Investissements soudanais en Mauritanie : Est-ce de l’argent sale ?

Le Soudan est compté parmi les pays les plus véreux dans le monde. Il enregistre une percée suspicieuse en Mauritanie où ses investissements touchent plusieurs secteurs de l’activité économique nationale (pétrole, télécommunications, agriculture…).

Certains observateurs craignent même que ce flux de capitaux ne ressemble à un blanchiment d’argent du Pouvoir en place à Khartoum.

Le Soudan, placé avant-dernier suivi de la Somalie, qui ferme la marche du classement des pays africains, dans le dernier rapport 2011 de Transparency international relatif à l’Indice de perception de la corruption (IPC), ne fait pas figure d’un pays orthodoxe. Loin s’en faut. Le soudan reste à dix sept longueurs de notre pays, classé au 35èmerang sur les 53 pays concernés par l’enquête de Transparency international. Ce déficit de vertu du Soudan lui ouvre pourtant d’énormes opportunités d’investissements en Mauritanie où il est présent par nombre de sociétés et partenariats. Douteux ?
Il y a de quoi s’interroger eu égard à l’embellie de telles relations commerciales et économiques entre notre pays et le gouvernement soudanais, de plus en plus décrié sur la scène internationale. La chasse aux paradis fiscaux délocalise-t-elle les placements ailleurs ?
Au début était Chinguitel!
Avec une population de plus 42 millions d’habitants, le Soudan est l’un des pays les plus importants d’Afrique. Son économie est soutenue par la manne pétrolière, à l’origine, d’ailleurs, des appétits de destabilisation dont ce géant aux pieds d’argile souffre depuis les années 70. Ses investissements publics sont rivés sur l’agriculture, les industries mais également les services. Parmi ses principaux fournisseurs, il y a évidemment les chinois, les iraniens mais aussi quelques monarchies du Golf. La croissance importante de 10% enregistrée, il y a deux ans seulement, commence à se fondre pour se situer autour de 5%, en raison de plusieurs facteurs de gestion et de la partition du pays (Indépendance du Sud-Soudan, le 9 juillet 2011), déjà miné par plusieurs conflits internes (Drafour). Si le climat politique délétère a toujours été noyée par dans les rentes des gisements pétroliers, la tendance est aujourd’hui, à la récession dans ce pays où les institutions internationales suspectent une mauvaise gouvernance rampante. L’un des premiers signes de cette déliquescence est que malgré ses richesses évidentes, le Soudan est classé 150ème rang mondial par son indice de Développement humain.
L’intérêt du Soudan pour l’investissement en Mauritanie est inauguré en 2006, pendant la première période de transition qui a vu le renversement du président Ould Taya. Une enveloppe de 100 millions Usd est ainsi déboursée pour l’acquisition de la troisième licence de téléphonie cellulaire dans notre pays dont les consommateurs étaient au meilleur des cas quantifiés à six cents milles abonnés à deux réseaux déjà existants (Mattel et Mauritel). Mais l’appétit vient en mangeant. Les soudanais (capitaux majoritairement étatiques) mettent le pied dans le secteur des hydrocarbures par l’entremise de la société de bankering et même à travers des partenariats dans la distribution de produits ou encore dans le secteur agricole comme le tâte toujours Dan Fodio pour la culture et la transformation sucrière.

Des emplois, à quel prix?

Les relations politiques qualifiées de privilégiées entre Khartoum et Nouakchott, augurent d’un raffermissement des liens de coopération économique et commerciale. Cependant, la réalité de la gouvernance économique désastreuse dans ce pays fragilise davantage la pérennité de tels échanges. Ceci est d’autant plus vrai que la situation économique, naguère reluisante du Soudan, qui pompait à volonté dans les réserves pétrolières, sera certainement contrariée par l’Indépendance du Sud-Soudan, assis sur 75% de cette manne pétrolière. En Mauritanie donc, les sociétés mises en place avec le concours de l’argent soudanais créent de l’emploi. C’est surtout vrai pour la Chinguitel. Quoique politiquement dangereuses, les relations avec Omar Hassen El Béchir, paria de la Communauté internationale, enveloppent d’une grande suspicion les investissements soudanais consentis en Mauritanie. En paiera-t-on encore le prix? Qui en empoche les dividendes? Bien des zones d’ombre dans ce dossier moralement gênant en cas d’assistance à détournement de deniers publics d’un Peuple frère.

JD

Source  : Le Quotidien de Nouakchott le 09/02/2012

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