Football Leaks : “Le foot, c’est le paradis de la corruption”

Spiegel Online publie un entretien avec le porte-parole du site Football Leaks, spécialisé dans la publication de documents confidentiels – et souvent embarrassants – relatifs aux transferts faramineux des joueurs de football.

C’est “l’homme dont l’identité est un mystère pour toute l’industrie du football”, proclame Spiegel Online. Le quotidien allemand publie (également dans une version en anglais) une interview du porte-parole du site Football Leaks, sorte de WikiLeaks du football.

Depuis sa création en septembre dernier, Football Leaks, basé au Portugal, publie régulièrement sur sa plateforme des contrats, fiches de salaire ou détails financiers des transferts de joueurs entre les grands clubs européens et internationaux. Parmi ses faits d’arme : la révélation des salaires des joueurs Cristiano Ronaldo et Gareth Bale.  

Ces derniers jours, les révélations de Football Leaks se sont multipliées. Le site a notamment divulgué le salaire de joueur Toni Kroos, information reprise notamment par Der Spiegel. Le 6 février, la plateforme a révélé que le Real Madrid versait 10,9 millions d’euros par an à l’international allemand pour ses émoluments en plus des 5 millions d’euros net en salaire. Le lendemain, le 7 février, le Daily Mail publiait de son côté le détail des bonus que Manchester United a versés à ses joueurs pour la saison 2009-2010.
 

Un paradis pour la corruption”

Dans l’interview – réalisée par mail – que le porte-parole a accordée au Spiegel Online, celui qui se fait appeler John détaille les motivations du groupe. Il explique que les lanceurs d’alerte de Football Leaks sont “totalement indépendants” et qu’aucun n’est rémunéré. Leur travail, proclame-t-il, s’inscrit dans une démarche citoyenne qui a pour but d’“aider l’industrie du football à devenir plus transparente”.  

 
Nous sommes nous-mêmes de gros fans de foot et notre priorité est d’aider d’autres fans à mieux comprendre ce marché du football très opaque. Clauses, contrats, honoraires des consultants – tous ces sujets sont tabous dans le football (…). Un secteur qui manque autant de transparence est en fait un paradis pour la corruption, le blanchiment d’argent et la fraude fiscale.”

Se disant très inspiré par des figures telles que Julian Assange, Edward Snowden ou encore Antoine Deltour (LuxLeaks), John assure que Football Leaks va continuer à distiller régulièrement les documents explosifs en sa possession :

  Nous avons plus de 500 giga-octets de documents et nous en recevons continuellement.”

Autrement dit, au moins plusieurs milliers de documents. Depuis sa création, la manière dont la plateforme se procure ces documents fait débat. Les détracteurs de Football Leaks lui reprochent de les avoir obtenus illégalement en hackant les données d’une agence de joueurs. John s’en défend : “Ces accusations sont ridicules. Nous avons une variété de sources qui nous fournissent des documents. Notre réseau est très stable.”

Héros ou méchants loups ?

Si Football Leaks entend bien provoquer un débat public sur la transparence dans le football, ses révélations peuvent aussi avoir des conséquences très concrètes. Ainsi la mise au jour, à l’automne dernier, des transactions douteuses entre le fonds d’investissement Doyen Sports et le club néerlandais Twente ont provoqué la démission du président du club, Aldo van der Laan, et amené la Fédération néerlandaise de Football (KNVB) à interdire au club de participer à des compétitions européennes pendant trois ans. Ces révélations ont “vraiment affecté la politique de transfert du club”, souligne le site Sport.es.

A la suite de cette affaire, le PDG de Doyen Sports, Nelio Lucas, a dénoncé le portail auprès des autorités, prétendant qu’il avait reçu des emails d’un hacker présumé de Football Leaks qui exigeait 1 million d’euros en échange de son silence et de la rétention d’autres contrats impliquant Doyen Sports. Des allégations que Football Leaks a formellement démenties mais qui ont placé le groupe dans le viseur de la justice.

“Football Leaks : des héros ou d’affreux méchants loups ?” s’interroge le site espagnol. Au sujet de l’affaire Doyen Sports, les autorités judiciaires portugaises ont qualifié Football Leaks d’“organisation criminelle internationale” comprenant “des gens ayant déjà été identifiés par la police”. Ce qui est sûr, c’est que le cercle des ennemis de Football Leaks ne cesse de s’agrandir, notamment dans les rangs des responsables d’agences de joueurs. “Nos révélations les gênent. Nous sommes persuadés qu’ils font pression sur les autorités judiciaires pour étouffer les affaires”, assure John dans Spiegel Online. Quoi qu’il en soit, “Football Leaks a profondément bousculé le business du foot en faisant la lumière sur les opérations et commissions irrégulières. Ces informations mettent en cause des pratiques courantes dans le monde du foot et révèlent la part occulte du milieu”, conclut Sport.es.

 

Lucie Geffroy
 
 

 

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