Mohamed Ould Abdel Aziz était la vedette du festival des villes anciennes qui se tient depuis mercredi à Chinguitty.Ignorant ou feignant d’ ignorer tout des menaces de AQMI, et sûr de sa sécurité rapprochée, le président mauritanien a donné le coup d’envoi de cette manifestation
en procédant à l’inauguration d’un événement qui doit chaque année consacrer la visite d’une ville historique du pays du pays.L’un des symboles de cette ouverture est dédié à l’une des activités au programme de cette manifestation à savoir le tir à la cible.Pistolet à la main, l’ancien militaire a envoyé quelques balles en l’air pour
simuler l’exercice de ce jeu non sans se rappeler ses moments favoris avec les armes.
Cette petite gâchette ludique est aussi symptomatique d’une certaine tendance à incarner une attitude héroïque chez nos dirigeants surtout en temps de troubles. Au-delà de ce cérémonial symbolique, le discours a mis l’accent sur le vif du sujet avec des allusions sans équivoque à un islam tolérant tel que pratiqué par les fondateurs de cette cité séculaire, où se déroule le
festival. Le message est clair, le président rassure que « la Mauritanie est un pays de paix, d’hospitalité de rencontre et d’ouverture », dont les traditions et les valeurs séculaires léguées par les érudits religieux doivent être préservées. Cerises sur le gâteau, Mohamed Ould Abdel Aziz a promis de dégager un fonds important de près de 600 millions d’um pour
protéger le patrimoine ancestral des villes historiques que sont chinguitty, Oualata, Ouadane, Tichitt, Koumbisalé. Si dans le fond cette décision est louable, dans sa mise en œuvre il y a lieu de procéder à une hiérarchisation des besoins et des pertinences et d’assigner des objectifs nationaux précis à ce projet. L’Unesco et d’autres organismes à vocation culturelle ont apporté de précieuses contributions à la réhabilitation et à la préservation de ces sites
historiques. Mais la finalité n’a pas toujours été celle qui était escomptée. Il y a une certaine tendance fâcheuse à confondre ce patrimoine historique à des legs familiaux. Un certain penchant pour une « gestion seigneuriale » des fonds documentaires et autres vestiges gagne certains milieux conservateurs de ces localités. Des tiraillements sur fonds d’ascendance tribal et spirituel resurgissent à chaque fois que des financements sont obtenus. L’Etat doit adopter une stratégie nationale en la matière en harmonie avec les normes de l’Unesco. Comme tout patrimoine historique, les objets anciens doivent être étiquetés répertoriés et estampillés mémoire collective et non comme des propriétés privées. Aussi la mémoire de la Mauritanie n’est pas seulement enfouie dans des zones géographiques ou des aires culturelles données. Elle est dans les déserts, dans les vallées, à travers les rites acoustiques, gestuels dans le matériel, l’immatériel. Tout ce que le passé a laissé comme traces doit être sauvegardé au nom de la diversité linguistique et culturelle qui fonde l’existence de la Mauritanie. Une Mauritanie qui doit être écrite par tous ses historiens et non par des pseudo- intellectuels qui, par mauvaise foi falsifient les faits sans changer la vérité de l’histoire écrite par d’illustres spécialistes.
Cheikh Tidiane Dia
Source : Le Rénovateur le 20/02/2011