Je suis un kushite du Tekruur / Par Ciré KANE

« Si vous faites un rêve, même sans importance, et que vous voyez sa réalisation sous vos yeux au point que vous devinez l’action qui va suivre, vous êtes peut-être la réincarnation d’un ou plusieurs de vos ancêtres. Ça n’est pas sorcier ! » Siree Kuushnaajo. 31/03/2024.
J’ai changé hier ma signature « Siree Tekruur » en « Siree Kuushnaajo Tekruur » pour qu’elle reflète mon origine de Kush(Soudan actuel).
Pourquoi Kush et pas Kemet ?
Il est important de savoir que les eaux du Nil coulent de Kush vers Kemet.
Kush est donc  la haute Egypte, l’actuel Soudan (Nubie). Kemet est la basse Egypte et son delta très fertile au bord de la méditerranée.  Le Nil blanc et le Bleu se rejoignent à Khartoum pour additionner leurs forces afin de bien zigzaguer entre les cataractes. Il est nécessaire de connaître que  ces différences d’altitude, de courant et de vent dessinent des pays différents et qu’il était vexant à l’époque des pharaons de confondre un montagnard et un habitant de vertes prairies plates.
Des pharaons puissants comme les rois khusites de Napata ont réussi à réunifier les deux Egyptes. Imaginez un seul pharaon régnant de l’embouchure du delta jusqu’aux plus hautes montagnes de Nubie.C’est une superpuissance! respectée par tout le pourtours méditérranéen et  l’autre côté de la mer rouge.  L’équivalent aujourd’hui des USA et Russie réunis.
La découverte par Napoléon de l’Egypte par la méditerranée a boosté la réputation de Kemet au détriment de Kush et on s’est mis à tout appeler Egypte ou Kemet. Le monde découvre petit à petit que cette civilisation a débuté à Kush, c’est là qu’il y a les plus vieilles pyramides.
Après cette introduction, je peux vous conter mon histoire sans risque que vous attribuez à Kemet ou à  l’Egypte ce qui est à Kush ou au Soudan.
Je m’étais rendu à Khartoum en 2012 pour assister à un conseil d’administration (CA) d’une  société soudano-mauritanienne qui ravitaillait en fioul des bateaux en haute mer. Ce voyage s’est par hasard car j’étais à Kiffa pour raison de famille quand la société m’a contacté et elle m’avait dit que mon déplacement à Khartoum n’était pas nécessaire.  J’ai appelé le Président du CA qui m’a dit que la décision ne dépendait que de moi. Sur ce, passionné de voyages et de découvertes, je rappliquait dare-dare à Nouakchott et obtenais mon visa pour le Soudan en moins de 12h.
En débarquant à Khartoum , très belle capitale, mon projet était de me rendre en Egypte dès la fin des travaux du CA pour visiter les vestiges de cette civilisation noire qui a dominé le monde avant d’être anéantie par les perses et Alexandre Le Grand. Mais il était impossible d’obtenir le visa pour l’Egypte en un délai si court, même avec l’aide de notre gentil ambassadeur. Alors j’ai opté pour le tourisme local. Je ne fus point déçu, c »est très joli autour de Khartoum. Ils ont une grande expérience dans la conservation de leur patrimoine national, un savoir-faire hérité des britanniques.
Les musées sont magnifiques. Malheureusement, avec l’embargo qui ciblait le régime d’Oumar Béchir, il y avait très peu de touristes. Pout 60 $ seulement, j’ai pu louer un bateau et suis allé au lieu où se rencontrent le Nil bleu et le Nil blanc. C’est là que j’ai eu l’impression que j’avais déjà vécu dans ce pays appelé autrefois Kush.
Quand je me suis baigné dans le Nil je me suis vraiment senti chez moi et en paix. J’avais plongé dans plusieurs fleuves, lac et mers mais je n’avais jamais ressenti une telle sérénité. L’eau irriguait chaque cellule de ma peau, de mon corps.  Je pensais que ce voyage n’était pas vraiment un hasard, j’étais attendu ici et on me recevait bien partout. Comme si j’avais toujours été d’ici. J’étais peut-être la réincarnation d’un ancêtre local qui a réussi à m’empêcher d’aller à Kemet (Egypte) pour m’indiquer que mes vraies origines sont ici au Soudan. Aux alentours de la jonction entre les deux Nils.
Un jour, en traversant le Nil Bleu, la pirogue a accosté sur une berge où une femme vendait du follere et du karawo, c’etait comme mon Fuuta Tooro. Mais ce qui m’a frappé ce sont les grandes jarres d’eau, un peu surélevées, qui servaient à désaltérer les passants. L’eau était fraîche avec un bon goût de terre argileuse. J’avais vu ses jarres en rêve, tous les détails m’étaient familiers. Ma venue sur ce lieu précis m’a un peu plus convaincu qu’une réincarnation en pleine conscience était possible. Car à quoi sert de revenir à la vie après la mort sans savoir quel.s ancêtre.s souhaite.nt emprunter notre corps pour y loger son/ses esprit.s?
Ce tourisme à Kush fut un voyage initiatique sur les traces de mon passé le plus lointain pour connaître le point de départ, là où tout est parti. Je continue à avoir des bribes de réponse sur la dynamique des flux migratoires ayant mené les miens du Nil vers la boucle du Niger et, enfin, sur les berges du fleuve Sénégal. Le chemin ILAM (crues), sous la dictée de ilo Yaalalde. La longue odyssée du pulaagu est loin d’être finie.
Si vous faites un rêve, même sans importance, et que vous voyez sa réalisation sous vos yeux au point que vous devinez l’action qui va suivre, vous êtes peut-être la réincarnation d’un ou plusieurs de vos ancêtres. Ça n’est pas sorcier !
Eey Geno!
31 mars 2024
Siree Kuushnaajo Tekruur
Follere : jus de fleur d’hibiscus
Karawo : bouillie avec de petites billes de mil

 

 

(Reçu à Kassataya.com le 31 mars 2024)

 

 

 

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