Coupe du Monde de Rugby : Célébration ovale au pays du rugby

Le rugby revient chez lui. Vingt-quatre ans après la première Coupe du monde – et l’unique sacre des All Blacks -, tout un pays en ébullition s’apprête à vibrer. Aux capricieux rebonds du ballon ovale bien sûr, mais surtout au parcours de ses idoles. Une Coupe du monde de rugby en Nouvelle-Zélande, c’est comme un Mondial de football au Brésil.

 

 

Plus qu’un sport, une religion pour 4 millions de Kiwis nourris dès le biberon au récit des légendes noires. Et impatients d’apprendre, dès qu’ils sont en âge de marcher, les rudiments du haka, cette danse guerrière maori.

Les joueurs au mythique maillot griffé de la fougère argentée sont donc en mission. Sur leurs terres, pas d’alternative pour eux. Le triomphe ou l’opprobre. Mettre fin à un quart de siècle de désillusions ou ne plus sortir de chez eux pendant des mois. Pour le capitaine Richie McCaw et ses coéquipiers, la pression est maximale. Il leur faut rompre la malédiction. Soulever le trophée Webb Ellis pour apaiser ces plaies toujours vives, ces désillusions qui, tous les quatre ans, leur rappellent que le noir dont ils se parent si fièrement est aussi la couleur du deuil…

Grands favoris de la compétition planétaire, les All Blacks savent que leur quête est semée d’embûches. Tapis dans leur immense ombre, leurs adversaires fourbissent méticuleusement leurs armes, brûlants d’une seule pensée : faire choir le maître. Parmi les plus sérieux prétendants au Graal, l’Australie et son maillot à l’or prémonitoire. Depuis un an, les Wallabies emportent tout sur leur passage. Les Français, humiliés 59-16 au Stade de France en novembre dernier, peuvent en témoigner. En remportant, il y a trois semaines, la finale du Tri-Nations face aux All Blacks (25-20), le génial Genia et ses partenaires ont semé le trouble chez leurs rivaux de toujours.

L’Afrique du Sud, tenante du titre, et l’Angleterre, redoutable compétitrice, prétendent, elles aussi, se mêler à la lutte suprême. Si rien dans leurs derniers résultats ne conforte vraiment cette ambition, les sous-estimer serait la pire des fautes. Et le XV de France ? Vu ses ternes prestations depuis douze mois, il faut avoir la foi pour le placer parmi les postulants au titre. Mais les Bleus sont toujours capables d’un exploit venu d’ailleurs, les All Blacks en ont payé le prix fort en 1999 et en 2007.

La Coupe du monde offre aussi l’occasion, trop rare, de voir évoluer d’autres cultures, d’autres jeux, d’autres joueurs tout aussi acharnés à assouvir leur passion. Les grandes nations du rugby ont la mauvaise habitude de rester entre elles. Celles du Nord ont le Tournoi, les ogres du Sud le Tri-Nations. Et, deux fois par an, leurs routes se croisent. Les autres doivent se contenter des miettes, attendre, le ventre creux, d’être invités tous les quatre ans au banquet.

Alors, pendant presque deux mois (la finale, le 23 octobre, semble aujourd’hui si lointaine…), les amateurs de rugby vont enfin pouvoir admirer les magiciens des Fidjis, frissonner à la vue des inquiétants guerriers des Tonga, respecter la grinta des Argentins et la rudesse des Géorgiens, (re)découvrir ces Japonais vibrionnants. Et saluer, dans ce sport loin d’être universel (seulement 117 pays ont une fédération de rugby), l’arrivée d’un nouveau venu, unique novice de la compétition : la Russie. Pour un alléchant face-à-face avec les États-Unis… Avec délectation, dans les stades ou devant leur petit écran (dès potron-minet pour les supporteurs français, décalage horaire oblige), ils savoureront les arabesques des meilleurs joueurs, les terribles plaquages des plus costauds. Ils goûteront ce mélange unique et subtil de finesse et de brutalité. Place au spectacle…

David Reyrat

Source  :  Le Figaro le 08/09/2011

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