L’ex-général de l’armée semble avoir pris goût au pouvoir qu’il exerce depuis 2008. En uniforme, puis en costume. Pas facile de l’en déloger.
Le président sortant de la Mauritanie, Mohamed Ould Abdel Aziz, au pouvoir depuis 2008, est reparti, hier, à la conquête d’un autre mandat. L’ancien général de l’armée semble prendre un goût immodéré au pouvoir qu’il exerce sous un «uniforme» civil.
Et c’est face à des candidats-lièvres que Mohamed Ould Abdel Aziz, concourra en l’absence des prétendants de l’opposition qui boycottent le scrutin. Comme partout ailleurs en Afrique où le candidat du régime est assuré de gagner, la campagne électorale, qui a commencé hier en prévision de la présidentielle du 21 de ce mois, s’annonce sur un ton monocorde. Grand favori, le chef de l’Etat s’est rendu, hier, dans le sud de la Mauritanie, à Kaédi, où il s’est autoglorifié des «pas de géant» accomplis par son pays sous sa conduite «éclairée», notamment dans les domaines de la sécurité et de l’économie.
Ce qui n’est pas tout à fait faux, soit dit en passant, puisque depuis son élection après son coup d’Etat de 2008, Abdel Aziz a pu chasser Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi) de la Mauritanie, où elle commettait des attentats et enlèvements. De ce point de vue, l’évolution est incontestable par rapport à la situation sécuritaire dans les autres pays de la bande sahélo-saharienne. Les observateurs constatent que ce pays désertique est davantage un havre de paix qu’un repaire de terroristes d’Aqmi.
A l’actif du président Aziz, on cite notamment les raids préventifs effectués, entre 2010 et 2011, contre des bases et des unités combattantes d’Aqmi dans le nord du Mali, d’où la branche maghrébine d’Al Qaîda préparait et lançait ses actions en territoire mauritanien.
Un général qui a fait ses preuves contre AQMI
Avec l’Algérie, qui refuse le principe de l’octroi de rançons aux groupes armés, la Mauritanie de Abdel Aziz est apparue comme un acteur important dans la lutte contre le terrorisme au Sahel et au Sahara. «Le premier point sur lequel le succès de Aziz est indéniable est bien celui de la sécurité et la stabilité du pays avec l’éloignement du spectre de la menace terroriste», reconnaît ainsi Mohamed Fall Ould Oumeire, analyste politique et directeur du journal La Tribune, interrogé par l’AFP.
Aussi, le chef de l’Etat mauritanien, également président en exercice de l’Union africaine (UA), reste «très impliqué» dans la résolution du conflit au Mali où, le 23 mai, il a réussi à arracher un cessez-le-feu entre la rébellion touareg et l’armée, après une brusque reprise des hostilités à Kidal, dans le nord-est du Mali. C’est dire que d’un point de vue stratégique, Abdel Aziz joue un rôle crucial dans la géopolitique de la sous-région du Sahel où le Mali, le Niger et le Burkina Faso affichent une pâle figure en raison, entre autres, des conflits internes, du manque de moyens et de la pauvreté.
Une «mascarade», selon l’opposition
Aussi, Abdel Aziz brandit-il quelques «exploits» économiques non négligeables pour un vaste pays désertique de seulement 3,8 millions d’habitants. Le président sortant se targue d’avoir atteint un taux de croissance de 6% en 2013 et fait baisser l’inflation à moins de 5%.
Mais comme souvent en ces contrées d’Afrique, l’autoritarisme est érigé en religion d’Etat. Et Abdel Aziz n’échappe pas à cette image d’autocrate qui s’accroche au pouvoir par la force et l’argent. En l’occurrence, l’opposition en Mauritanie a disqualifié ce scrutin qu’elle qualifie de «mascarade électorale», organisée de manière «unilatérale». Autour du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU, opposition radicale), des milliers de sympathisants ont manifesté, mercredi dernier à Nouakchott, contre la tenue de l’élection et pour dénoncer «le pouvoir militaire» de l’ex-général Aziz.
Le FNDU, qui mise sur un fort taux d’abstention, regroupe les dix partis de la Coordination de l’opposition démocratique (COD), le parti islamiste Tewassoul (16 députés à l’Assemblée nationale), des personnalités indépendantes, des syndicats et des organisations de la société civile. Mais Abdel Aziz pourra compter sur quatre candidats-lièvres pour crédibiliser son succès évident, dont une femme de 57 ans, Mint Moulaye Idriss, qui donnera une touche «moderniste» à une élection typiquement «africaine».
Hassan Moali
Source : El Watan
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com