Mauritanie : au-delà de la querelle sémantique entre concertation nationale et dialogue national

Dans la perspective de la concertation nationale approuvée par le président mauritanien et dont la date officielle n’est pas encore fixée, les observateurs reviennent sur les deux tendances qui semblent s’affronter sur la scène nationale.

La première tendance est sous la houlette du pouvoir représenté par la coordination des parlementaires et des partis de l’opposition démocratique ainsi que l’UPR. Cette coalition politique met en avant une feuille de route pour une concertation nationale en plusieurs étapes dont l’objectif est d’arriver à un consensus sur les questions d’intérêt national. Ould Ghazouani entend tirer des leçons d’une décennie d’autoritarisme du régime de Ould Aziz qui a imposé des réformes constitutionnelles et bafoué les libertés et la citoyenneté. Sa normalisation des relations avec l’opposition et les autres partis du pays est considérée comme un premier vers l’apaisement politique et une chance pour nouer le dialogue politique auquel l’opposition aspire depuis la constitution de 1991 qui reconnaît le multipartisme.

La Mauritanie qui traverse toujours une crise politique en sourdine née des évènements de 89 au cours desquels plus de 600000 négro-mauritaniens de la vallée ont été déportés vers le Sénégal et le Mali. 20 000 réfugiés du Sénégal sont rentrés officiellement en 2008 et près de 15000 au Sénégal et au Mali attendent toujours leur retour dans des conditions difficiles dans des camps de fortune. Et l’histoire retiendra encore une autre page sombre qui est loin d’être tournée avec l’assassinat de 28 soldats négro-mauritaniens en 1991 à Inal au Nord du pays.

Des exactions qui s’inscrivent dans le cadre de la politique d’épuration ethnique du génocidaire Ould Taya. Les veuves et orphelins attendent toujours les corps pour des sépultures dignes. Ces deux plaies des Mauritaniens sont loin d’être cicatrisées parce que les pouvoirs successifs depuis la chute de Ould  Taya en 2005, ont tourné le dos à la réconciliation nationale qui passe par le règlement du passif humanitaire. Un point cardinal pour l’opposition contre le système symbolisée par l’AJD-MR, les FPC, TPMN, la CVE et le premier parti de l’opposition TAWASSOUL.

Ces partis sont rejoints par l’APP dont le président qualifié par les observateurs d’opportuniste veut négocier pour la seconde fois avec Ould Ghazouani. C’est la deuxième tendance qui appelle de tous ses vœux à un dialogue national pour résoudre les vrais problèmes du pays qui tournent essentiellement sur un retour d’un Etat de droit contre l’impunité, un État égalitaire qui passe des réformes de l’éducation nationale, de l’administration, une nouvelle politique agricole du Sud qui rejette l’accaparement des terres de la vallée au profit des investisseurs étrangers, une gouvernance démocratique qui passe par la révision du système électoral.

Au-delà de cette querelle sémantique, c’est le principal enjeu de la prochaine concertation qui est pointée du doigt par les observateurs qui pointent la nécessité de l’opposition radicale de participer aux assises pour faire entendre sa voix et sa différence sur les questions qui fâchent. C’est une opportunité politique malgré une feuille de route imparfaite et à laquelle elle n’a pas élaboré. Une chance pour une alternance démocratique apaisée à laquelle aspire les Mauritaniens depuis 1978. Elle doit saisir cette occasion pour apporter sa contribution à la question nationale, la cohabitation.

 

 

 

 

 

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

 

 

 

 

 

 

(Reçu à Kassataya.com le 27 août  2021)

 

 

 

 

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