Le danseur et chorégraphe Ousmane Sy est mort

Co-directeur du Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne, il avait apporté au mouvement hip-hop son tempérament joyeux et rassembleur. Il est mort à 45 ans d’une crise cardiaque.

Chaleur immédiate, disponibilité sans artifice, envie de partager. Le danseur et chorégraphe hip-hop Ousmane Sy, dit « Babson », générait quoi qu’il fasse des ondes positives et apaisantes. En tête-à-tête comme en public. Personnalité phare de la communauté hip-hop et de la scène du spectacle vivant, co-directeur du Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne depuis 2019, Ousmane Sy est mort d’une crise cardiaque, dans la nuit du 26 au 27 décembre, à Antony (Hauts-de-Seine) où il a grandi. Il avait 45 ans, était marié avec Mayaka Bamba : ils étaient les parents d’une petite fille Neïla, 4 ans, et attendaient leur second enfant.

Ousmane Sy est né le 30 septembre 1975, à Paris. Chaque année, jusqu’à l’âge de 16 ans, il passe ses vacances d’été au Mali, le pays de ses parents, où il pratique les danses traditionnelles ; un apprentissage qui sculpte son style de l’intérieur. Parallèlement, il se distingue aussi dans le foot. Il a 16 ans lorsqu’il découvre le hip-hop et bascule peu à peu dans une nouvelle ère où le « fighting spirit » du sport innerve la quête de dépassement et de virtuosité. Dans les années 1990, il plonge dans l’ambiance des clubs parisiens, dont celle du Queen, où il développe sa passion pour la musique house, qu’il va nourrir ensuite aux Etats-Unis. Il devient la figure majeure de la House Dance, enracinée et aérienne, dans laquelle il injecte l’esprit du battle hip-hop et qu’il muscle par les influences africaines. « Inspire-toi de tout le monde pour ne ressembler à personne », disait-il.

Emporté par le souffle du mouvement hip-hop, Ousmane Sy bondit sur tous les fronts : spectacles, cours, battles, soirées… Avoir la chance de le voir en action, le 19 septembre 2020, en MC (maître de cérémonie), lors du battle organisé par Chaillot-Théâtre national de la danse et sa plate-forme All4House, donnait une idée de son tempérament joyeux et rassembleur. « Symboliquement, ce moment a été très fort, car on y retrouvait ce qu’il défendait de façon foisonnante : une seule musique, la House, et plein de techniques chorégraphiques différentes dessus, déclare Chloé Le Nôtre, directrice de l’auditorium Seynod, à Annecy, qui le suivait depuis 2003. Il a fait le lien sans compromis entre l’underground hip-hop et l’institution. Le voir dans ce haut lieu de la danse qu’est Chaillot était important. »

 

Premiers pas professionnels à Suresnes

 

Plus récemment, mardi 22 décembre, à La Villette, qui a soutenu son travail depuis 1996, il apparaissait tranquillement concentré lors des répétitions de One Shot, sa nouvelle et cinquième pièce pour les danseuses du groupe Paradox-Sal, qu’il avait fondé en 2012. « Il revendiquait le plaisir de la danse avant tout, commente Céline Gallet, co-directrice du CCN de Rennes et Bretagne. Le niveau d’exigence technique énorme ne devait jamais empêcher selon lui la générosité et la simplicité du partage avec le public. » One Shot, annoncé le 7 janvier 2021 en ouverture du festival Suresnes Cités danse, sera filmé à huis clos et retransmis.

C’est dans le cadre du festival suresnois qu’il signe en 1999 son premier contrat professionnel dans le spectacle Macadam, Macadam, de Blanca Li. « C’est un frère de cœur pour moi, dit Olivier Meyer, directeur du Théâtre de Suresnes. Il a été très important pour la manifestation comme la manifestation l’a été pour lui. » Déjà repéré depuis 1993 comme membre du fameux collectif hip-hop Wanted Posse, fondé par ses amis dont Ahmada Bahassane, Ousmane Sy y défend l’idée que « devenir fort ensemble crée une cohésion différente ». En 2001, il décroche le titre de champion du « Battle of the Year » avec Wanted Posse, qui sera en vedette dans la finale de l’émission de M6 « La France a un incroyable talent », en 2013, l’année même des 20 ans du groupe.

Ousmane Sy, quatre fois vainqueur de la compétition Juste Debout entre 2003 et 2012, accueille et forme les jeunes dans le groupe intergénérationnel Serial Stepperz, créé avec son complice de la première heure, le danseur Yugson, en 2007. « C’était un mentor, un grand frère, un éducateur qui a m’a ouvert de nombreuses portes comme danseur et professeur, confie son ami Kapela, de Wanted Posse et Serial Stepperz. Je me souviens toujours de sa philosophie :Va, vis et deviens, mais n’oublie jamais d’où tu viens et les personnes qui étaient là lorsque tu n’étais rien.” »

Rosita Boisseau

Source : Le Monde

 

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