Le Kenya, nouveau vivier pour les géants de la tech

Dans cette « start-up nation » africaine où les jeunes diplômés sont déjà courtisés par les Gafam, le gouvernement a imposé l’apprentissage des bases du codage informatique dès l’école primaire.

Le Monde – C’est un cours particulier d’un genre nouveau, avec écrans tactiles et lignes de code. Il a beau se dérouler un samedi matin, qui plus est pendant les vacances scolaires, les enfants qui y participent ne rechignent pas. Bien au contraire. Elsie, 11 ans, et ses cinq camarades codent un film d’animation. La semaine prochaine, ils apprendront à créer une application mobile pour signaler les violences domestiques. Celle d’après, ils produiront un jeu vidéo d’hélicoptère.

L’atelier est l’œuvre de STEM Impact, un laboratoire numérique et incubateur comme Nairobi en compte tant, qui enseigne les technologies de l’information et de la communication (TIC) dans les écoles primaires. « C’est moi qui ai demandé à mes parents de m’y inscrire, dit Elsie, les yeux rivés sur l’écran. J’utilise un peu l’ordinateur à l’école, mais juste pour du traitement de texte. Je voulais en savoir plus. » A la maison, la geek en herbe apprend le français sur sa tablette.

Le Kenya, surnommé la « Silicon Savannah » en raison de son écosystème technologique florissant, entend désormais parier sur de jeunes talents comme Elsie pour s’affirmer sur la scène internationale. Avant-gardiste, le gouvernement a imposé l’apprentissage des bases du codage informatique à l’école primaire dès cette année, espérant ainsi créer le vivier high-tech de demain.

 

« Nous voulons que le Kenya fasse partie des pays d’où on peut avoir un télétravail d’une manière professionnelle », a déclaré le président William Ruto lors du sommet Jamhuri Tech and Innovation, le 11 décembre 2022. Le lendemain, à l’occasion du « Jamhuri Day » – la fête nationale, cette année savamment rebaptisée « Jamhuri Innovation » pour placer la célébration sous le signe des TIC –, il s’exclamait : « Je suis impressionné par les opportunités de monétisation numérique et de télétravail. C’est l’avenir ! »

 

Le QG africain des Gafam

 

De quoi transformer la Silicon Savannah en un Bangalore africain, une technopole mondiale ? Le Kenya émerge déjà comme une « success story » high-tech. La locomotive économique de l’Afrique de l’Est fait partie des quatre pays (avec l’Egypte, le Nigeria et l’Afrique du Sud) vers lesquels se dirigent près de 90 % des investissements technologiques sur le continent. Mieux, les grandes entreprises du secteur telles que Google, Microsoft ou Amazon ont toutes choisi Nairobi pour y implanter leur quartier général africain, avec dans leurs valises des infrastructures et des incubateurs.

 

La « start-up nation » africaine n’a pas attendu les Gafam pour investir dans la « tech ». En témoigne l’essor précoce de M-Pesa, le système de microfinance et de paiement mobile, que près de 60 % des Kényans utilisent. Le géant des télécoms Safaricom fait quant à lui figure de porte-étendard de la réussite du pays et étend ses services à toute la région. « Nous avons une importante main-d’œuvre numérique, affirme Alex Magu, président de STEM Impact, qui fait découvrir les rudiments de l’informatique et de la robotique dans 500 écoles du pays. En plus, nous sommes hautement qualifiés et nous n’avons aucun problème avec l’anglais. »

 

« Nous n’avions pas d’ordinateurs à l’école ou à la maison, j’ai tout appris sur des sites et sur YouTube », raconte l’analyste de données Bravin Mugangasia

 

Bravin Mugangasia symbolise ce Kenya débrouillard parti à la conquête du monde numérique. A 28 ans, cet autodidacte du clavier travaille à distance en tant qu’analyste de données pour Frontier, une entreprise de logistique basée au Texas. Depuis son salon de Nairobi, il gagne « quatre fois plus » qu’à un poste équivalent dans une entreprise locale. Il a pour la première fois touché un ordinateur à l’université, se battant parfois avec les autres étudiants pour obtenir une heure devant la machine. « Nous n’avions pas d’ordinateurs à l’école ni la maison, raconte ce natif de Vihiga (ouest). J’ai tout appris sur des sites et sur YouTube. » Tout, c’est-à-dire l’analyse de données, le code source, le développement Web ainsi que les techniques d’animation.

 

« Il y a trop d’opportunités »

 

A l’étranger, l’appétit existe déjà pour les talents numériques kényans comme Bravin Mugangasia. Il suffit de se rendre sur les sites Internet des agences de coopération européennes pour s’en apercevoir. Les mérites kényans – niveau d’éducation, maîtrise de l’anglais, créativité – y sont vantés dans les grandes largeurs.

Lire la suite

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Le Monde

 

 

 

 

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page