Ahmed Ould Daddah, président du RFD, chef de file de l’opposition

’ Je continue à dire que l’élection ayant porté le général Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir n’est ni transparente ni  loyale. Ma position n’a pas bougé d’un iota’’

Le Calame: Après avoir privilégié, dans un premier temps, l’option militaire,  dans sa lutte contre le terrorisme, le pouvoir est en train de changer de stratégie, en tentant de susciter un consensus national sur la question. Quelle est à votre avis, la meilleure  option, civile, militaire ou les deux?

Ahmed Ould Daddah : Je ne suis pas au pouvoir, donc, je ne réponds pas à la place du pouvoir. Je pense, néanmoins, que, dans des luttes comme celle-ci, il y a deux fronts: un front intérieur et un front,  disons-le, des armes. J’ai toujours dit  que si le front intérieur n’est pas pris en compte, s’il n’est pas bien impliqué, il devient difficile de gagner. Il n’est pas facile de gagner toute guerre, si les bases  arrière ne sont pas bien coordonnées. C’est pour cette raison que j’ai toujours estimé que l’avis du front intérieur doit être pris en compte, tous les acteurs doivent être réellement écoutés, impliqués dans tous les combats, en particulier celui-ci. Bien sûr, l’armée  doit être mise dans de bonnes conditions matérielles et morales, pour pouvoir s’acquitter de sa mission. Ça a toujours été ma position et celle de mon parti. Evidement, il y a, aussi, la question de la légitimité du combat. Ça, c’est une autre  affaire, mais cela, aussi, doit être  discuté avec l’ensemble des acteurs politiques.

Ça n’a  malheureusement pas été le cas jusqu’ici?
J’ai répondu à cela dans votre  première question. Pour le reste, c’est un constat que vous faites et dont je vous laisse la paternité.

A qui la faute ?
Je ne suis pas un juge mais l’acteur principal est le pouvoir en place.

Le RFD a opéré, récemment, un virage remarqué. Après avoir, longuement, contesté la victoire d’Ould Abdel Aziz, vous avez qualifié celui-ci de président de la République et vous vous êtes démarqué de la COD qui critiquait les attaques menées par l’armée au Mali. Qu’est-ce qui a provoqué ce revirement?
C’est vrai que j’ai dit que l’élection ayant porté le général Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir n’est ni transparente ni  loyale.  Je continue à le  répéter, ma position n’a pas bougé d’un iota. Mais j’ai dit, aussi, qu’une année a passé et que le pays connaît une situation politique, sécuritaire et économique difficile. Conscient de cela, le parti a décidé de tourner la page de l’élection présidentielle, dans le souci de favoriser un dialogue entre le pouvoir et l’opposition. Je dis bien: entre le pouvoir et l’opposition. Je n’ai pas dit: entre le pouvoir et le RFD, parce que, quelles que soient les divergences qu’il peut y avoir entre  pouvoir et opposition, entre partis de l’opposition, pris individuellement, et ce pouvoir, il y a un dénominateur commun, à savoir une gestion politique saine et sereine, au sein de laquelle chacun joue sa partition et respecte l’autre. Ça, c’est quelque chose de commun  entre les partis. C’est dans cette optique que nous en appelons au dialogue, franc et sincère, entre le pouvoir et l’opposition, pour apaiser et assainir le climat politique du pays, engagé dans la lutte contre le terrorisme, mais, aussi, pour l’avenir, parce que nous avons à vivre, théoriquement, des élections municipales et législatives en 2011. C’est extrêmement  important que  ces élections se déroulent dans un climat de sérénité et, pour cela, il est important que soient établies  des règles  de jeu très claires et concertées. Un suivi consensuel doit, également, être convenu entre les différents acteurs politiques.

Est-ce que le rapprochement avec le pouvoir actuel et le changement de position qu’il implique n’est pas préjudiciable à la cohésion du RFD?
Je vous laisse l’entière responsabilité  du terme «rapprochement».  Je vous ai dit que nous n’avons pas changé de position ou de proximité, avec le pouvoir. Nous sommes, toujours, un parti d’opposition et nous ne demandons, à personne, un certificat d’opposition. Ce que nous demandons, par contre, c’est que l’opportunité soit donnée, à l’opposition, de discuter, avec le pouvoir, des questions engageant l’avenir du pays. C’est dans l’intérêt même du pouvoir. Vous savez, nous n’inventons rien,  il y a deux méthodes de cohabitation: la méthode douce, où chacun respecte son vis-à-vis, où chacun joue, pleinement, son rôle, sans empiéter sur les  prérogatives de l’autre, et il y a la méthode de confrontation ouverte, entre les deux camps,  qui n’est, généralement, dans l’intérêt de personne, en tout cas jamais dans celui du pays.

A vous entendre, la hache de guerre est loin d’être enterrée avec le pouvoir, comme le pensent certains observateurs de la scène politique nationale …
Vous êtes, véritablement, très tenace. D’abord, je vous dis qu’il n’y a pas de hache de guerre, entre nous et le pouvoir, parce que nous ne concevons pas la lutte politique comme une lutte armée. Celle-ci est possible et peut arriver, dans certains cas, mais, au RFD, ça n’a jamais été notre option. Nous, nous menons un combat politique basé sur un certain nombre de principes, sur des objectifs à atteindre. Il n’y a aucune évolution  de fond, sur ce qui séparait le RFD et le pouvoir. Le pouvoir est, toujours, exercé de manière solitaire, il refuse tout dialogue  avec l’opposition. Quand il se décidera à s’asseoir autour d’une table, nous verrons les règles  et, donc, les modalités de ce dialogue. Il n’y a pas d’évolution dans notre positionnement, sauf que nous avons décidé de reconnaître Mohamed Ould Abdel Aziz, en tant que président de la République. C’est, simplement, une évolution de forme. Il faut, au passage, rappeler que tous les autres partis politiques ont reconnu, bien avant nous donc, le pouvoir de Mohamed Ould  Abdel Aziz. Nous avons attendu un an pour le faire. Ce faisant nous n’avons pas inventé l’assiette creuse. Je trouve même discriminatoire que ceux qui ont reconnu, très tôt, l’election de Mohamed Ould Abdel Aziz veulent faire croire que sa reconnaissance par le RFD est d’emblée un rapprochement avec le pouvoir.

Vous avez déclaré, dans une récente sortie à RFI, que la gestion du pays n’était pas menée avec intelligence. Comment l’économiste que vous êtes analyse la situation actuelle?
Je n’ai pas dit cela de cette manière. Je crois avoir parlé d’une «gestion intelligente», j’ai positivé. Une bonne gestion du pays consiste,  premièrement – et c’est dans l’intérêt du pouvoir, je le répète – à instaurer un climat de sérénité politique. Deuxièmement, c’est aussi là son devoir, de se concerter avec son opposition, les syndicats et autres leaders d’opinion. Ce dialogue peut se réaliser avec chaque parti ou à travers une coordination de partis ou, même, selon les deux méthodes. La meilleure serait, je crois, de combiner les deux. Tout cela est possible, si le pouvoir manifeste une réelle volonté de dialoguer, de rassembler tous les Mauritaniens autour de l’essentiel.
Sur un autre plan, l’opposition n’est pas étrangère au pays, encore moins constituée de hors-la-loi. Nous sommes une opposition démocratique, une opposition responsable, une opposition patriotique, qui aime son pays et veut son bien. Par conséquent, nous sommes intéressés par son évolution politique, son évolution économique et sociale, par les voies et moyens que le pouvoir  entend utiliser, pour conduire le pays vers le bien-être des populations. Je crois que l’opposition, ensemble ou séparément, ou ensemble et séparément, peut contribuer à la sortie de crise, en  apportant  sa pierre à l’édifice. Il revient au pouvoir de prendre la dernière décision. Ça ne diminue en rien un pouvoir. Au contraire, cela renforce sa crédibilité. L’opposition y gagnerait, elle aussi. C’est  extrêmement important de briser la glace. Je crois qu’il faut avoir le courage de faire bouger les lignes et il appartient au pouvoir de prendre l’initiative.

Pour  certains observateurs, le pas franchi, par le RFD, à l’endroit du pouvoir, annoncerait l’entrée, imminente, du principal parti d’opposition dans la majorité présidentielle.  Certaines rumeurs  font d’Ahmed Ould Daddah, le prochain  PM. Cette hypothèse est-elle envisageable?
Pourquoi penser que reconnaître un état de fait, après un an, soulève tant de montagnes? D’autres ne l’ont-ils pas reconnu, aussitôt après la proclamation des résultats, et personne n’a crié au scandale ? Pourquoi la position du RFD dérange-t-elle certains? Je pense qu’on est en train de nous traiter de façon discriminatoire. Un certain nombre de gens, au sein de la presse et du microcosme politique, en parlent. Je comprends ces attitudes et je cherche des explications à cela. Lorsqu’il y a eu la proclamation – hâtive, je le souligne – des résultats par le Conseil constitutionnel – 48 heures alors qu’il avait 8 jours devant lui! – et comme on dit, en Droit, que la cause était considérée comme étant entendue, tous les autres partis ont reconnu le pouvoir. Nous, nous avons dit: «certes, nous ne pouvons contester la sentence du Conseil constitutionnel mais, politiquement, nous ne pouvons reconnaître le pouvoir».  Je rappelle, ici, que les raisons qui ont dicté notre position n’ont pas changé, nous n’avons aucun élément nouveau qui nous oblige à modifier notre appréciation des résultats de l’élection présidentielle. Mais nous avons apprécié, par contre, la situation du pays, en fonction de critères évolutifs qui sont, entre autres, la situation sécuritaire, la crise politique interne, les problèmes économiques nationaux, l’environnement  international… Et c’est en fonction de ces éléments que nous avons recadré notre position. A tort ou à raison, ça, c’est une autre affaire. Qu’on nous croit ou non, nous n’agissons que dans l’intérêt supérieur de la Mauritanie, il n’y a aucun calcul politicien, là dedans.

Une délégation du FMI vient de séjourner en Mauritanie et a déclaré que la situation macroéconomique était assainie. Pourtant l’euro a dépassé, pour la première fois au taux officiel, les 400 ouguiya et l’Etat n’arrive pas à honorer ses engagements. Comment est-ce possible?
Vous savez, moi, je me méfie beaucoup du FMI, comme, d’ailleurs, de la Banque mondiale, pour laquelle j’ai travaillé, dans le cadre des fameuses politiques d’ajustements structurels (P.A.S.). Les fonctionnaires de ces institutions sont, souvent, des experts très compétents mais ils n’ont pas suffisamment le temps d’évaluer et d’apprécier les programmes, parce qu’ils n’interviennent que pour un laps de temps et ne planchent que sur les chiffres qu’on leur fournit. L’expérience a montré que leurs évaluations sont souvent sujettes à caution. Ne vous étonnez pas, aujourd’hui, si l’on ne parle plus des P.A.S., parce qu’ils ont été un échec cuisant, alors qu’ils ont demandé des efforts énormes, aux peuples et à leurs gouvernements. On a fermé des entreprises, mis au chômage des millions de personnes. C’est pour cela que le FMI et la BM sont devenus très discrets, aujourd’hui. En planchant sur les chiffres qu’on leur a servis,  les experts noteront des progrès mais est-ce que ces chiffres sont fiables? Reflètent-ils la réalité économique du pays? En tout cas, en tant que profane, en tant que consommateur, en tant qu’observateur, je constate qu’il n’y a pas de développement. Vous savez, le développement est un état d’esprit. Il doit être visible et lisible, à travers une dynamique des entreprises, dans l’investissement, dans la production, dans le commerce, les emplois et la consommation, etc. Je ne sous-estime pas les efforts du gouvernement, dans la construction des routes, à Nouakchott, même si j’aurais souhaité qu’on mette plus l’accent sur l’intérieur du pays. Nouakchott est affreusement sale, affreusement vulnérable aux inondations, il aurait fallu insister sur des systèmes d’évacuation des eaux. Tout cela n’est pas un vrai développement. Un développement, c’est quand un fonctionnaire de Kaédi peut vivre avec son salaire, un producteur peut écouler sa production et non la brader, un travailleur de la SNIM  à Zouérate peut vivre avec son salaire. Le développement implique une dynamique d’échanges internes et externes, la libération des initiatives, une valorisation des ressources naturelles et un esprit créatif. Moi, je n’ai absolument pas le sentiment qu’on soit dans une telle situation. J’ai le sentiment qu’il n’y a, peut-être pas, recul, mais, en tout cas, pas d’avancées. Je le dis comme je le pense, je peux me tromper, je n’ai pas le monopole de la vérité. Notre pays a d’énormes ressources. Des ressources humaines, un très grand cheptel de bovins, caprins et camélidés pour lequel nous possédons un très grand savoir faire et une grande compétence,  des ressources agricoles, des ressources halieutiques et des ressources minières, pour une population  de moins de 4 millions. Les Mauritaniens sont travailleurs et pacifiques. On a pris l’habitude de dire que les Mauritaniens ne travaillent pas, ce n’est pas vrai. Il suffit de les mettre dans les conditions de pouvoir travailler, d’instaurer une politique de sanction/récompense, pour voir le résultat. Nous avons un immense potentiel de développement pour faire, de notre pays, un pays émergent. Plus de 130.000 ha de terres  cultivables,  des bras pour les exploiter, ce qui devrait nous conduire à une autosuffisance alimentaire en riz, légumes et fruits.  Une côte très poissonneuse. En plus de cela, la Mauritanie se révèle être un grand pays minier. Outre le fer, il y a l’or, l’uranium, le phosphate, le gaz, le cuivre, le pétrole, etc. Avec tout ce potentiel, pourquoi les Mauritaniens ne sont-ils pas à l’abri du besoin? Il y a, quelque part, quelque chose qui ne va pas! Il faut situer les responsabilités. Est-ce un problème de gouvernance? Un problème d’allocation des ressources, y compris des ressources humaines? Avons-nous toujours l’homme qu’il faut à la place qu’il faut? Ceux qui gèrent nos ressources sont-ils récompensés? Ceux qui gèrent mal sont-ils sanctionnés, en dehors de tout critère d’appartenance politique?  Je me pose des questions et ne jette l’opprobre sur personne. A mon avis, il ya quelque chose qui ne tourne pas rond dans notre système de gestion. Nous ne sommes, en tout cas pas, à l’optimum, c’est le moins qu’on puisse dire.
Dernièrement, dans un communiqué de l’AJD/MR, le président de ce parti, Ibrahima Sarr, suggère le changement de l’appellation du pays, de son hymne et, éventuellement, de son drapeau. Qu’en pensez-vous?
Je n’ai aucun avis sur cette question
Le gouvernement est en train de mettre les bouchées doubles pour préparer les festivités marquant le cinquantenaire de l’indépendance de notre pays. Que pensez-vous de cet évènement qui a marqué la naissance de la Mauritanie et auquel vous avez assisté? 
Lorsque l’indépendance fut proclamée, j’étais élève en seconde, au lycée Vanvo de Dakar. J’ai assisté, avec d’autres élèves, à la célébration de l’indépendance sous un grand hangar, situé à l’emplacement même des archives nationales actuelles. La proclamation s’est faite dans un climat de menace. Le maire d’Atar, Abdallahi Ould Oubeid, venait d’être assassiné, le président Moctar Ould Daddah était menacé d’assassinat au moment de la proclamation de l’indépendance. Nouakchott n’existait pas encore, il n’y avait que des dunes. Je suis heureux de constater que la Mauritanie a pu vivre et personne aujourd’hui ne l’a remet en cause. C’est un pays qui a ses frontières, ses institutions et ses composantes nationales, qui a ses difficultés, il ne sert à rien de les cacher. C’est un fait réel. Le pays a poursuivi son petit bonhomme de chemin, malgré les drames de  1989 et leurs cortèges de répressions et d’expulsions de compatriotes de l’autre côté du fleuve Sénégal. J’espère qu’on réussira à cicatriser ces plaies et à revenir aux fondamentaux de la Mauritanie, à savoir la tolérance et la complémentarité, le respect de l’autre. Dieu soit loué, nous ne sommes pas allés aussi loin dans les horreurs vécues ailleurs! Je crois – c’est une vérité historique – que l’opposition mauritanienne a  joué un rôle déterminant, en s’opposant à la rupture et à la déchirure définitive du pays, à sa division entre une Mauritanie arabe et une Mauritanie noire africaine. La Mauritanie est un tout. J’ai toujours dit que ce pays est comme un œil où le blanc et le noir cohabitent, que tout ce qui affecte l’un affecte l’autre. La Mauritanie est très belle, dans sa composition. Ses nombreuses luttes internes n’ont jamais revêtu, dans le passé, un caractère racial. Pour revenir sur les évènements de 1989, je rappelle que l’opposition a toujours lutté et continue à lutter, pour que tous ceux qui ont été lésés  soient rétablis dans leurs droits. Ce n’est que justice. Certes, on ne peut pas compenser certains  drames mais on peut, cependant, procéder à certaines réparations. Je reste convaincu que tous les Mauritaniens sont fiers d’appartenir à leur pays, qu’ils sont conscients de la nécessité de préserver son unité. J’ai été frappé par les propos de deux jeunes  déportés au Sénégal qui  exprimaient, récemment, leur  sentiment de joie de se retrouver sur leur territoire national. Nous avons un facteur d’unité extrêmement important: notre religion. Le Liban a connu, lui, plusieurs guerres de religion. Nous sommes un pays musulman, à 100%, un pays sunnite, à 100%, un pays malikite à 100%, les courants religieux traversent toutes les composantes du pays, sans heurts. Durant ses  50 ans d’indépendance, la Mauritanie a évolué, bon an, mal an. Les Mauritaniens ont la conscience d’appartenir à leur pays. Il appartient à tous de préserver son unité, selon le précepte de la religion. Dieu a dit: «Le meilleur d’entre vous est le plus pieux» et Cheikh Ahmadou Bamba n’a pas manqué de souligner: «Heureusement que Dieu n’a  pas dit que le meilleur d’entre vous est le plus blanc».

Certains prétendent que l’attitude du RFD résulterait des pressions que le président Ahmed Ould Daddah aurait subies, de la part de certains pays étrangers?
Quel genre de pressions peut-on exercer sur moi? Qu’est-ce qu’on peut m’enlever? Je vois beaucoup de monde, notamment les responsables français, il n’a jamais été question de cela. Je sais que les grands de ce monde façonnent, d’une certaine façon, notre destin mais jamais on n’a exercé de pressions sur moi. Je suis  libre comme l’air, je suis libre de langue et de plume, je n’ai aucune gêne à dire ce que je pense. Et de le dire les yeux dans les yeux, quand je rencontre certains responsables de quelque origine ou nationalité qu’ils soient.

Nombre de Mauritaniens se demandent pourquoi Ahmed Ould Daddah ne se présente pas pour un poste de député ou de sénateur, comme le font les autres leaders de partis politiques, en Afrique et ailleurs?
Vous savez qu’Ahmed Ould Daddah est le premier responsable d’un parti politique dont les instances dirigeantes investissent les candidats aux élections. Je trouve un peu excessif qu’Ahmed Ould Daddah soit candidat aux présidentielles et qu’il vienne  disputer, aux autres membres du parti, les places de député ou de sénateur. Je pense qu’il faut savoir laisser quelque chose aux autres. Il faut savoir partager. C’est ma vision des choses. C’est bien d’être député, de bénéficier d’un traitement décent, d’une immunité de 5 ans, ça ne me déplait pas, mais je ne  peux pas et je ne dois pas être partout.  J’aime bien, aussi, que les autres assument une part de leur responsabilité. Je sais que des gens disent parfois que je ne suis intéressé que par le fauteuil présidentiel. Je vais vous dire pourquoi, je ne l’ai jamais dit à personne. Moi, je considère le pouvoir, non pas comme un gâteau qu’on partage, mais comme un devoir. Je ne veux pas être dans une position où je ne puisse agir conformément à mes convictions, à mes ambitions pour le pays. L’intérêt d’être le président, c’est que vous pouvez, pendant votre mandat, imprimer votre marque, façonner, à votre image, le pays; avec d’autres, bien sûr. Vous avez le rare privilège d’appliquer votre programme électoral, ce que vous n’avez pas, si vous êtes ministre. Et à ce titre, oui, effectivement, j’ai une ambition pour la Mauritanie et je crois qu’il est plus facile de réaliser ses objectifs en étant sur la première marche du podium.

Pour les élections municipales et législatives prochaines, ne pensez-vous pas que l’opposition doit exiger une loi interdisant le nomadisme politique, c’est-à-dire faire en sorte que tout député, sénateur ou maire  élu sur les couleurs d’un parti politique, perde ce mandat, sitôt quitté ledit parti?
C’est une question posée. Je me rappelle en avoir discuté, en septembre 2008,  lors d’une audience  avec feu El Hadj Oumar Bongo dont le pays avait adopté une loi sur cette question. Le Bénin et le Sénégal en ont fait de même je crois. C’est une préoccupation que nous avons et que nous posons au pouvoir. Une question morale, avant d’être politique.  Il y a des gens qui n’auraient jamais été députés, sénateurs ou maires, s’ils  ne s’étaient présentés sous les couleurs de tel ou tel parti. En tout cas, nous, au RFD, nous allons être très vigilants pour que ce soit les militants du parti qui choisissent, dans la mesure du possible, leurs candidats, au lieu que la direction du parti leur impose les siens.
Dans l’avenir, on travaillera  dans le sens de l’introduction de cette mesure qui est, d’ailleurs, un bien pour la stabilité de l’échiquier politique. Moralement, c’est bien mais c’est bien, aussi, pour l’enracinement de la démocratie.

Propos recueillis par AOC et Dalay Lam

Le Calame

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