Egypte : scènes de guérilla cette nuit au Caire

De nouveaux affrontements ont eu lieu, tôt jeudi 3 février, sur la place Tahrir au Caire, coeur de la contestation contre le président égyptien depuis 10 jours.

 

Il y a eu au moins trois morts et plusieurs blessés, selon des témoins sur place. Déjà, mercredi, les affrontements ont fait au moins trois morts et des centaines de blessés.

Washington a immédiatement réagi. Le Département d’Etat a pressé les Américains qui souhaitent quitter l’Egypte de se rendre « immédiatement » à l’aéroport du Caire, prévenant que les « vols américains supplémentaires après jeudi sont improbables ». La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, dans un appel téléphonique au vice-président égyptien Omar Souleiman, a condamné les « choquants » affrontements sanglants de la veille au Caire.

 

Les pro-Moubarak ouvrent le feu

 

Sur la place Tahrir (place de la libération), des tirs sporadiques ont commencé à se faire entendre vers 4h (2h GMT, 3h à Paris) ce jeudi matin et étaient toujours audibles une heure plus tard, a indiqué un correspondant de l’AFP sur place. Des tirs en provenance du pont d’Octobre, où sont positionnés les partisans du président Hosni Moubarak, ont fait plusieurs victimes.

Trois personnes ont été tuées jeudi matin, portant à six le nombre de morts au cours de ces dernières 24 heures, a-t-on appris auprès d’un médecin. « Trois personnes ont été tuées par des tirs au cours des trois dernières heures », a déclaré le Dr. Amr Bahaa, depuis un hôpital de fortune installé dans une mosquée près de la place. « La plupart des victimes sont arrivées ces trois dernières heures, beaucoup avec des blessures par balles », a-t-il ajouté, estimant le nombre total de blessés depuis mercredi à plus d’un millier.

L’Alliance des juristes égyptiens a déclaré de son côté dans un communiqué que les manifestants anti-Moubarak sur la place étaient sous le feu de leurs adversaires et que plusieurs d’entre eux avaient été tués ou blessés.

L’armée s’était déployée en masse dans la soirée aux alentours de la place, immense esplanade dans le centre du Caire, devenue depuis le 25 janvier le point de ralliement des manifestants anti-Moubarak, qui y campent par milliers chaque nuit malgré le couvre-feu.

Le « vendredi du départ »

 

Mercredi soir, le vice-président Omar Souleimane avait appelé les manifestants à rentrer chez eux, comme l’avait fait l’armée en milieu de journée, prévenant que le dialogue proposé à l’opposition ne pouvait débuter avant l’arrêt des manifestations.

Dans une interview à CBS News, le chef de file de l’opposition égyptienne, Mohamed ElBaradei a rejeté une fois de plus l’offre de dialogue d’Omar Souleimane, insistant sur le fait qu’Hosni Moubarak doit d’abord quitter le pouvoir.

Le mouvement de contestation a appelé à une nouvelle manifestation massive vendredi, baptisée « vendredi du départ », dans laquelle elle entend réunir comme mardi plus d’un million de personnes, malgré la promesse d’Hosni Moubarak de s’effacer à la fin de son mandat en septembre.

Les Frères musulmans, principale force d’opposition, ont rejeté « toutes les mesures partielles proposées » par le président et refusé qu’il reste en poste jusqu’en septembre.

 

 

« C’est la guerre civile »

 

Mercredi matin, des milliers de partisans du chef de l’Etat étaient arrivés aux abords de la place. Après des heures de tensions, des heurts d’une extrême violence ont éclaté, à coups de pierres, de bâtons, de barres de fer et parfois de couteaux et de coktails molotov.

Selon le ministère de la Santé, cité par la télévision d’Etat, trois personnes, dont un appelé de l’armée, ont été tuées mercredi et plus de 639 blessées, la plupart par des jets de pierres.

Par endroits, les partisans du président ont chargé, montés sur des chevaux ou des dromadaires. Ils ont aussi jeté des pierres depuis des toits et des balcons d’immeubles surplombant la place.

A l’exception de tirs de semonce en début d’après-midi, les militaires ne se sont pas interposés, tentant plutôt de s’abriter.

« Ce qu’on voit devant nous n’est jamais arrivé auparavant. Des accrochages entre Egyptiens, c’est la guerre civile », a déploré Mohamed Sayed Mostafa, 26 ans.

Selon un bilan non confirmé de l’ONU, les heurts de la première semaine de contestation auraient fait au moins 300 morts et des milliers de blessés.

Source  :  Le Nouvel Observateur le 03/02/2011

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