Des solutions futuristes pour le pélerinage à La Mecque en 2080

La Mecque, « mère des cités » en islam, a connu un septembre noir : deux catastrophes meurtrières coup sur coup.

L’une, le 11 septembre, due à l’effondrement d’une grue sur la grande mosquée s’est soldée par la mort de 109 personnes et plus de 400 blessés ; la suivante, survenue le 24 septembre à la suite d’une bousculade durant le hadj (grand pèlerinage), a fait au moins 769 morts et 934 blessés.

Lire aussi : La Mecque : les raisons d’une bousculade meurtrière

Occasion pour l’Iran chiite de dénoncer, par la voix du guide suprême Ali Khamenei, la mauvaise gestion des lieux saints et d’exiger de l’Arabie saoudite sunnite qu’elle présente ses excuses ; d’autres s’interrogent sur le choix fait par la dynastie saoudienne régnante d’un modernisme et d’un gigantisme débridés. Sur la Toile en arabe, chacun y va de sa compassion, de ses condoléances, de ses réserves voire de ses critiques, sur le mode « jusqu’où ira-t-on ? »

Lire aussi : Milliers de policiers, millions de pèlerins, milliards de bénéfices : le pèlerinage de La Mecque en chiffres

Dans un billet, daté du 25 septembre 2015, un chroniqueur du journal saoudien de langue arabe Al-Ryadh, Issam Amane Allah Boukhari, prolonge cette question en se demandant : « Comment sera le hadj en l’an 1500 de l’hégire ? », soit en 2080. Tout en restant neutre et sans esprit de dérision affiché – peut-il en être autrement dans un royaume où l’esprit critique et la gaudriole ne sont pas de mise ? – l’auteur, ingénieur de formation, offre une vision prospective de ce que pourrait être le pèlerinage à La Mecque dans 65 ans (« avec la permission d’Allah »), compte tenu des progrès technologiques prévisibles. En matière de science-fiction, ses anticipations, qui n’ont rien à envier à celles d’un Jules Verne, lui valent félicitations et bénédictions de la part des internautes.

Lire aussi : Pathologies de nos « amis » saoudiens

Il expose très sérieusement quatre solutions susceptibles d’épargner du temps, de l’argent, des encombrements et de tragiques bousculades.

1. Voyager par Hyperloop

Première solution : un Hyperloop qui circulerait jusqu’à 1 200 km/h et dépasserait de loin l’actuel projet de train à grande vitesse entre l’aéroport international de Djeddah et La Mecque. Ainsi les pèlerins, qui aujourd’hui débarquent en masse dans cet aéroport, pourraient arriver par d’autres villes et être transportés jusqu’à la Ville sainte en un temps record. Hyperloop, conçu par Elon Musk, PDG de SpaceX et Tesla Motors en Californie, est un long tube surélevé, à l’intérieur duquel des « capsules » contenant chacune une vingtaine de passagers glissent sur des coussins d’air comprimé, propulsées par un générateur à l’énergie solaire. Un trajet test est à l’étude entre San Francisco et Los Angeles. Il est loin le temps où l’illustre voyageur marocain du XIVe siècle, Ibn Battouta, mit près de 18 mois pour parcourir à cheval les 4 800 km entre sa ville de Tanger et La Mecque.

Lire aussi : Elon Musk, le capitaine d’industrie qui veut mourir sur Mars

2. Des lentilles de contact connectées et intelligentes

Deuxième solution : des lentilles de contact intelligentes permettant aux pèlerins de voir et d’entendre l’imam faire son prêche sur le mont Arafat (lieu où le prophète Mahomet aurait fait son sermon d’adieu aux musulmans) tout en bénéficiant de la traduction simultanée pour les non-arabophones. De plus, ces astucieuses petites lentilles fourniraient aux services de secours des informations précieuses sur l’identité du pèlerin malade, son groupe sanguin et même ses antécédents médicaux. Une invention inspirée des idées de Michio Kaku, physicien et futurologue américain d’origine japonaise, professeur au City College de New York.

3. Des voitures volantes sans pilote

Troisième solution : des voitures volantes sans pilote, permettant d’effectuer les sept tours rituels autour de la Kaaba (bâtiment cubique recouvert de soie noire et abritant la fameuse pierre noire). Selon l’auteur, la firme Toyota aurait, en 2014, financé un programme de recherche sur ce type de véhicule au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et à l’Université de Stanford aux Etats-Unis.

4. Des « pierres intelligentes » pour lapider Satan

Quatrième solution : des « pierres intelligentes » connectées au cerveau du pèlerin qui s’en servirait à la façon de « mini-drones » lors de la cérémonie de la lapidation de Satan (une des étapes du hadj). Cette innovation serait plus particulièrement destinée aux invalides et aux paralytiques. Le lecteur curieux d’en savoir plus est invité à se renseigner sur le projet « Automating a Brain-Machine Interface System ».

Lire aussi : La Mecque : entre la cité de Dieu et la cité des hommes

« Certains vont se moquer de ce que j’évoque ici, reconnaît Issam Amane Allah Boukhari. Mais, observe-t-il, si nous avions interrogé les musulmans des premiers siècles de l’islam sur ce que serait le hadj en 2015, personne n’aurait pu imaginer que les pèlerins d’aujourd’hui voyagent en avion et en voiture, que nous utiliserions des haut-parleurs, des éclairages, de la climatisation… ». Après tout, ajoute-t-il, nous voyons déjà des fidèles suivre les prières nocturnes de Ramadan sur leur iPad et d’autres, lors du petit pèlerinage (Oumra), effectuer les sept tours autour de la Kaaba en scooter intelligent.

 

Ruth Grosrichard
est professeure agrégée de langue arabe et de civilisation arabo-islamique à Sciences-Po Paris et contributrice au Monde Afrique
 

Source : Le Monde Afrique

 

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com

 

 

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page