Notre opposition radicale vient de rater par sa cécité politique persévérante deux grandes occasions historiques.
Elle a d’abord refusé la participation au dialogue inclusif, parce qu’elle n’est pas parvenue à se départir de cette conception politique étroite et irrationnelle de la dualité absolue et manichéenne entre pouvoir et opposition. Elle n’a pas pu non plus dépasser la face sombre de l’intérêt égoïste de la politique qui oublie l’essentiel pour le particulier, qui fait du particulier l’essentiel, qui aplatit et rétrécit les vues, qui en appauvrit le sens, qui éloigne des intérêts suprêmes du pays.
Elle a ensuite raté le coche en ignorant, méprisant, et rejetant d’un revers de main la portée et l’importance des résultats historiques du dialogue national inclusif, qui ont pourtant embrassé tous les problèmes de la Mauritanie actuelle ; pour se retrouver aujourd’hui en porte à faux avec le point de vue du peuple mauritanien pour qui, ces résultats constituent une étape historique importante dans la vie de la nation.
Deux positions qui disent long sur les paradoxes saisissants dans lesquels elle se fourvoie structurellement depuis sa création.
En effet, comment peut-on se prévaloir d’oripeaux démocratiques et refuser du même coup le dialogue sans sujet tabou, ce « faire ensemble démocratique », ce rapport fructueux avec les autres pour une dimension plus globale : le bien commun.
N’a-t-elle pas aussi clamé à cor et à cri sa ferme opposition et son refus absolu d’un troisième mandat pour le président Aziz ? Pourquoi, et pour rester conséquente avec cette revendication tant galvaudée, n’a-t-elle pas apprécié à sa juste valeur la déclaration solennelle et sans ambages faite par le président de la république de ne pas briguer un troisième mandat, respectant ainsi scrupuleusement la constitution en vigueur ?
Pourquoi ne pas noter avec satisfaction les amendements à la constitution proposés par le dialogue qui vont tous dans le sens du renforcement de l’état de droit, de la justice, de l’égalité entre les citoyens, du renforcement de l’unité nationale, de la démocratie et de l’alternance pacifique du pouvoir.
Pourquoi enfin ne pas être digne et honorée que la Mauritanie, à travers cette décision historique du président Aziz, donne aujourd’hui une leçon poignante de démocratie et de culture démocratique du pouvoir pour les mondes arabo-musulman et africain ; confirmant du même coup que la culture islamique, contrairement à une campagne d’islamophobie ethnocentriste en vogue, n’est pas le terreau du pouvoir personnel, ni incompatible avec la démocratie , ni avec l’alternance pacifique du pouvoir.
Au lieu de ces paradoxes déroutants, les mauritaniens s’attendaient à des réponses à la mesure des résultats historiques crées par le dialogue, c’est-à-dire une nouvelle attitude de l’opposition radicale empreinte d’objectivité politique, d’honnêteté intellectuelle et de souci patriotique ; des réponses qui réparent ses erreurs d’analyse et d’appréciation politiques et qui préparent à une page nouvelle tournée vers l’avenir avec la participation active et effective de tout le monde.
Car pour les mauritaniens, les grands partis et les grandes personnalités politiques doivent s’attacher aux intérêts nationaux plus qu’aux intérêts particuliers et personnels ; au combat d’idées et non au débat de caniveaux ; au raisonnement analytique toujours lucide et froid dans l’observation et l’explication des événements politiques, au lieu de la passion, de la haine et des idées préconçues.
Malheureusement, Ils ont constaté que cette opposition radicale, telle l’écrevisse, qu’on peut lui proposer d’adopter comme symbole, avance politiquement à « reculons », comme le confirme éloquemment son discours tenu lors de leur marche du 29 Octobre 2016 ; qu’elle reste arc-boutée sur la même vision dogmatique, lovée dans les mêmes idées dépassées et anachroniques, entonnant les mêmes discours cacophoniques, et impassible, comme les enfants de la grotte de Platon, à la grande dynamique de changement enclenchée autour d’eux. C’est là le signe qui ne trompe : son pronostic vital est engagé comme disent les médecins pour les malades en phase terminale. Qui se plaindrait ?
Docteur Abdallahi Ould Nem
(Reçu à Kassataya le 30 octobre 2016)
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