En Guinée, le combat d’Oumou Hawa Diallo pour reboiser le « poumon vert » de Conakry

Agée de 24 ans, la militante écologiste œuvre pour la résurrection de la forêt de Kakimbo, et plus largement pour la « conscientisation des Guinéens » aux enjeux environnementaux.

Le Monde – La forêt de Kakimbo suffoque. L’ancien poumon vert de Conakry est nécrosé par l’urbanisation sauvage et massive de la capitale guinéenne. Rongé par la pollution, il n’occupe plus qu’une dizaine d’hectares, soit 10 % de ce qu’il était il y a cinquante ans. Un grand corps malade qu’Oumou Hawa Diallo, 24 ans, veut ranimer.

La militante environnementale nous amène au pied d’un mur de soutènement surplombant le lit quasiment asséché d’un cours d’eau. « Avant, les anciens venaient se baigner là », contemple la jeune femme. Les racines des arbres sont entremêlées à des sacs de plastique charriés, les jours de grandes pluies, par des conduites d’eau qui débordent depuis les quartiers situés au-dessus de la forêt. « C’est un combat permanent que d’essayer de sauvegarder ce qui reste de cet espace », dit-elle.

Les abords du lieu donnent une idée immédiate des dangers qui le menacent. Le quartier de Koloma est un vaste chantier. La Transversale numéro 2 coupe la péninsule dans sa largeur, de l’aéroport international Sékou-Touré, au sud, jusqu’à la corniche nord longeant l’océan Atlantique. Le long de la forêt, les pelleteuses creusent les fondations de la future Assemblée nationale et de quelques ministères.

Il y a quelques années, une gigantesque ambassade des Etats-Unis a été érigée dans ce voisinage, empiétant sur la forêt. Puis les Chinois ont dressé la résidence hôtelière Weily Kakimbo, deux tours jumelles de 27 étages et 220 appartements « de haut standing », vante le site Internet. Un complexe qui, par une conduite ouverte dans un mur de soutènement, déverse certaines de ses eaux usées et du sable par kilos dans le lit asséché de cette rivière qui autrefois irriguait généreusement la forêt de Kakimbo, désormais moribonde.

 

Spéculation foncière

 

« Le président de la transition [le colonel Mamadi Doumbouya, chef de la junte qui a pris le pouvoir par la force en septembre 2021] a promis dans ses discours de protéger l’environnement. C’est encourageant, mais restons vigilants », avertit Oumou Hawa Diallo. Il n’est pas simple de juguler la spéculation foncière dans cette ville placée sous une pression démographique intense.

Ce combat pour la résurrection de la forêt, la jeune femme, chargée du développement numérique d’une entreprise présente notamment dans l’écotourisme après un diplôme d’informaticienne, le mène depuis 2018 au sein de l’association Agir contre le réchauffement climatique (Acorec), qu’elle a cofondée. Quand on lui demande ce qui l’a décidée à prendre les armes, Oumou Hawa Diallo plonge dans ses souvenirs d’enfance : « J’ai grandi dans une maison pleine de plantes et de fleurs qu’on traitait comme des bébés, comme des membres de la famille. Et puis au village, on a commencé à voir les effets du réchauffement climatique, les marigots s’assécher, les rivières se tarir. Ça a germé comme ça dans ma tête. »

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Source : Le Monde  – (Le 25 mai 2023)

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