« Système beydane », une notion qui fait débat

Tous les mouvements historiques ont dû affronter un jour un passé que leur repositionnement ou les circonstances ont rendu caduc. « Caduc », est le mot inspiré en mai 1989 par François Mitterrand à Yasser Arafat pour qualifier certains articles de la Charte nationale palestinienne relatifs à l’existence d’Israël. (Un mot qui, au passage, évoque quelques souvenirs à des Mauritaniens d’une certaine génération). Nelson Mandela qui fit une apparition remarquée dans Malcolm X de Spike Lee aurait refusé de reprendre à son compte le fameux « by any means » du leader noir américain. On est en 1992. Mandela est conscient des réserves que suscite, malgré sa dissolution,Umkhonto Wa Sizwe, la branche armée de l’ANC.


La notion de « Système beydane » appartient au lexique des Flam qui, d’ailleurs, en usent de moins en moins. Elle fait débat. En témoignent les vifs et récents échanges sur le site du mouvement. On notera au passage que les administrateurs du site ont laissé en ligne des propos extrêmement virulents voire insultants contre leur mouvement. C’est là un signe d’ouverture qu’il faut saluer.

Les Flam ont parfaitement conscience de la charge polémique que recèle la notion. Un de leurs textes donne à lire: « L’introduction du concept de système beydane dans notre discours politique a suscité beaucoup de polémique. Cela nous a valu des invectives de tous ordres, la foudre de nos adversaires et suscité l’indignation chez les autres ». Les rédacteurs du texte s’emploient ensuite à définir le concept: « En vérité, par Système « beydane », nous entendions un certain nombre de mécanismes dont l’action conjuguée vise à l’exclusion du Noir mauritanien de toute la vie publique en consacrant l’hégémonie politique, économique et culturelle des Arabo-berbères (…). Il est l’équivalent de racisme d’Etat ».


Les Flam ont beau préciser: « ce qui est incriminé, c’est le système raciste, c’est l’Etat raciste, et non les Beydanes en tant que communauté », la notion demeure irrecevable aux yeux de certains. Et pas que des partisans du « système ». La principale raison en est qu’à première vue, elle semble associer une composante dans sa totalité à un système politique. Ne soyons pas naïfs. Cette incertitude apparente est aussi exploitée à des fins de diabolisation. De bonne guerre dira-t-on.L’honnêteté commande d’éviter tout anachronisme. Il convient de ne pas regarder la réalité d’hier avec les lunettes d’aujourd’hui.

Tout texte porte les empreintes de son contexte. Pour autant, au moment même où ce mouvement opère un repositionnement évident, frappe les esprits par sa proposition de grande concertation nationale inclusive, inspire des démarches innovantes et retrouve sa centralité dans le débat public, les Flam gagneraient à revisiter une notion qui, malgré les précautions et les précisions, continue de susciter des réserves. On appelle cela un aggiornamento. Ce serait une manière de déjouer l’esprit de système.

Tijane Bal

Facebook – Le 31 juillet 2019

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