Brahim Boihy : « Les mauritaniens bi ou multinationaux ne demandent ni plus ni moins que les droits civiques et civils garantis à tous leurs concitoyens… »

Le gouvernement de la République Islamique de Mauritanie vient d’adopter un projet de loi portant modification de certaines dispositions de la loi 61-112 du 12 juin 1961 qui consacrait la perte automatique de la nationalité mauritanienne en cas d’acquisition d’une autre nationalité.

Cette loi fut aménagée en 2010 pour instaurer le principe de la double nationalité, accordée par le Président de la République à la demande de l’intéressé. Le projet de loi adopté récemment en Conseil des Ministres consacre l’automaticité de la conservation de la nationalité mauritanienne.

Mais il introduit de nouvelles restrictions, l’incompatibilité avec les fonctions régaliennes notamment, et la possibilité d’étendre ultérieurement par décret la liste des restrictions. L’égalité des citoyens s’en trouve questionnée. Dans sa note introductive du projet de loi, le Premier Ministre semble s’adresser principalement, pour ne pas dire uniquement, à la diaspora. Où en est-on de la première qualité d’une loi, sa généralité? Et pourquoi ce n’est pas le ministre en charge de la diaspora qui porte cette loi ? Il faut rappeler que tous les mauritaniens de la diaspora n’ont pas d’autres nationalités que la mauritanienne. Il faut y ajouter qu’à l’intérieur de la Mauritanie, ils ne sont pas peu nombreux, les mauritaniens qui justifient de plusieurs nationalités.

Qu’ils soient de l’intérieur ou de la diaspora, les mauritaniens bi ou multinationaux ne demandent ni plus ni moins que les droits civiques et civils garantis à tous leurs concitoyens, notamment celui d’aller et venir. Le projet de loi aurait dû se limiter à ça.

Quant à l’accessibilité aux hautes fonctions et emplois, était-il judicieux qu’elle releva de la loi ? De moins point de vue, il aurait été plus judicieux et plus efficace (i) de définir le profil et caractéristiques de chaque fonction : tous ministères, hautes administrations et entreprises d’Etat, forces armées et de sécurité, toutes fonctions de responsabilité, etc; (ii) définir les compétences et profils techniques et psycho-techniques dont doivent justifier les cadres susceptibles d’occuper ces fonctions, ainsi que des procédures de sélection ; (iii) mettre en action, et de manière systématique, des enquêtes de moralité et de compatibilité des personnes considérées avec les exigences sécuritaires et stratégiques de la fonction à occuper.

Ainsi, on se donnerait les meilleures chances d’avoir la femme ou l’homme qu’il faut, à la place qu’il faut. La transparence et la rigueur dans l’exécution de telles procédures permettrait de garantir à la loi sa deuxième caractéristique : la loi doit rester générale et impersonnelle.

 

 

 

 

 

Brahim Boihy

25/06/2021

 

 

 

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