Exclusivité – Le Potentiel d’Instabilité en Mauritanie vu par le site de prospective stratégique Stratfor

Le 9 mai 2016, Stratfor consacrait un article à la sécurité des pays du Sahel avec un traitement particulier à propos du potentiel d’instabilité en Mauritanie. Dans le papier intitulé « Où aura lieu la prochaine intervention française ? », le site traite essentiellement des intérêts stratégiques de l’Hexagone dans la sous-région.

L’ex-puissance coloniale y est décrite comme susceptible de tolérer un certain degré d’instabilité pour autant qu’il ne constitue pas une menace directe pour la sécurité de la région. Les interventions, in extremis, dans plusieurs conflits récents au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Mali ou en Centrafrique semblent confirmer cet attentisme, devenu le sceau de fabrique de la politique africaine de Paris qui, faute de moyens, bannit désormais tout empressement ou précipitation.

Ces considérations énoncées, le site poursuit que tout porte à croire que l’instabilité de la Mauritanie serait au bord du seuil critique, au-delà duquel le scénario d’une intervention française serait inéluctable. Avec la détérioration de la balance commerciale, l’économie du pays subit, en effet, un net ralentissement, entraînant une baisse de la rente financière destinée aux notables tribaux dont l’adhésion politique au système, participe de la cohésion sociale. En outre, la dégradation de la situation économique s’accompagne d’une captation des ressources par les proches du chef de l’Etat et de la perspective de voir le président, au pouvoir depuis 2009, briguer un troisième mandat, en violation des dispositions de la constitution. Des facteurs inquiétants, susceptibles d’aggraver les tensions sociales et d’ouvrir la voie à un éventuel coup d’état militaire, voire à une intervention étrangère.

Par ailleurs, des groupes terroristes ont, par le passé, utilisé le pays comme point d’appui pour des attaques contre les pays voisins. Si les mouvements djihadistes devaient unifier leurs efforts pour déstabiliser le pays, ou utiliser son territoire comme lieu de recrutement et de préparation d’opérations transcontinentales, ils pourraient, sans difficulté, trouver des appuis auprès des populations défavorisées. Comme la Mauritanie n’est pas concernée pas le boulier de l’Opération Barkhane, les djihadistes y trouveraient, par conséquent, une plus grande marge de manœuvre. En abandonnant à son clan la gestion des ressources du pays, aux dépends des élites ethno-tribales traditionnelles du pays, le président mauritanien met en péril l’équilibre social et expose son pays à un retour de bâton quasi inévitable.

Obnubilée par la stabilité, Paris, pourrait dès lors considérer Mohamed Ould AbdelAziz comme une menace potentielle à la sécurité régionale et pourrait choisir entre l’une ou l’autre de ces deux options : encourager, comme à son habitude, des éléments de l’armée, à renverser le président avant que la situation ne se détériore davantage, ou laisser se faire un débordement pour mieux intervenir ensuite. 

Le deuxième cas de figure, recevrait sans aucun doute l’appui de puissances telles que les USA, la France demeurant, après tout, la seule puissance occidentale ayant l’intérêt politique, le savoir-faire et la connaissance du terrain nécessaires pour entreprendre de telles missions. Une réalité et des intérêts géopolitiques, qui font que les interventions militaires de la France continueront à s’étendre bien au-delà de la Mauritanie, pour englober tous les pays de la sous-région.                                         

PS : Stratfor est une société de renseignement et de prospective stratégique privée basée à Austin, au Texas,  fondée par le politologue et expert en sécurité internationale George Friedman, dirigée par Dave Sikora et sponsorisée principalement par Teakwood Capital. C’est en fait une sorte de « CIA » à but lucratif,  ayant des liens étendus avec les agences fédérales du gouvernement et les multinationales américaines dont les investissements à l’étranger sont importants.

Elle offre des services à ses clients sur commande et par le biais d’abonnement individuel. Elle produit des bulletins d’information quotidiens gratuits, rend parfois public des portions de ses analyses et mène des prévisions stratégiques, donc de la prospective, à ne pas confondre avec des prédictions, sans faille, basées sur des données empiriques.

 

Mohamed El Mokhtar Sidi Haiba

Universitaire et Chercheur en Sciences Sociales

 

Le lien de l'article en anglais : https://www.stratfor.com/sample/analysis/where-france-would-intervene-next-africa

 

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