En déclinant son programme sur deux principaux axes à savoir la question nationale qui passe par le règlement du passif humanitaire et les priorités pour le développement économique du pays, le candidat indépendant Hamedine Moctar Kane s’engage dans un projet de société difficile à mettre en place dans un pays gouverné par des militaires et qui refuse la diversité culturelle.
C’est un ancien cadre issu du premier mouvement de libération africaine de Mauritanie qui brigue aujourd’hui les suffrages en juin prochain. Une candidature indépendante qui risque de faire jaser une partie de l’élite arabo-berbère notamment les nationalistes extrémistes arabes très proches du régime de Ould Ghazouani. Son projet de société qui vise d’abord à régler un vieux problème qui remonte à 1989 avec les déportations de plus de 60000 négro-africains au Sénégal et au Mali dont 20000 sont rentrés officiellement en 2008 sous le régime de Ould Taya et à 1991 avec l’assassinat de 28 soldats négro-africains à la base militaire d’Inal au Nord du pays.
Cette page-là plus sombre de l’histoire est dénommée politiquement « passif humanitaire » qui aboutit depuis à une impasse politique. Le dernier dialogue en 2023 entre l’opposition et le pouvoir est suspendu unilatéralement par Ould Ghazouani pour remettre aux calendes grecques ce dossier brulant de la cohabitation.
Depuis 2020 des tractations secrètes entre les veuves et orphelins et les associations des victimes du passif humanitaire et le pouvoir n’ont pas encore abouti faute de consensus sur la justice transactionnelle qui exclut toute poursuite des présumés criminels mais des compensations financières. L’ex militant des FLAM est conscient que le règlement du passif humanitaire passe par une réconciliation nationale possible seulement par l’abrogation de la loi d’amnistie de 1993 qui protège jusqu’ici les criminels militaires présumés dont en première ligne le président de l’Assemblée nationale actuelle le général retraité Ould Menguet. Pas étonnant que les Mauritaniens se regardent toujours en chien de faïence depuis plus de quatre décennies.
Le candidat indépendant sait que ce dossier épineux est la clé de la réconciliation nationale. C’est un programme qui ne passe pas dans un pays gouverné par des militaires et qui refuse la diversité culturelle. C’est pratiquement le seul point de son programme différent du programme prioritaire de Ould Ghazouani à la fin de son premier mandat. Une similitude avec la lutte contre la pauvreté qui passe d’abord par la lutte contre la corruption qui gangrène la société mauritanienne. Les observateurs ne sont pas dupes que le fossé entre les candidats de la diversité et Ould Ghazouani est grand dans un pays où le problème essentiel n’est pas seulement un problème de développement mais le refus de l’élite arabo-berbère d’assumer l’identité plurielle de la Mauritanie.
Cherif Kane
Coordinateur journaliste
(Reçu à Kassataya.com le 01 mars 2024)
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