ça vous concerne aussi : à ma place qui croire ? Pr Mohamed El Hassen ou Pr Sidi Cheikh ?

Il ne s’agit pas aujourd’hui de faire le procès de quiconque mais juste de montrer encore une fois la gravité de la situation en matière de santé en Mauritanie venant non pas de simples docteurs mais de professeurs, c’est-à-dire de médecins réputés, autorisés à enseigner.

 

Le problème est simple : normalement chez nous quand vous avez un problème de santé quelconque, vous ne pouvez pas vous permettre d’aller à l’aveuglette dans une clinique vu la réputation de nos mouroirs, aussi, chacun demande à son entourage immédiat, famille, amis, collègues afin de connaître le meilleur médecin de telle spécialité, en l’occurrence l’ophtalmologie.

Il arrive souvent que le tribalisme et le régionalisme faisant, chacun se trouve envoyé vers « les siens » en la matière, ce qui ne serait pas dramatique s’il y avait autant de savants par tribu ou par région. Hélas, nous n’en sommes pas encore là. Toujours est-il qu’après s’être renseigné, c’est-à-dire après avoir fait confiance aux vôtres, chacun va tranquillement chez le fameux médecin qui vous ausculte et vous délivre un traitement que vous suivez comme tous les vôtres sans trop vous poser de question et si cela ne marche pas, cela signifie que personne d’autre de toute façon n’aurait pu faire mieux.

Il vous resterait alors la possibilité d’aller ailleurs en fonction de vos moyens et de l’urgence : l’Europe, la Tunisie, le Maroc ou le Sénégal et si vous arrivez trop tard, c’est que Dieu l’a voulu ainsi.

C’est ainsi que souffrant d’un mal soudain aux yeux m’empêchant de rester devant un écran quelconque plus d’une heure, le tout accompagné un petit fou d’un oeil, j’ai fait jouer aussi l’entourage comme tout le monde. Un nom est revenu très souvent : Pr Mohamed El Hassen. Mais n’ayant pas le bras long pour le harceler chez lui et obtenir un rendez-vous dans les meilleurs délais, je suis allé à son cabinet. Là, j’ai compris que j’étais chez une célébrité machallah car il faut attendre 9 jours avant de trouver un RV. Il faut dire aussi que son cabinet est au milieu des opticiens des plus célèbres dans les beaux quartiers.

J’ai pris le RV et mon mal en patience. 3 jours plus tard, très inquiet comme tout hypocondriaque grand lecteur de la médecine de comptoir sur internet, j’ai voulu voir un autre médecin en attendant le rendez-vous histoire de savoir s’il ne s’agissait pas d’une urgence. Nous étions jeudi dernier, après-midi, trop tard pour trouver un autre professeur sur-le-champ. C’est là qu’un monsieur qui a déjeuné avec moi me dit que la dernière chance c’est d’aller le lendemain matin à l’hôpital national car ce serait ouvert vu que c’était le premier vendredi de la nouvelle semaine.

Le monsieur ajouta qu’on trouvait là-bas, quelqu’un de très fort, un professeur qui est le chef du service d’ophtalmologie.

A 9H22, j’y suis. Je prends in ticket à 500un et j’attends. Arrive le docteur, visiblement très pressé, il lance à son assistant « je ne vais rester que jusqu’à 11h, je dois voyager, fais venir vite les patients ». Déjà on peut le féliciter d’être venu un vendredi matin pour deux heures avant un voyage. D’autres ne l’auraient pas fait surtout que le week-end commence à midi.

Bonjour, il me dit de m’installer. Je lui explique ce que je ressens. Il écoute comme un professeur qui a déjà tout entendu et m’intime de m’installer. D’abord ce que les lecteurs, qui ne sont pas mauritaniens, doivent savoir, c’est que ne vont à l’hôpital national que les gens les plus misérables car les autres vont dans les cliniques privées où travaillent tous ces professeurs sauf qu’à l’hôpital c’est 500un et à la clinique 6000un.

Aussi je pense que ce jour-là, le médecin avait aussi besoin de lunettes que moi car avant que je ne me présente, il m’a réservé le traitement qu’il délivre aux misérables illettrés qui arrivent ignorants tout chez le médecin pour boire ses paroles et obéir au doigt et à l’œil même sans prévenir.

C’est ainsi que tout d’un coup sans crier gare il m’a retourné les paupières comme j’aurais fait pour arracher une écorce d’orange sèche avec ses mains avec lesquelles il revenait du bloc, il touche les poignets, serre les mains de tout le monde. Sa façon de parler, le ton, la nervosité, m’ont donné envie de partir mais je suis resté pour en savoir un peu plus à propos du service. De toute façon, les manières n’ont rien à voir avec le talent. Beaucoup de génies sont nerveux et pressés. Voyant que je clignais trop des yeux face à l’appareil censé me prendre la tension des yeux, il m’envoya chez son assistant pour qu’il me fasse le test de la vision de loin et de près.

C’est là que l’aventure commence…

L’assistant, fort sympathique avec sa petite barbiche, me fit les tests qui consistaient à lire de loin le W sous plusieurs tailles et mis dans divers sens, le tout avec sur le nez les fameuses lunettes qui ne permettent de voir que d’un œil. Le test terminé, l’assistant me dit avec un merveilleux sourire et en hassanya «  rahili moulane anac astigmate », c’est-à-dire « grâce à Dieu, selon moi, tu m’as tout l’air d’être astigmate ». A cela il ajouta que j’avais 10/10 à l’œil gauche mais 8/10 à l’œil droit.

Sur ce, nous sommes retournés chez le professeur. Là, le voyant toujours nerveux, je lui ai dit que je suis journaliste de la presse électronique et que s’il était pressé pour son voyage, on pouvait se revoir plus tard. Je lui ai dit mon nom, il m’a demandé si cela avait à voir avec les Soueid Ahmed du Tagant, ce à quoi j’ai répondu : pas du tout ; il m’a demandé si j’en étais sûr, je lui ai dit que je ne suis pas versé dans ces choses mais que si cela pouvait l’éclairer j’ai dit de qui j’étais le fils.

Ah… Tu es de Boutilimit donc.. J’ai répondu : pas du tout ou plus vraiment, je suis de Nouakchott car il faut bien que quelqu’un commence à être de cette ville d’où apparemment personne ne vient. Pour aplatir mes effets en installant les siens, il me dit qu’à Paris on descend bien de la province… Comparer Nouakchott sortie des sables hier et Paris, pourquoi pas ? Tout ça pour dire, qu’il est devenu plus cool.

Il m’a demandé de retourner voir son assistant pour me réfracter ! Ce à quoi l’assistant m’a répondu : « cheunhou ? h'ani guissouh caneu na’arvou leli hamou », « retournons le voir pour s’avoir  ce qu’il veut exactement ». Ce n’est que là que le professeur s’est levé et nous voilà tous devant une pièce vitrée derrière laquelle hiberne l’appareil pour me réfracter comme dit le professeur. Mais impossible d’ouvrir sans l’homme des clés, le planton qui semble tenir le trousseau de tout l’hôpital.
 

L’aventure continue…

 

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Vlane A.O.S.A.

 

Source : Chez Vlane (Le 10 octobre 2014)

 

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