Aziz « Show » : Une 3ème édition décentralisée

(Archives. Crédit photo : anonyme)

L’Union Pour la République (UPR) et les armées de partis, mouvements et initiatives favorables au président Mohamed Ould Abdel Aziz s’activent comme des diables pour préparer la 3ème édition du « Aziz Show ».

Il s’agit d’un exercice radiotélévisé, devenu un rituel intitulé « Rencontre avec le Peuple « , au cours duquel le Président Mohamed Ould Abdel Aziz devra répondre à temps réel, à toutes les questions posées par des citoyens issus des treize régions du pays et quelques journalistes. Mais contrairement aux deux précédentes éditions qui se sont déroulées à Nouakchott, le prochain « Show » aura pour cadre la ville d’Atar.

A l’occasion du 3ème anniversaire de son accession au pouvoir, le président Mohamed Ould Abdel Aziz s’apprête à animer une nouvelle édition « Rencontre avec le Peuple ». Ce sera probablement entre le 5 et le 6 août 2012. Cette fois, sous le signe de la décentralisation, la ville d’Atar ayant été choisie pour abriter l’évènement. Déjà, le parti-Etat, l’UPR, a mis en place une commission d’organisation, notifiée par son président Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine, comprenant des élus et cadres de la région de l’Adrar ainsi que des personnalités clés du parti.

La commission d’organisation est présidée par Dr.Mohamed Mokhtar Ould Sidi Mohamed, membre du Bureau exécutif de l’UPR et comprend une quarantaine de membres, avec des sous commissions départementales à Aoujeft, Ouadane et chinguitty.

Parallèlement, des dizaines de partis satellites, des centaines de mouvements et initiatives favorables au programme de Mohamed Ould Abdel Aziz, se préparent activement de leur côté pour s’arrimer à cette manifestation pour laquelle un budget consistant sera certainement ficelé. Une démonstration de prestige qui exige logiquement des dépenses de prestige.

La question du thème central de cette troisième édition reste posée si l’on sait que la « Croisade antiterroriste  » avait dominé les débats lors du « Aziz Show  » de 2011. En effet, au cours de cette émission organisée au Palais des Congrès de Nouakchott, devant un parterre de plus d’un millier d’invités, le président Mohamed Ould Abdel Aziz avait abordé plusieurs questions liées à la vie politique, économique et sociale du pays, avec un accent particulier donné à la sécurité. Le dialogue national inclusif avec l’opposition fut également un des points saillants de ce « Grand Oral » radiotélévisé. Si au cours de l’édition 2011, il fut beaucoup question de coordination régionale contre le terrorisme, notamment entre l’Algérie, le Mali, le Niger et la Mauritanie, cette année, le Mali risque d’être la vedette des débats. Cette question intéresse d’autant plus les Mauritaniens que le Mali constitue pour eux une projection affective et religieuse. Le Nord Mali est en effet un prolongement culturel de la Mauritanie avec ses Arabes, ses Maures et ses « Brabiches », mais aussi un prolongement religieux avec cet Islam rigoriste appliqué par les Islamistes dits radicaux et dont la philosophie est tacitement partagée en Mauritanie. D’où le silence total des érudits mauritaniens sur ce qui se passe dans ce Nord Mali. Depuis le début de l’application de la Chari’a et la destruction des mausolées, aucune voie autorisée sur le plan religieux ne s’est en effet élevé pour condamner.

Seulement, l’autosatisfaction de Mohamed Ould Abdel Aziz lorsqu’il soutint en 2011 que « la situation sécuritaire est maîtrisée », et donc sous contrôle, risque d’être battue en brèche par l’évolution de la situation sur le terrain. En 2011, Aqmi et les bandes islamistes étaient éparpillées dans un no man’s land, aujourd’hui, ils ont fondé une Nation, avec un vaste territoire, des régions et une population.

L’édition 2012 de « Rencontre avec le Peuple  » sera certainement dominée par d’autres sujets plus brûlants. Il s’agit notamment de ce « Printemps mauritanien » en gestation qui s’inscrit dans cette vague de révolutions arabes qui ont détrôné des présidents et secoué bien des régimes. L’agenda de l’opposition bâti autour du thème « Aziz Dégage ! » reviendra certainement dans les questions ainsi que la crise politique née du blocage consécutif, selon l’opposition, à la non application des accords de Dakar, mais aussi cette tentative de contournement par un dialogue réduit avec trois partis de l’opposition.

Le Programme Emel 2012 et les scandales financiers qui l’ont vidé de sa substance seront aussi certainement évoqué, d’autant plus que l’opinion voudra bien savoir ce qui a été fait des 45 Milliards d’UM mobilisés pour la circonstance. Aussi en sellette, les chantiers routiers dont la plupart souffre de retards considérables, comme la route Rosso-Boghé, Kiffa-Tintane, Kiffa-Kankossa, etc.

Sera également abordé l’enrôlement sur les registres des populations et les entraves que ce projet a connu, notamment aux yeux de la communauté négro-africaine. Dans ce cadre, les relations diplomatiques avec les pays voisins seront probablement au cœur des préoccupations, si l’on sait que la taxe pour la carte de séjour obligatoire pour les étrangers est en train d’empoissonner les relations entre la Mauritanie et son voisinage africain immédiat, longtemps régies par la libre circulation des biens et des personnes.

La question des réfugiés, des terres agricoles, des gazras, l’augmentation folle des prix de produits de première nécessité, la grogne des transporteurs, la gestion des richesses minières et l’attitude des multinationales vis-à-vis de la main d’œuvre mauritanienne, la crise dans le secteur des pêches maritimes, l’avenir des accords avec l’Union européenne…Autant d’épines aux pieds du pouvoir que le président Mohamed Ould Mohamed Abdel Aziz devra s’employer au cours de son « Show  » médiatique à enlever.

Cheikh Aïdara

Source  :  L’Authentique le 26/07/2012

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