Mohamed Ould Abdel Aziz à Atar : Du cirque, mais pas de pains

(Crédit photo : Noor Info)

Le meeting télévisé de Mohamed Ould Abdel Aziz ce dimanche 5 aout à Atar, a été l’occasion de constater et résumer le projet du président : renouer avec un culte de la personnalité, qui veut faire du chef celui qui sait tout, et surtout, qui nie tout ce qui ne lui est pas favorable.

Comme l’an passé au palais des Congrès de Nouakchott, on a assisté à un one-man-show organisé dans un cadre qui s’apparente plus à celui d’un meeting qu’à une rencontre entre le président de la République, le peuple et la presse indépendante.

Toute la république administrative était à Atar, délaissant durant quelques jours (le temps des préparatifs), les affaires courantes du pays. Une élite repue, qu’on a vu souriante et aux basques d’un président auto-satisfait, qui voit la Mauritanie comme un pays où il n’y a aucun problème.

Comme le résume Ould Kaïge sur son blog, Mohamed Ould Abdel Aziz nie même l’évidence. La sécheresse ? elle n’existe pas à ses yeux, alors que les ONG internationales dans leur ensemble et qui sont sur le terrain eux, crient à l’urgence depuis deux ans pour la région du Sahel dont la Mauritanie fait partie (…) , et qui compte entre 600 et 700.000 personnes en crise alimentaire.

Sur la crise politique ? Tout va bien ; et ajoute-t-il, à raison, que ce n’est «certainement pas des mots sur un tissu et une manifestation », qui allaient le faire «dégager».

Sur ses réalisations : 70% de ses projets de mandat ont été réalisés (sic), et comme par hasard l’entièreté de ses projets tient aux routes, dans son illustration de cette assertion. D’autant, rajoute-t-il, qu’il aurait fait plus que tous les pouvoirs réunis depuis l’indépendance mauritanienne, à son arrivée.

Là où l’aplomb se révèle une leçon de vie, répondant de façon presque menaçante à un journaliste évoquant les répressions violentes des manifestations, qui se sont soldées par des morts ces derniers mois, le président répond qu’il n’y a pas de répression, que «c’est un mensonge de l’opposition» (les familles des syndicats, de Lamine Mangane et de tant d’autres torturés en prison seront satisfaites d’apprendre qu’elles rêvent leurs drames).

Un déni de la réalité qu’Ould Kaïge montre bien, sur le plan sécuritaire : «Notre territoire est sécurisé; les terroristes ne peuvent plus venir chez nous. Les touristes peuvent venir eux» lançait-il, devant une présence massive de militaires surarmés, en uniformes et en tenue civile, lui-même le torse sur-gonflé par le gilet pare-balles qu’il portait.

Parfois le mensonge remplace le déni, explique Ould Kaïge, notamment quand il évoque l’adduction d’eau de Maghta Lahjar.

«Un pays étranger (l’Espagne-ndlr-) devait financer le projet. Nous avons attendu jusqu’à 2011, en vain» dira-t-il à propos de ce projet.

Or, «les travaux exécutés par le génie militaire ont commencé en 2010, et le gouvernement espagnol a mobilisé les financements et informé le Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, alors en résidence surveillée, mais Aziz qui ne voulait pas que l’homme qu’il venait d’écarter compte cette grande réalisation à son actif a demandé, par sa MAEC alors, de transférer l’argent sur un autre projet, ce que Madrid n’a pas voulu» révèle Ould Kaïge sur son blog.

Un autre mensonge : Il a précisé, sur un autre plan que les transactions de gré à gré n’existent plus. Il n’y a nullement d’exclusion de citoyens dans l’attribution de marchés, a-t-il affirmé, ajoutant qu’il n’a jamais cédé les moyens de l’Etat ni aux notables ni à des proches.

Or, encore là, Les rapports officiels de la Commission Centrale des Marchés démentaient Aziz (…)


Monsieur-je-sais-tout

« Je reçois quotidiennement des rapports sur toutes les personnes entrant et sortant du pays, a avancé Aziz durant son show, évoquant un peu plus loin lui-même que 1200 étrangers entraient en moyenne chaque jour, et que 900 en sortaient, sans compter les déplacements mauritaniens, on peut évaluer que notre président, féru de lecture de rapports, et acharné travailleur, lit au minimum les faits et déplacements de 3000 personnes par jour !

La mise en scène se veut tellement lourde, qu’on note à peine ce genre d’incongruités… Mais en ces temps d’insécurité sahélienne, l’idée est de vouloir rassurer à tout prix les mauritaniens.

Comme en son temps Maouiya qui soutenait à un moment mordicus que le retard dans le développement de la Mauritanie était dû à une mauvais connexion internet, et à un déficit de livres (sic), Mohamed Ould Abdel Aziz pointe exclusivement du doigt l’inadéquation de la formation avec le marché de l’emploi pour expliquer le chômage mauritanien.

Si c’est en partie juste, tous les spécialistes de la question en Mauritanie, vous diront tout de même, que l’économie mauritanienne est trop primaire, (…) sans industries de transformations, sans véritables sociétés de services, avec un marché de l’emploi abusant de ses salariés, pour réellement être vecteur de création d’emplois.

Sur le problème de l’éducation justement, qui serait une des tares de l’emploi dans le pays, Aziz explique que «c’est vrai que notre système éducatif n’est pas compatible avec notre marché du travail, mais il n’est aucunement discriminatoire », alors là encore que tous les acteurs de ce secteur, et les politiques pointent l’idéologie qui a soutenu la plupart des réformes de l’éducation qui ont divisé les mauritaniens, refusant le droit fondamental de toutes les communautés du pays d’apprendre leur langue à l’école.

Les consultations régionales pour les états généraux de l’éducation sont en cours, (…) on verra la réponse apportée par les autorités à cette question centrale.

Mamoudou Lamine Kane

Source  :  Noor Info le 08/08/2012

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