Opération d’identification des étrangers : Au commissariat de Tevragh-Zeina I, les chemises sont mouillées

(Crédit photo : Le Quotidien de Nouakchott)

En décidant d’imposer un titre de séjour légal aux étrangers établis en Mauritanie, les autorités mauritaniennes ont à cœur de mettre tous les étrangers qu’ils soient africains, asiatiques ou européens au même pied d’égalité dans le traitement des dossiers. Notre reporter a fait un tour au commissariat de police de Tevragh-Zeina I ce lundi 21 mai peu avant 11 heures.

Reportage.

Ce sont les anciens locaux du défunt projet de carte nationale d’identité qui abritent cette opération d’identification des étrangers auxquels on voudrait doter de titres de séjour légal en Mauritanie. La cour est très exiguës. Il n’empêche, beaucoup d’étrangers s’y tiennent debout en file indienne. Ils sont asiatiques, européens et africains à la recherche du précieux sésame pour pouvoir s’installer tranquillement en Mauritanie. N’Dèye Fatou est sénégalaise. 35 ans révolus, elle prend son mal en patience sur un banc. Elle est employée par un homme d’affaires mauritanien. L’homme s’est déplacé pour la rejoindre sur les lieux. Selon Fatou, il est venu pour l’aider à s’enregistrer et à décrocher le sésame. Tout se passe bien apparemment pour elle. Car au bout de 20 minutes d’attente, elle est ressortie des locaux de la police sourire aux lèvres. « Merci, tout s’est bien passé », lance t-elle, visiblement heureuse. Dans ces locaux du commissariat de Tevragh-Zeina I, tout se dérouler normalement pour l’heure. Signe que les pouvoirs publics tiennent, à travers cette opération de régularisation de la situation des étrangers, à se donner une bonne image. Mais encore une fois, l’opération montre que les autorités ne se sont pas investies dans la sensibilisation pour faire comprendre aux étrangers le bien fondé de la décision prise de leur imposer un titre de séjour légal dans le pays. Sans doute qu’ils sont nombreux à se poser des questions auxquelles ils ne peuvent apporter des réponses. Surtout qu’ils ont assisté aux nombreux couacs intervenus dans l’opération d’enrôlement des mauritaniens, menée par l’Agence Nationale du Registre de la Population et des Titres Sécurisés.

Tour de vis contre les migrants clandestins ?
Il faut dire quand même que la question de la gestion des flux migratoires dans le pays, installe une peur-panique dans le milieu des immigrés, toutes origines confondues. Au point que les préjugés voulus ou entretenus à dessein çà et là font débat. Certes que « chat échaudé craint l’eau froide », mais de là à y voir des entourloupes contre les étrangers, il n’y a qu’un pas que certains n’ont pas hésité à franchir. De ce point de vue, les organisations de défense des droits de l’homme n’ont pas tort de réagir pour pointer du doigt la Mauritanie et l’Europe. On se souvient de l’opération coup de poing menée en avril dernier contre des migrants africains dans la capitale économique Nouadhibou devenue en quelques années le point de transit favori des clandestins en partance pour l’Europe. Guinéens, nigérians, sénégalais et sierra léonais étaient ainsi raflés et parqués au centre de rétention de Nouadhibou pour être expulsés ensuite via Rosso pour le Sénégal. Les nombreuses violations des droits des migrants africains qui ont émaillé l’opération, ont très vite poussé l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH) et la Rencontre Africaine des Droits de l’Homme (RADDHO) de Alioune Tine à dénoncer ces reconduites manu militari à la frontière. De sorte que Nouadhibou est aujourd’hui pointé du doigt par Amnesty International pour ses conditions de détention, « de surpopulation et d’hygiène ne répondant pas aux normes internationales relatives aux personnes privées de liberté ». Ces constats résultent d’une mission que l’organisation avait effectuée en mars dernier dans la capitale économique. En fait, au-delà de ces accusations portées envers le centre de rétention de Nouadhibou, c’est toute la politique de lutte contre l’immigration clandestine en Mauritanie qui est mise en cause. Dans un rapport rendu public récemment, l’organisation de défense des droits de l’Homme dénonce le sort réservé aux candidats à l’immigration vers le continent européen. Intitulé Mauritanie : « Personne ne veut de nous », Amnesty accuse les autorités administratives locales de « violations de certains droits essentiels des migrants » interdits d’Europe. C’est pour dire que la question de l’immigration reste très débattue aujourd’hui, entretenue qu’elle est, par une pression migratoire forte à destination de l’Europe. Personne n’oublie encore les images de naufragés sur les côtes européennes interceptés au large des Canaries, de Lampedusa ou de Malte. Les reportages montrant des centaines de candidats clandestins à l’immigration autour de Ceuta et Melilla ou du tunnel sous la Manche marquent encore les esprits.

Moussa Diop

Source  :  Le Quotidien de Nouakchott le 22/05/2012

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