COMPORTEMENTS SCANDALEUX LORS DES FUNÉRAILLES : Quand les Sénégalais déraillent

Enquête+ On marche sur la tête. De plus en plus, les funérailles, au Sénégal, donnent lieu à des comportements inqualifiables. En effet, il fut un temps où, lorsqu’un décès survenait dans un village, c’était la contrition, le silence pour le respect du défunt et le recueillement. Et dans la maison mortuaire, aucune marmite n’aurait été mis sur le feu, avant l’enterrement. Ce sont les voisins qui préparaient chez eux et apportaient à manger à la famille endeuillée.

Actuellement, on a l’impression que la mort et la douleur de la famille éplorée indiffèrent les gens. Dès que le décès est annoncé, la première préoccupation des gens, en général des femmes, est de se précipiter pour demander quoi préparer pour le déjeuner. Et pour ça, la famille du défunt est dans l’obligation, quel que soit son niveau de vie, de décaisser de l’argent pour faire préparer un bon repas. Pire encore, lorsque le repas est prêt, les voisines, surtout celles qui ont fait la cuisine, emportent des bols remplis de riz chez elles, avant même que les ‘’invités’’ ne soient servis. Il arrive ainsi qu’il n’en reste pas assez pour les personnes présentes.

EnQuête a recueillis quelques témoignages des personnes qui ont perdu des parents ou proches et qui ont vécu cette situation.  « En 2020, lorsque ma grand-mère est décédée, à un certain moment, j’avais l’impression que suis à un mariage et non un décès. Au moment où nous pleurions cette perte, certaines amenaient déjà de grosses marmites pour faire la cuisine. Une de mes voisines m’a demandé d’arrêter de pleurer et venir leur dire ce qu’elles vont préparer et de leur donner de l’argent pour faire des achats. Les gens qui venaient nous présenter leurs condoléances, choisissaient ce qu’on devait leur servir. Certains te disent, ils n’aiment pas le riz à la viande, d’autres avançaient qu’ils ne prenaient pas du café, ainsi de suite. C’est extraordinaire, ce qui se passe, aujourd’hui pendant des décès », confie Bineta Ba.

Pire, poursuit la jeune dame de 35 ans, le troisième jour du décès, c’est-à-dire le jour du sacrifice, « nous étions obligés de préparer trois repas différents. Certaines personnes faisaient même la comparaison, en disant que tel plat est plus délicieux que l’autre ». Dans la même veine, se souvient la jeune dame, le jour du décès, son père avait égorgé un bœuf et un mouton, mais les voisins avaient emporté presque toute la viande. « Nous étions dans l’émoi et la tristesse. On n’avait pas le temps de contrôler quoique ce soit. Mais à notre grande surprise, à l’heure du déjeuner, beaucoup de nos invités ont mangé du riz sans viande, car il n’y avait plus de viande dans les marmites », raconte-t-elle.

Embouchant la même trompette, une autre mère de famille de 75 ans, Aïssatou Wade, confie : « J’ai perdu mon fils cadet, il y a de cela un mois. Mes parents sont venus dans de diverses localités pour me présenter leurs condoléances. Même s’ils n’ont rien apporté pour me soutenir financièrement, mais leur présence m’a quand-même apporté du bien, pendant cette période cruciale de ma vie ». Mais, poursuit-elle, cette épisode douloureuse a grevé son budget, car, de plus en plus, quand il y a décès, les parents, venant des villes ou villages un peu éloignés, restent la plupart quelques jours avant de repartir. « Certains de mes parents sont restés trois jours, d’autres une semaine où plus, avant de retourner dans leurs villages respectifs. Donc, j’étais obligée de préparer tous les jours un petit-déjeuner, un repas et un dîner, malgré ma situation financière qui fait défaut », narre-t-elle.

La question du transport

Au-delà de la prise en charge des invités, lorsqu’elles vont rentrer, un autre problème va se surgir. C’est-à-dire, chacune d’entre-elles attend de la famille une somme pour les besoins du transport retour.  « Actuellement, surtout chez nous, les ‘’niégnos’’ (caste des bijoutiers), comme dans les autres cérémonies, pour les décès aussi, lorsque les invités vont rentrer, on doit donner à chacune de l’argent pour les frais de son transport. J’avais remis des sommes de 5 000, 10 000 f CFA ou plus par personne. Car certains rentrent loin. Malheureusement, malgré les efforts que j’ai faits, certaines d’entre-elles avaient même sous-estimé ou minimisé ce que je leur avais donné », fait savoir la mère de famille.

‘’Ce qui est le plus désolant dans tout ça, regrette-t-elle, ‘’c’est qu’ils savent tous que je n’ai pas de moyens. Aujourd’hui, nous voilà, mes enfants et moi les mains vides. Ma fille a même des problèmes de transport pour pouvoir se rendre dans son lieu de travail ».

Les vols, lors des funérailles

Dans le même ordre d’idées, mère Guéwel, Amina Fall de son vrai nom, renseigne, de son côté, que dans son quartier, lorsqu’il y a un décès, toutes les maisons environnantes ne préparent de déjeuner ni de dîner. « Chaque femme, participant où pas à la cuisine, apporte son bol, lorsque le repas est servi. Elles n’ont même pas de vergogne par rapport à cela. La semaine dernière seulement, deux vieilles dames se sont chamaillées, lors de funérailles, à cause de la viande. Et malheureusement, ce n’est pas la première fois que cela arrivait », se désole la vieille maman.

Mais, sûrement, ce qui est le plus choquant, ce les vols de matériels qui sont notés, lors de événements malheureux. « Certaines personnes viennent aux funérailles et se permettent de voler. Lorsque mon frère aîné est décédé, cette année, ils ont volé toutes les cuillères, les petites assiettes et bouilloires qu’on avait achetées. Il y a quelqu’un même qui est allé jusqu’à voler ma bouteille de gaz butane », raconte Anta Ndiongue, une jeune dame dans la trentaine.

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FATIMA ZAHRA DIALLO

Source : Enquête+ (Sénégal)

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