Paysage politique : Un pouvoir, deux oppositions

Née des cendres, ou de ce qui en restait, du Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD), constituée en réaction au coup d’Etat d’août 2008, la Coordination de l’Opposition Démocratique (C.O.D) avait, on s’en souvient, un leitmotiv, si ce n’est une fixation qui avait pour nom : le Dialogue.

Autour de ce vocable venait s’ajouter des références, tantôt, des épithètes, tout simplement, parfois, pour que telle ou telle entité politique marque sa couleur, son territoire. Au fil des négociations, entre le pouvoir et l’opposition, tous les éléments greffés, par-ci, et, par-là, se désagrègent, aujourd’hui. Etat des lieux.

Aujourd’hui, également, se désagrège la COD. Et, on parvient, à l’issue de ce dialogue qui vient de se clôturer, à une image bicéphale de l’opposition. D’une part, il y a l’opposition ‘’démocratique’’, radicale, dit-on, par son boycott. Et, d’autres parts, il y a l’opposition participationniste, version, au moins reconnue par le pouvoir. Comment, vit-on, de parts et d’autres ce divorce politique qui, non seulement, altère la relative bonne image de l’opposition démocratique, mais risque bien de jeter un discrédit sur son devenir et sur celui des personnalités qui l’animent depuis plus de deux décennies?

Il y a deux hommes qui ont, à tort ou à raison, au cours des deux dernières décennies, marqué l’histoire politique de la Mauritanie. Quand on parle de l’opposition, on pense d’abord, d’une manière intuitive ou presque, à ces deux inamovibles ténors que sont ( suivant l’ordre alphabétique, pour ne pas déplaire) : Ahmed Ould Daddah et Messaoud Ould Boulkheîr. Ces deux hommes, ont vécu, de par le passé, au rythme des relations on ne peut plus fluctuantes.

De périodes de grands amours, en périodes de redoutables adversités, les deux hommes parvenaient toujours à s’accorder et donc converger leurs positions et leurs énergies afin d’espérer atteindre cet unique objectif commun. Aussi bien l’un que l’autre se rendait, à merveilles, les monnaies de toutes les espèces. Ils étaient presque quittes, comme on dit. Mais, il faut dire que la relation entre les deux leaders, quoique le plus souvent conflictuelle, n’avait jamais atteint un point de non retour. C’est par ce que, peut-être, les choses demeuraient, à l’époque, dans la sphère de l’informel, donc du facilement réversible.

Des lignes démarcations

Aujourd’hui, les rapports se corsent, quelque peu, se formalisent. Les lignes de démarcations sont claires. Elles le sont, désormais, après la signature du document sanctionnant les travaux autour du dialogue national, dont l’un des frères ennemis y a pris part, aux premières loges, même, et l’autre, l’a boycotté, lui, aussi, juchant sur la pyramide du boycott.

Au sein de la COD, certains se plaignaient déjà beaucoup de l’animosité entre Ould Daddah et Ould Boulkheïr. Des plaintes qui n’ont, bien entendu, aucune raison d’être. Messaoud n’a pas, certes – pas encore – d’une manière officielle déclaré qu’il quitte la C.O.D. On lui attribue quelques admonestations  exprimées à l’encontre de ses anciens compagnons. De son coté, la C.O.D n’a donné avis que sur le dialogue, en essayant d’orienter les reproches plutôt vers le segment du pouvoir. Sur Messaoud on ne dit rien. On ne laisse rien surgir, en apparence, même si on se permet, en aparté, de souligner l’absence de pertinence politique chez ce leader charismatique de la cause des Harratines. Une cause portée, c’est vrai, depuis peu, par des forces émergentes, associées à d’autres figures marquantes de l’APP de Messaoud, qui, tous tentent de déstabiliser celui-ci. Même, cet embryon de fronde, au sein de la formation politique de Ould Boulkheïr,  la C.O.D n’y  semble pas vouloir prêter flanc. Par respect, peut-être, ou par pur tact politique observé à l’adresse de Messaoud. On ne saurait ?!…

On assiste d’une manière évidente à une situation inédite qui est en train de s’installer au sein de cette opposition, dans ces deux versions, celle qui a participé au dialogue et celle qui l’a boycotté. On ne sait pas vraiment laquelle est la véritable opposition. Mais, on ne sait surtout pas la nature de cette relation – ou non relation – qui va naître, ou qui est déjà née ?

Pour une fois, les deux oppositions, si on ose dire, n’ont pas le même point de vue sur le premier magistrat du pays. Messaoud et ses alliés, dans la participation, le trouvent fréquentable et sincère. Tout le contraire d’Ahmed Ould Daddah et ses amis dans le boycott. Mais, cela n’arrange rien ! Rien, pour savoir laquelle des deux versions de l’opposition, peut-on appeler, sans offenser aucune, l’Opposition ?

Le pouvoir qui a, tout de même, réussi à fracturer l’opposition démocratique marque indéniablement un point supplémentaire contre des adversaires faibles et affaiblis les divergences de toutes sortes.

AVT

Source  :  Noor Info le 04/11/2011

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