Crise : Surenchère de part et d’autre

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Les échos de la rencontre entre le président Aziz et les élus de l’Union pour la République (UPR) ne rassurent pas. Ceux qui s’attendaient à une prise de décision fracassante, allant dans le sens d’une annonce de remaniement ministériel, d’un dialogue bis ou d’une quelconque mesure allant dans le sens de l’apaisement en ont pris pour leur grade.

Le pouvoir persiste et signe : La COD (Coordination de l’opposition démocratique n’a d’autre choix que de s’arrimer au dialogue déjà entamé avec quatre partis d’opposition, le gouvernement a encore sans doute de beaux jours devant lui et les mouvements de protestation qui fusent de partout n’inquiètent pas un pouvoir sûr de son fait.)

C’est dire que le président Aziz a choisi de répondre à l’escalade de la COD par l’escalade. La rencontre entre le pouvoir et les parlementaires de la Majorité tenue quelques heures seulement avant le déclanchement de ce que les étudiants de l’Institut supérieur des études et recherches islamiques (ISERI) avaient dénommé  » la journée de la colère «  et l’arrêt de travail de quelques heures prôné par les professeurs de l’enseignement secondaire, montre que le président Aziz ne sent pas encore la nécessité de changer de stratégie face à une situation qui se détériore de jour en jour. On peut même estimer que c’est l’autosatisfaction qui reste le maître mot chez un Raïs sans doute obnubilé par la vue des magasins du CSA (Commissariat à la sécurité alimentaire), à tel point qu’il aurait déclaré, lors de sa rencontre avec les parlementaires de sa majorité, que la Mauritanie n’a pas besoin de l’aide des autres pour mettre en œuvre son plan d’urgence  » Emel 2012 « . Comme si la mobilisation de 45 milliards d’ouguiyas ne dépendait que de la volonté d’un gouvernement qui ne se donne jamais la peine de faire les choses comme il faut. Il est vrai, cependant, que le retard pris dans la mise en œuvre de l’opération  » Emel 2012 « , à quelque quatre ou cinq mois du début de l’hivernage, joue en faveur du pouvoir qui avait laissé les citoyens supporter les plus durs moments de cette période de soudure. Multiplication des gestes de séduction

On constate, cependant, que le pouvoir est décidé à prendre la main, sans vraiment savoir comment. Pour l’instant, les médias officiels, notamment la TVM, tentent de donner une visibilité à l’action du gouvernement dans certains secteurs jugés très sensibles : prix, agriculture, aide aux réfugiés touaregs,  » Emel 2012 « . C’est ainsi que la télévision est allée cherchée les images et  » témoignages «  du  » succès «  de ce plan d’urgence auprès des habitants des quartiers Tarhil de Nouadhibou, probablement, plus  » présentables  » que ceux, si proches, de la Capitale. C’est également dans ce cadre qu’il faut placer la tournée du ministre du Développement rural au Trarza où l’on nous ressert  » les préparatifs de la campagne agricole  » à venir, l’expérimentation de la culture du blé et la volonté de l’Etat de donner les terres aménagées aux populations pauvres ! A M’Beiket Lahwach, ville créée par Ould Abdel Aziz pour fixer les populations nomades de Dhar, et contribuer de cette façon à une sorte de barrière de sécurité contre Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI), l’électricité est désormais disponible. L’on revient également sur la restructuration de la ville de Kaédi où l’objectif de la caméra de la TVM montre longuement un centre de santé  » fini et remis au DRASS « , commente le responsable du projet, une école encore en chantier et le plan des lotissements à réaliser. Comme si cela relevait d’un miracle mais aussi s’il s’agissait de mettre fin à tous les problèmes de survie de populations qui souffrent encore de manque cruel d’infrastructures de base et de services. Ce à quoi se livre la TVM depuis quelques jours, c’est ce qu’on appelle dans le jargon,  » le réchauffé « , procédé par lequel le pouvoir espère sans doute raviver la flamme de ses partisans et donner l’espoir à tous ceux qui croient encore qu’il est possible de faire quelque chose avant qu’il ne soit trop tard.

Surtout que la COD, requinquée par ses derniers succès, se fixe maintenant comme ultime objectif de faire chuter le président Aziz ! Autant dire que face à une telle escalade, le pouvoir se dit qu’il faut fermer, pour le moment la porte du dialogue.

Les déclarations d’Aziz, lors de la visite de l’Hôpital de la Mère et de l’Enfant, sur sa disposition à dialoguer sans tabous avec les partis de la COD ont créé un certain malaise aussi bien au sein de la Majorité que de  » l’opposition participationniste « . A tel point que le président du parti  » Al Wiam « , Boidiel Ould Houmeid, avait vu en cela une sorte de reculade qui risquait de donner raison à tous ceux qui mettaient en doute les résultats du dialogue et accusaient  » l’opposition participationniste  » d’avoir cédé, sans raison, à la pression d’Aziz. Certainement aussi que la rencontre entre ce dernier et le président d’Al Wiam, le même jour où le Raïs avait reçu au palais présidentiel les élus de la Majorité, avait pour principal sujet le recadrage des positions à propos de l’attitude à prendre vis-vis de cette question du dialogue. Le choix de la fermeté, même s’il va dans le sens de la continuation de la crise, permet quand même à Aziz de ne pas perdre ce qui est déjà un acquis (le rapprochement avec le président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir et Boidiel Ould Houmeid), sans être sûr qu’une tentative d’ouverture sur la COD va lui permettre de rebondir. Autant dire que la crise continue.

Sneiba Mohamed

Source  :  L’Authentique le 27/02/2012

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