
Initiatives News – L’arrestation nocturne de l’ancien sénateur Mohamed Ould Ghadda, président de l’Organisation de la Transparence Inclusive (OTI), suscite une vive indignation à Nouakchott. Entre accusations d’entrave à la justice et dénonciations de répression politique, cette affaire place la protection des lanceurs d’alerte au cœur du débat national.
L’interpellation a eu lieu ce samedi 13 décembre, aux alentours de 23h50. Des agents en civil se sont présentés au domicile de Mohamed Ould Ghadda pour l’emmener vers les locaux du bureau de lutte contre la cybercriminalité. Sa famille dénonce une procédure brutale, menée sans mandat ni convocation préalable. Ce coup de filet intervient au moment précis où l’activiste s’apprêtait à déposer une nouvelle plainte concernant un scandale de corruption présumé lié à un marché public du laboratoire de la police.
Le bras de fer judiciaire
Face au tollé, les autorités justifient cette mesure par des impératifs juridiques. Une source officielle accuse l’ancien sénateur d’entrave à la justice et de dissimulation de preuves. Il lui est reproché d’avoir affirmé détenir des documents compromettants sans les avoir transmis aux enquêteurs lors de précédentes investigations. Le pouvoir pointe également du doigt des « insultes à la justice » et soulève un vice de forme : l’organisation de M. Ghadda ne serait pas légalement habilitée à porter plainte, n’ayant pas atteint les cinq années d’existence requises par la loi.
Une « police politique » dénoncée par l’opposition
Ces explications peinent à convaincre la classe politique et la société civile. Dans une déclaration commune publiée ce dimanche 14 décembre, un collectif de députés de premier plan — incluant Kadiata Malick Diallo et Mohamed Bouyé — fustige une interpellation « provocatrice ». Le parti Tawassoul et plusieurs autres formations dénoncent un retour aux méthodes de la « police politique », y voyant un signal dangereux destiné à décourager quiconque dénoncerait la gestion des deniers publics.
Pour la députée Kadiata Malick Diallo, signataire de la déclaration, cette arrestation est un camouflet pour la lutte contre la corruption :
« L’Organisation pour la Transparence Inclusive avait produit un rapport accablant montrant une vaste opération de corruption dans le dossier du laboratoire de la police. Alors que le dossier avait été classé sans suite, Mohamed Ould Ghadda est revenu à la charge avec de nouvelles preuves irréfutables. On s’attendait à ce que les autorités le protègent en tant que lanceur d’alerte, conformément aux slogans officiels. Mais c’est l’inverse qui se produit. »
L’élue appelle à maintenir la pression : « Pratiquement toute l’opinion nationale presse, société civile, blogueurs fustige cette attitude. Il faut que la lutte contre la corruption soit effective et réelle, pas seulement une affaire de slogans. »
Alors que Mohamed Ould Ghadda demeure en détention, cette affaire relance avec force le débat sur l’indépendance de la justice face aux dossiers sensibles touchant aux marchés publics. Pour de nombreux observateurs, le traitement de ce dossier sera un test majeur pour la crédibilité de l’État dans sa volonté affichée d’éradiquer la corruption.
Oumar El-Hadj Thiam
Source : Initiatives News (Mauritanie)
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