Service civique national: Vaincre les préjugés sociaux et la discrimination

Deux ateliers de validation d’études de faisabilité, sur le service civique national et CAP sur les préjugés sociaux, la discrimination et la citoyenneté, se sont tenues du 7 au 10 mars derniers, à Nouakchott.

 

 

Organisée par le Ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports (MCJS), en collaboration avec l’UNICEF, cette rencontre s’inscrivait dans le cadre du fonds espagnol pour la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement (OMDGFUND) et visait à renforcer la cohésion sociale, rapprocher les citoyens entre eux, ainsi qu’à lutter contre toutes les formes d’exclusion et contre toutes tares sociales qui entravent le processus de développement de la société mauritanienne. Les jeunes, les femmes et les couches vulnérables en constituaient les publics-cibles.
Un comité de pilotage, parrainé par le MCJS, comprenait les départements de la Défense, de l’Intérieur, de l’Enfance, Famille et Enfant, de la Communication et du commissariat aux droits de l’Homme, renseigne le directeur de la promotion de la jeunesse, Sidi Mohamed Ould Mohamed Taleb.

Après plusieurs mois de travaux, le comité a approuvé les études et proposé un atelier à large échelle, comprenant: le mouvement associatif, trois réseaux de jeunes, deux de SOS Pairs éducateurs, un de l’association «Citoyenneté», un du mouvement des jeunes; huit associations dynamiques, treize délégués régionaux, cinq leaders d’opinions et dix du comité de pilotage. Les participants se sont scindés, les 7 et 8 mars, en trois groupes: nature du service civique national, structure et ancrage; public-cible, profil durée et thèmes; et, enfin, mise en œuvre, lancement du plan d’actions et budgétisation. Les 9 et 10, les participants à la deuxième étude se sont également subdivisés, après les exposés du bureau d’études, en trois groupes: préjugés sociaux et discrimination; citoyenneté et, enfin, mise en œuvre du programme de communication.
L’étude CAP portait sur les préjugés sociaux, la discrimination et la citoyenneté parmi la jeunesse mauritanienne, dans la zone de Lehdada (régions du Hodh Gharbi et du Hodh Charghi), ainsi que dans les sites des rapatriés, dans les wilayas du Brakna et du Trarza. Elle a procédé à l’analyse du contexte sociohistorique de la société mauritanienne plurielle, héritière de vielles civilisations dont les institutions sociales étaient marquées, en plus de l’esclavage, par le système de castes, typique des formations sahéliennes, dont la structuration s’est achevée au cours de l’empire du Mali. La forte islamisation de la sous-région n’a atténué que très modérément la prégnance de ce système.

Prédominance des pesanteurs
Dans son ensemble, la société mauritanienne, soutient le rapport, n’a pas encore su rompre, de façon décisive, avec un certain nombre de mentalités et traditions culturelles véhiculant des valeurs anti-égalitaristes et discriminatoires, comme celles liées à l’esclavage traditionnel et moderne. «Au-delà de ces graves problèmes d’ordre social, le système politique mauritanien  est resté longtemps miné par une crise de coexistence ethnique qui devait culminer en 1989/1991, à la faveur d’un différend frontalier entre la Mauritanie et le Sénégal, débouchant sur des expulsions, massives et réciproques, de ressortissants dont des dizaines de milliers de Mauritaniens, renvoyés de part et d’autre de la frontière entre les deux pays […].
 […] Cette succession de crises aux relents identitaires pèse, encore, sur l’unité nationale, même si les autorités ont entamé des politiques visant l’émancipation et l’insertion économique des anciens esclaves, d’une part, le retour des déportés et le règlement des autres dimensions du «passif humanitaire», d’autre part. Ces mesures, pour positives qu’elles soient, ne suffisent pas», estiment les consultants, «à elles seules, pour assurer l’atteinte des objectifs escomptés et prévenir les risques redoutés. Il est indispensable», recommandent ceux-là, «d’engager, également et concomitamment, une action multiforme et de longue haleine, pour hisser le pays à un niveau acceptable de développement de la citoyenneté, garante de la cohésion sociale».
A cet effet, les pouvoirs publics, en concertation avec les partenaires au développement, ont mis en place le Programme de Prévention des Conflits et de Renforcement de la Cohésion Sociale (PPCRCS), sur financement de l’Espagne, dans le cadre du Fonds pour la réalisation des OMD. Il cible les groupes vulnérables, en particulier les anciens esclaves habitant les adwabas du sud-est du pays, dans les zones de Lehdada, et les rapatriés, de retour du Sénégal et du Mali, installés sur des sites d’accueil, tout au long de la zone du fleuve.
C’est un programme de communication, sur la base des principaux résultats et recommandations de l’étude CAP, visant à sensibiliser les jeunes et le reste de la population contre les préjugés sociaux et toutes les formes de discrimination et à promouvoir la citoyenneté, à travers le renforcement de la culture démocratique et l’éducation citoyenne. Les jeunes de Lehdada estiment que leur situation géographique, frontalière, aiguise leur fibre patriotique et renforce leur sensibilité citoyenne, bien plus que la moyenne de leurs concitoyens de l’hinterland.
Le déterminant historique est plus présent, chez les jeunes rapatriés. L’expérience de l’exil a été déterminante, dans la maturation de leur conscience de citoyens mauritaniens et le rôle de l’éducation à la citoyenneté. «Dans un contexte où se perpétuent les préjugés sociaux et les discriminations et où les sources de conflits et de violences se multiplient, l’éducation à la citoyenneté est d’autant plus nécessaire que les référentiels historiques et culturels demeurent fortement contrastés», soulignent les consultants.
La seconde étude est relative à la faisabilité d’un service civique national en Mauritanie. Elle part d’un constat: «ce qu’on appelle, pudiquement, «les événements de 1989» est un drame humain qui a laissé des blessures, profondes, qu’il faudrait panser le plus tôt possible, afin que cette frange de la population se réinsère véritablement et qu’elle retrouve la confiance, la sérénité et l’amour de la Patrie».
Outre les groupes sociaux déjà évoqués, «il serait injuste», mentionne l’étude, «de passer sous silence la situation difficile que vivent les personnes handicapées en Mauritanie». Dans ces conditions, l’introduction d’un Service Civique National (SCN) pourrait contribuer au renforcement de l’unité nationale et de la cohésion sociale. Il apparaît clairement, de l’avis du consultant, que la Mauritanie a besoin de rechercher des solutions aux nombreux défis qui l’interpellent et de trouver une réponse, appropriée, aux déséquilibres et dysfonctionnements qui caractérisent, actuellement, la société mauritanienne. Le SCN est une des pistes en ce sens.
«Il y a presque unanimité», constate le consultant, «autour de la mise en place d’une structure chargée de superviser et de coordonner toutes les actions du volontariat, sur l’ensemble du territoire national. Ses missions:
* Supervision et coordination du SCN
* Sensibilisation sur les actions du volontariat
* Formation des volontaires et instauration de mesures d’incitation
* Mise à disposition des moyens nécessaires
* Suivi et évaluation

Compte rendu  THIAM MAMADOU

Source  :  Le Calame le 16/03/2011

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