Changer de stade, tout un enjeu pour les clubs sportifs s’ils veulent éviter la grogne des supporters

The Conversation Coup de tonnerre dans le monde du football français. Après plusieurs mois de négociations avec la mairie de Paris concernant un éventuel rachat du Parc des Princes, son résident historique, le Paris Saint-Germain annonce quitter son stade de toujours.

Le club, qui souhaitait racheter l’enceinte afin notamment de porter sa capacité de 48 000 à 60 000 places, a vu sa demande rejetée par le Conseil de Paris mardi 6 février et son président Nasser Al-Khelaifi a déclaré à la presse ce jeudi 8 février :

« C’est fini maintenant, on veut bouger du Parc des Princes. »

Une déclaration non sans susciter l’émotion des supporters.

Ce n’est pas non plus sans émotion que les fans du Paris Basket ont, cette semaine, dit « au revoir » et « merci ! » à la Halle Carpentier du 13e arrondissement, salle qu’ils laissent pour la flambant neuve Adidas Arena, Porte de la Chapelle.

Le choix de quitter une infrastructure n’est pas toujours voulu. Cas récent, le 25 décembre dernier, le complexe Sportica, demeure du BCM Gravelines, club de l’élite nationale de basketball, était ravagé par les flammes. Tristes fêtes de fin d’année. Les hommages envers ce qui n’était matériellement qu’une salle de sport ont vite afflué sur la toile, du plus haut sommet de l’État, avec un post sur X d’Amélie Oudéa-Castéra – alors ministre des Sports –, aux anonymes venus afficher leur soutien, habitants de Gravelines, autres clubs sportifs, et même supporters rivaux.

Dans tous les cas le mouvement n’est jamais anodin et différentes parties prenantes, supporters en tête, doivent être accompagnées pour que la transition s’opère au mieux.

« Comme à la maison »

 

Ce qui a pu frapper ces dernières semaines dans les messages liés au Sportica et ces dernières heures au Parc des Princes et à la Halle Carpentier est la dimension quasi humaine qui leur est donnée. L’article paru dans L’Équipe le lendemain de l’incendie à Gravelines est assez éloquent : on y lit ainsi, pêle-mêle, des expressions comme « le mal au cœur »,« un état de choc »,« le choc à peine digéré »,« reconstruction »,« surmonter tout ça ».

Il est vrai que ce complexe, inauguré en 1986 était un lieu de vie qui assurait un lien social indéniable dans cette ville de 12 000 habitants située entre Dunkerque et Calais. Cette petite salle de 3 003 places qui devait faire l’objet d’une modernisation et d’un agrandissement à l’horizon 2027 avait accueilli près d’un millier de matches de Pro A, division que le BCM, marque sportive de premier plan dans le Nord, n’a jamais quittée depuis 1988. Un projet de déménagement vers Dunkerque avait été envisagé il y a quelques années mais le projet était « mort dans l’œuf » tant il avait suscité d’émotions chez les amoureux du club, réticents à abandonner le centre-ville de Gravelines.

La théorie de l’attachement, que nous avons reprise et appliquée au sport dans nos travaux, met l’accent sur le lien affectif et durable qui unit l’enfant avec certaines figures. Par extrapolation, les sciences de gestion s’en sont servi pour explorer d’autres contextes plus éloignés, comme les relations qui unissent les consommateurs aux biens possédés, aux marques ou encore aux lieux de consommation. Plus spécifiquement sur les enceintes sportives, la recherche a montré combien elle contribue à l’expérience sensorielle des spectateurs et participe à l’identification des individus à l’équipe.

Les supporters développent un sentiment de fierté et d’attachement au stade ou au gymnase, notamment lorsque celui-ci revêt une dimension historique. Certaines personnes considèrent les enceintes sportives comme des lieux sacrés et y entrent de manière quasi religieuse. Le stade n’est pas un lieu comme les autres : c’est le symbole le plus durable d’une équipe ou d’un club et même un repère pour la communauté locale. Après tout, ne parle-t-on pas de « match à la maison », de « victoire à domicile » et de « l’avantage de recevoir chez soi » ?

Déménager, c’est reconstruire une identité

 

Construire le lien entre une communauté et un lieu est un processus dynamique : il a un début et une fin. Si l’attachement au lieu se développe lentement, tout peut s’arrêter brutalement et entraîner une longue période pendant laquelle l’individu va essayer de gérer cette perte, de la réparer ou de créer de nouveaux liens d’attachement avec d’autres personnes ou d’autres lieux.

Lire la suite

 

 

 

Professeur Associé et Responsable de la Filière Passion Sport, ESC Clermont Business School

 

 

 

 

Source : The Conversation – (Le 08 février 2024)

 

 

 

 

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page