Moyen-Orient Université d’Oxford.
Pr Khaled Abou El Fadl, Professeur de Droit Université de Californie
Ismahane Chouder, militante féministe MTE
Pr Richard Friedli, Professeur émérite science comparée des religions
Malika Hamidi, auteure et sociologue
Nabil Ennasri, docteur en sciences politique
Fanny Bauer Motti, docteure en psychologie clinique
Houria Bouteldja, militante antiraciste
Blondin Cissé, philosophe et maître de conférences (Sénégal)
Farid Esack, écrivain, professeur d’ études islamiques à l’ Université de Johannesburg
Ebrahim Moosa, Professeur d’études islamiques à l’université de Notre-Dame (Indiana)
Abdourahmane Seck, anthropologue et historien
Mame Penda Ba, Professeur en science politique à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis (Sénégal)
Cheikh Boikari Fofana, président du conseil supérieur des imams en Côte d’Ivoire
Farid Hafez, chef du département d’Études religieuses à l’université de Johannesburg
Moussa Ibn Yacoub, travailleur humanitaire
Rachid Id Yassine, sociologue
Ahmet Kavas, diplomate
Doudou Jacques Faty, footballeur professionnel
Salim Kerkar, footballeur professionnel
Philippe Christanval, ancien footballeur professionnel
Demba Ba, footballeur professionnel

 

 

 

Source : Médiapart via page Facebook Tariq Ramadan

 

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