Jugement en Appel des détenus d’IRA et de Kawtal : Procès-rectificatif ou escalade punitive

La justice mauritanienne a décidé de rejuger le président d’IRA et ses co-détenus à Aleg, en dehors de la circonscription qui les avait condamnés en première instance. Une démarche que les partisans des défenseurs des droits de l’homme jugent contraire aux procédures.

 

Pendant ce temps, certains se demandent si le procès annoncé ne sera qu’un prétexte pour libérer les détenus ou l’occasion d’un durcissement de ton à l’endroit des parties nationales et internationales qui ne cessent de réclamer leur élargissement.

Selon les informations relayées par plusieurs sources de presse, Birame Dah Abeid, président du mouvement IRA, son vice-président Brahim Ould Bilal ainsi que DJiby Sow, président de Kawtal, pourront bien être rejugés en appel à Aleg. Aucune date précise n’a été mentionnée mais son imminence semble être confirmée. Ce procès qui se déroule en dehors de la circonscription juridique normale des détenus est aujourd’hui vivement contesté par les partisans des détenus, mais aussi par leurs avocats.

Ces derniers avaient en effet et à plusieurs occasions, dénoncé leur transfert à Aleg, après leur condamnation à deux ans de prison par le tribunal régional de Rosso. Un transfert jugé d’autant plus illégal qu’il soustrayait les détenus à leur juge naturel. Pour beaucoup, le déplacement du procès à Aleg, viserait à l’éloigner du fief traditionnel du mouvement IRA. Une raison que d’aucuns considèrent cependant d’infondé, car selon eux, Aleg est à seulement 250 kilomètres de Nouakchott et que rien ne pourrait empêcher l’arrivée en masse des militants. Ils en veulent pour preuve le procès de Rosso qui avait attiré les sympathisants d’IRA de toutes les régions du pays, même les plus reculées.

Mais la précipitation à organiser le procès en Appel des dirigeants d’IRA et de Kawtal, au moment où d’autres dossiers en appel attendent depuis des années, augurerait, selon plusieurs observateurs, d’une volonté politique à se débarrasser d’un dossier devenu encombrant. La stature de Birame Dah Abeid, l’un des défenseurs des droits de l’homme le plus en vue en Mauritanie, grâce à son prestigieux Prix des Nations Unies 2013 des droits de l’Homme, en fait une icône de la lutte contre l’esclavage dans le pays. Ainsi, les autorités mauritaniennes pourront adopter toutes les dispositions juridiques qu’elles veulent, entreprendre toute démarche visant à l’éradicatoon de l’esclavage, mais tant que Birame et ses compagnons resteront en prison, ces actions n’auront aucun poids aux yeux de la communauté internationale.

Ainsi, après avoir adopté une nouvelle Loi criminalisant l’esclavage et commandé une Fatwa auprès des Ulémas, la démarche centrale que l’Etat mauritanien devrait entreprendre pour prouver sa réelle volonté de combattre le fléau de l’esclavage est de libérer ses défenseurs. C’est l’analyse faite par beaucoup d’observateurs qui voient dans ce procès en Appel à Aleg, une accélération du processus de leur élargissement. Une exigence que les partenaires de la Mauritanie ont renouvelé à maints occasions, aussi bien au niveau du Parlement européen, des plus hautes instances des Nations Unies chargées des droits de l’Homme, que de l’Ambassade des Etats-Unis à Nouakchott qui a demandé il y a quelques jours que le jugement en appel des détenus se fassent rapidement.

Cette thèse l’emporte ainsi largement sur celle qui table sur un durcissement de ton de la part du pouvoir en vers les détenus d’Aleg. Celle-ci croit que l’Appel à venir risque de confirmer le verdict rendu en premier lieu et condamnant Birame et ses compagnons à deux ans de prison. Une telle thèse pourrait manquer de consistance, selon les avocats-conseils qui tablent plutôt vers une réparation qui débouchera sur la relaxe pure et simple.

Selon ce point de vue, le procès d’Aleg viendra rectifier le jugement de Rosso qui a été vidé de tout son sens, car basé sur un dossier vide. Certains parleront même de parodie de justice, d’où l’unanimité nationale qui s’est manifestée aussi bien au sein de la classe politique que de la société civile pour demander la libération de Birame et de ses amis.

Cheikh Aïdara

 

Source : L'Authentic.info

 

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