Décristallisation des pensions : Enfin l’égalité de traitement entre Français et Africains !

C’est une décision historique. Le président français, Nicolas Sarkozy, a annoncé à ses pairs africains (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad, Togo) et le ministre de la Défense de Côte d’Ivoire, lors d’un déjeuner de travail à l’Elysée, la mort prochaine de l’inégalité officielle de traitement entre militaires retraités français et étrangers, pour la plupart africains ayant servi dans l’armée française.

 En effet, depuis une loi de 1959, les pensions des combattants sont gelées.Pour ce faire, un projet de loi sera déposé devant le Parlement « dès la rentrée prochaine. Objectif, précise Nicolas Sarkozy, faire en sorte pour que les anciens combattants africains puissent bénéficier désormais des mêmes prestations de retraite que leurs frères d’armes français. La décision fait suite à celle du Conseil constitutionnel du 28 mai dernier qui censurait trois articles de loi déjà en vigueur qui établissaient la différence de pensions entre les anciens combattants français et ceux issus d’anciens pays ou territoires administrés par la France, estimant qu’ils étaient « contraires au principe d’égalité ». Le Conseil constitutionnel se prononçait alors pour la première fois après avoir été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), une procédure issue de la réforme de la Constitution du 23 juillet 2008 et entrée en vigueur le 1er mars dernier. Le décret devrait profiter, si l’on en croît les chiffres avancés, à environ 30.000 personnes: 10.000 anciens soldats ayant servi sous le drapeau français avant l’indépendance des colonies et 20.000 de leurs héritiers. Ainsi, les «ex-tirailleurs sénégalais» ou leurs veuves verraient alors leurs retraites sensiblement augmentées. Selon les estimations, il en coûterait un peu plus de 150 millions d’euros au budget français pour mettre un terme à l’injustice.
En fait, osons le dire, la cristallisation des pensions était sur la sellette depuis deux mois. On s’en rappelle, en fin mai passé, le Conseil constitutionnel avait censuré les lois de cristallisation jugeant qu’elles constituaient une rupture du principe d’égalité, sur la saisine d’une famille d’anciens combattants. Ces derniers avaient utilisé la nouvelle question prioritaire de constitutionnalité, une disposition instaurée par la révision constitutionnelle de juillet 2008 voulue par le président français, M.Nicolas Sarkozy. Depuis 1959, le gel permanent des pensions des vétérans africains est un vieux sujet de discorde entre Paris et les capitales africaines au point que l’homme de la rue à Nouakchott ou à Dakar ne voyait dans l’attitude française rien d’autre qu’un racisme officiel de la France vis-à-vis des anciens combattants africains. En 1985, le gouvernement avait envisagé d’abroger ce texte. Mais le coût exorbitant de la mesure l’avait alors poussé à renoncer.
Elle fut finalement modifiée une première fois en 2001. Puis en 2006, à la suite du film «Indigènes», Jacques Chirac assouplit à son tour la loi de 1959. Sans pour autant mettre un terme complet aux inégalités. Le nivellement par le haut de l’ensemble des pensions, sans tenir compte de la nationalité des uns ou des autres, est certes un vrai soulagement, mais il ne met pas forcément fin à toutes les polémiques. Certains anciens combattants Africains réclament un rattrapage, au moins partiel, des sommes amputées.

Du chemin, il y en a encore
Pour le Directeur de l’Office des Anciens Combattants et Victimes de Guerre de la RIM, Colonel Dia Amadou Mamadou, la franchise fait que cette loi de 1959 est un pas mais il reste encore à faire. Selon lui, il reste à assouplir la procédure de réversion des pensions aux veuves. Il n’a pas oublié d’évoquer l’épineux problème des goumiers supplétifs mauritaniens. « Nos goumiers qui ont authentiquement travaillé comme les militaires malgré qu’ils soient civils, agents de sécurité aux points sensibles, guides à travers le territoire national et combattants comme tout le monde, n’ont pas de livret, de matricules, ni de pièces quelconques puisque les commandants de cercle qui les géraient, n’ont rien fait pour eux », martelait-il, jugeant leur problème injuste et flagrant qu’il faut résoudre sans délai. Le directeur de l’office national des anciens combattants et victimes de guerre de la RIM a également rappelé la correspondance au secrétaire d’Etat français aux anciens combattants, en vue d’activer la loi ou alors d’appliquer les dispositions contenues dans l’article 71 de la loi 14-54 du 26 décembre 1959, le L3, qui dé cristallise leurs pensions par dérogation renouvelable tous les douze (12) mois, pour le peu de temps qu’il leur reste à vivre. De même ont-ils demandé aussi l’instauration de l’égalité et de la justice au sein du monde combattant et pour la pérennisation de leurs droits acquis ; que la France opte pour un alignement des pensions et retraites des africains et asiatiques, sur les taux en vigueur pour les anciens combattants français avec lesquels ils ont partagé les mêmes dangers, fait face aux mêmes balles de l’ennemi dans les mêmes champs de bataille suivant le principe, à risques égaux, des droits égaux ; le paiement des droits depuis la date de leur concession et que la paie de leurs pensions soit mensuelle plutôt que trimestrielles au même titre que les anciens combattants français qui la perçoivent chaque mois. « Qu’ils règlent ce problème, nous irons dans nos tombes l’esprit tranquille sinon chacun de nous y ira avec la douleur au cœur pour ces deux derniers cas que je viens d’évoquer. Car avec la résolution de cette erreur qui a causé des préjudices moraux et financiers aux vieux soldats de l’armée française, la France revient à la place d’une grande puissance. En effet, pour nous, l’Etat n’est pas puissant puisqu’il est industrialisé ou mécanisé, mais il est puissant parce qu’il est juste et neutre de ses partis politiques. Disons aussi que l’Afrique ne pourra jamais écrire son histoire sans se référer aux sacrifices consentis par ses fils, avant, maintenant et à l’avenir.
Souhaitons que ce projet de loi qui va être déposé à la session prochaine du parlement français puissent répondre à toutes les souffrances que nos anciens combattants ont enduré, car mieux vaut tard que jamais.

Moussa Diop

Source  :  www.quotidien-nouakchott.com  le 14/07/2010

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