Interview avec le Doyen Najim

Le Rénovateur : Qui sommes-nous, en tant que Mauritanie?

Najim Ould Med El Béchir : La Mauritanie est arabe, africaine et islamique. Comme j’ai l’habitude de le dire, la Mauritanie est un palmier dattier, avec ses dattes de différentes couleurs sur le même socle islamique.

 

Le Rénovateur : En regardant le rétroviseur sur le chemin de nos cinquante ans, quels sont vos sentiments ?

NMEB : Une question lapidaire sur une route chaotique et sans ceinture de sécurité; je suis tout de même très fier de notre indépendance. Mais j’aurais préféré que nous nous posons la question: « qu’avons-nous fait durant ces cinquante ans? »

Le Rénovateur : Vos meilleurs souvenirs durant les cinquante ans ?

NMED : Je me souviens de cette aube chargée d’espoir et d’euphorie (Larmes d’émotions).
J’avais 32 ans et aujourd’hui Dieu Merci, j’ai 82 ans donc vous comprenez, j’ai traversé l’espace et le temps en vivant le cinquantenaire dans mon cœur et dans mon esprit.
Pour revenir sur le meilleur souvenir, c’est sans doute, cette matinée du 28 Novembre 1960 où j’ai grimpé pour décrocher le drapeau français et hisser notre emblème national. La fierté et l’honneur sont confondus, j’étais là, au bon moment et au bon endroit.

Le Rénovateur : Six ans après cette matinée historique, vous êtes désigné maire délégué à la ville de Nouadhibou. Est-ce un choix mérité ou un choix de circonstance, pour récompenser l’audacieux jeune homme, qui avait décroché les couleurs du Colon?

NMEB : (Sourire). Il est très difficile de répondre à cette question, mais je crois l’avoir mérité car étant un fils du terroir, affranchi intellectuellement et surtout maitrisant parfaitement la langue de Molière. J’étais peut être une cible potentielle de ce choix donc un choix mérité.

Le Rénovateur : Votre bilan de Maire ?

NMEB : Peut-on parler de bilan dans un chantier où tout était à faire. Nouadhibou comme Nouakchott, sont des villes créées de toutes pièces et qui n’ont pas eu la chance de leurs consœurs africaines, souvent têtes de pont de la colonisation. Nouadhibou a par contre hérité de timides réalisations (SIGP – Aéroport – Port – Eglise etc…).
En tant que maire, j’étais confronté à une agression climatique de ma presqu’île. Vent et vagues torturaient les chevilles de Nouadhibou. Ma priorité était de faire boire mes concitoyens, à partir de Bordeaux, de Marseille et d’Espagne, selon la feuille de route des navires, qui nous ravitaillaient en eau douce. Après le précieux liquide, la santé et l’éducation occupaient le reste de mon agenda.

Le Rénovateur : La jeunesse peut-elle être fière des modèles, que vous êtes?

NMEB : Sommes-nous réellement les modèles de cette jeunesse déconnectée et oisive. Elle est souvent obnubilée par d’autres modèles du petit écran, de l’internet. C’est vraiment une génération Mousselssel et du Foot. Durant une période récente, le vol et le mensonge étaient devenus, des critères d’ascension sociale, pour se faire une place au soleil, en puisant impunément dans la poche collective de l’Etat. C’est qui a peut être influencée, cette jeunesse, se disant qu’on peut réussir sans effort.

Le Rénovateur : La cohabitation ?

NMEB : Une question sensible et souvent utilisé comme explosif, pour opposer les mauritaniens, entre eux-mêmes. Je le dis et je le répète, la Mauritanie est pour moi, un palmier dattier avec ses différentes couleurs et l’islam comme dénominateur commun.
Nos langues, nos Us et Coutumes sont nos richesses et doivent être utilisés comme facteurs d’intégration et de fraternité.

Le Rénovateur : Qu’avons-nous fait de nos cinquante ans d’indépendance?

NMEB : Notre élan pour bâtir un pays fort et soudé, a été ébranlé par des douloureux évènements, qui ont fissuré la fondation de l’édifice (la guerre du Sahara, les évènements de 1989 et les multiples coups d’Etat).

Malgré tout, ces évènement ne doivent pas freiner notre volonté, pour rebondir et surtout ils doivent faire naitre en nous, le patriotisme inclusif, pour éviter le virus du nationalisme exclusif.

Le Rénovateur : Votre dernier mot?

NMEB : Bonne fête à tous, qu’Allah fasse de notre pays, un havre de paix et d’abondance. J’allais dire un pont de développement, comme l’avait rêvé un certain Moktar Ould DADDAH: « Si le Sahara, si le Sahel et le Fleuve, si le Chergue et Guibla représentent des entités vivantes avec des vocations particulières, nous placerons au dessus d’elles, une entité qui les résume toutes : La MAURITANIE. »

Le Rénovateur : Merci Doyen

NMEB : C’est moi, qui vous remercie.

Propos récueillis par NGam Seydou CP NDB.

Source  :  Le rénovateur le 11/11/2010

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